Avec 25.000 festivaliers par jour, toute grosse affluence dans le nouveau Village qui séduit mais montre aussi ses limites. Pari tenu pour des organisateurs heureux. De Lubiana à Calogero en passant par Piano Club, une troisième journée intense et variée !
Entre l’anonymat et la notoriété, qu’est-ce qui décide de la trajectoire d’un artiste ? Le travail, l’entourage, la persévérance et ce qu’il faut de chance. Si les choses se décident avant tout sur le talent, alors c’est sûr Lubiana, ira titiller les étoiles ! Repassée dans l’ombre après avoir le plateau éblouissant de "The Voice Belgique" il y a un petit temps déjà avec quelques interprétations magistrales, la belgo-camerounaise a offert aux chanceux professionnels présents un showcase de toute beauté, accompagnée de cette Kora devenue son instrument porte-bonheur, sorte de lien naturel avec ses racines ouest-africaines. Voix enchanteresse et naturel confondant, elle se raconte et fait chanter les pros avant de les convaincre par son univers doux et prenant. On ne peut qu’espérer qu’il ensorcèlera rapidement un public nombreux tellement elle fût touchante !
Petit tour ensuite dans la bulle ouatée de Mathilde Renault qui derrière son clavier proposait les compositions planantes de son dernier album "Lucky number". Si, en interview, elle le présentait comme "un album à écouter couché", c’est plutôt assis par terre et en toute proximité que les curieux s’étaient installés pour le déguster entre ombre et soleil, comme en métaphore de ces compositions entre ténèbres et lumière. Une artiste au succès trop discret qui nous plaît vraiment !
L’observation vaut également pour deux vrais coups de cœur qui jouaient, hélas, en même temps à quelques mètres l’un de l’autre. À gauche, Tim Dup et sa mélancolie heureuse, notre album francophone de 2017, ses claviers, ses boucles pour faire danser et sa poésie pour faire rêver. On l’aime ce gars-là ! À droite, Daran dont le spectacle "Le monde perdu" nous avait transporté et qui revenait rempli de la jouissive énergie rock d’"Endorphine" son magistral dernier disque, joué d’une traite créant une merveilleuse tension avant de revenir avec gourmandise sur quelques morceaux de son fameux "Huit barré" qui invite toujours le public à "Dormir dehors" avec autant d’enthousiasme. On l’aime tout autant !
Avec les ondes dansantes de Christophe Willem apparaissent les limites de la nouvelle configuration du festival. La foule devant la scène Rapsat était tellement dense que certains spectateurs ont dû se contenter de regarder le show sur écran, bien loin dans le village, loin du son et de l’ambiance. Sans parler de la plateforme pour les personnes handicapées à laquelle on aurait pu ajouter un étage !
Effet indésirable aussi pour Piano Club qui jouait avant Calogero et qui a assisté impuissant à une transhumance progressive vers la gauche de la foule, partie se placer pour ne rien rater de la tête d’affiche du soir. Ce groupe belge est pourtant une de nos grosses claques de l’année ! Une vraie fête, un concert d’amis, de bande, une belle heure de danse, de légèreté et de plaisir communicatif. Un collectif merveilleusement catchy qui a tout pour casser la baraque ! Les voies du succès sont impénétrables qu’on vous dit !
Dans la pénombre sous les arbres, le grand Daan a lui aussi donné tout ce qu’il avait avec un groupe hyper rock et efficace devant un public de fans et de feu ! Quelle présence, quelle dégaine quels uppercuts agrémentés de cuivres cinglants, ce type est décidément inusable et unique ! il fait tellement plaisir à voir, heureux comme un gamin d’être à nouveau de la partie dans une formule ultra vitaminée !
S’il y en a un qui a trouvé le chemin des cieux, c’est évidemment Calogero acclamé comme un demi-Dieu mais resté simple comme au premier jour de gloire. On le sait et pourtant à chaque fois, on est surpris par sa façon d’écrire l’histoire de la chanson populaire dans une communion unique. Les mélodies, le naturel, le son, le show tout y est et donne des frissons, même sans être fan de ses disques. Avec ce petit supplément d’âme qui construit le "vivre ensemble" en musique. Chapeau l’artiste que l’on retrouvera avec joie à Forest National le 29 et 30 novembre prochain !
Les félicitations valent d’ailleurs pour beaucoup de ceux que l’on a applaudi durant ces trois jours et qui nous ont offert un bien beau voyage pour cette édition anniversaire : Francis Cabrel, Clara Luciani, Daran, Jérôme Mardaga, Daan et Piano Club, entre autres, auront marqué ce tournant du renouveau qui s’achève ce dimanche sous un soleil radieux !
François Colinet