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Economie

Focus sur le modèle économique de McDonald's : cette entreprise, avant tout, immobilière

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Par Miguel Allo sur base d'une chronique de Simon Bourgeois

Alors que le conflit social chez Delhaize est toujours d'actualité, depuis que le groupe a annoncé, le 7 mars dernier, sa volonté de franchiser les 128 magasins qu’elle gère directement et de transférer le personnel de ces magasins aux futurs franchisés. C'est dans ce contexte que l'on va s’attarder sur un modèle économique étonnant, celui de l'enseigne américaine McDonald’s, qui inspire les entreprises de la grande distribution.

En principe, lorsqu'on se rend chez McDonald’s, c'est parce qu'on a faim et qu'on souhaite, par exemple, manger un hamburger et des frites.

On pense aussi que l'enseigne gagne sa vie en vendant des hamburgers et des frites. Ça semble assez logique. Aussi étrange que cela puisse paraître, ce n'est pas le cas. L'entreprise a 40.000 restaurants dans le monde et n’en exploite quasiment aucun. 94% des restaurants McDonald’s sont franchisés, autrement dit, c’est un indépendant qui gère ce restaurant.

La chaîne de restauration rapide gagne de l'argent en prenant un pourcentage des ventes. Le gérant d'un restaurant paye une commission sur les ventes, il paye le droit d’exploiter la marque, la notoriété, de mettre le M jaune sur la devanture du restaurant. Et puis surtout, et c’est ça qui est important, McDonald’s est propriétaire du bâtiment de presque tous ses restaurants et il le loue aux franchisés.

Avec les années, l'enseigne a développé une expertise assez imparable dans la détection d’endroits avec du potentiel pour le développement d’un restaurant. Exemples : dans les centres-villes, le long des grosses routes, à côté d’un gros carrefour avec un gros parking et où il est facile de s’arrêter sur le pouce. Quand l'entreprise repère un endroit avec un fort potentiel, elle achète le bâtiment, et quand un franchisé est candidat à ouvrir un nouveau restaurant, elle lui impose l’endroit. Et l'endroit, évidemment, se trouve dans la liste des restaurants qu’il a acquis et pour lequel il faut payer un loyer.

Jamais perdant

Il est intéressant de se poser la question de la rentabilité du nouveau restaurant. Que se passe-t-il le succès n'est pas au rendez-vous ? C'est là l'intérêt de ce modèle, peu importe que ça fonctionne ou pas. Contrairement à une commission sur les ventes par exemple : si le franchisé vend moins, il y a moins de commissions. A contrario, pour un franchisé quand les affaires ne marchent pas, il faut tout de même payer le loyer. Et si ça ne marche vraiment pas, au point qu’aucun franchisé ne veut pas reprendre l’emplacement (ce qui doit être assez rare), McDonald’s peut toujours revendre son bâtiment. En immobilier, on perd rarement de l’argent. Ils ne sont donc jamais perdants.

Nous ne vendons pas des hamburgers, nous sommes une entreprise immobilière

Peut-on dès lors dire que la chaîne de restauration rapide est en fait une entreprise immobilière ? Effectivement, le fait de louer des restaurants, c'est le modèle. Et c’est d’ailleurs une phrase assez célèbre de Ray Kroc, un des premiers patrons de la chaîne, qui disait : "Nous ne vendons pas des hamburgers, nous sommes une entreprise immobilière". En fait, les clients de McDo ne sont pas vous ou moi quand on a faim et qu’on cherche un hamburger et une frite, mais ses clients sont les franchisés, qui eux-mêmes vendent des hamburgers pour payer leur loyer. En fait, le burger n’est que le produit d’appel. La " vraie " source de revenus est le loyer. D’ailleurs, sur un restaurant, le loyer représente deux tiers des revenus de McDonald’s. Le reste, ce sont les commissions sur les ventes.

Delhaize va-t-il copier le modèle McDonalds

Le modèle McDo semble bien rodé. At-il fait des émules ? Le groupe Delhaize, qui a annoncé vouloir franchiser ses magasins, s'en est-il inspiré avec l'idée de louer les murs et déléguer la gestion ?

Louer les bâtiments, la réponse est oui. Sur les 128 magasins qu’il s’apprête à franchiser, Delhaize est le propriétaire dune centaine et il va le rester. L'enseigne va donc effectivement louer ces magasins aux futurs franchisés à un coût fixe. On peut dès lors dire que cela fait partie des revenus de Delhaize et du modèle.

Mais la grande différence avec McDonald’s, c'est que dans la grande distribution, le business model étant très différent, le loyer n’est pas l’essentiel du revenu du franchiseur. Dans ce cas-ci, l’essentiel des revenus du franchiseur est la commission sur les commandes. Autrement dit, le franchisé est obligé de se fournir en très grande partie directement à la centrale du franchiseur. Donc de commander des produits Delhaize pour mettre dans ses rayons, et c’est là que le franchiseur va prendre une marge, en général de 2 ou 3%, et c’est là qu’il fait son beurre.

Conclusion, dire que Delhaize devient une entreprise immobilière comme dans le modèle McDonald’s, ce n'est pas le cas. Et cela même s’il y aura effectivement un loyer, mais ce ne sera pas l’essentiel. Disons plutôt qu’il va devenir un grossiste, un fournisseur pour ses clients, qui ne sont donc désormais non plus vous et moi, mais ses franchisés.

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