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Finances publiques : "Il faudra confier les compétences de la Fédération Wallonie-Bruxelles aux Régions", selon le professeur Joseph Pagano

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Par Marc Sirlereau

Il y a deux mois, Frédéric Daerden, le ministre du Budget du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, tirait la sonnette d’alarme. "Sur le plan financier, comme c’est aujourd’hui, la situation de la Fédération Wallonie-Bruxelles n’est pas soutenable."

Et Frédéric Daerden d’évoquer un déficit historique de 1,9 milliard en 2020 et de plus d’un milliard en 2021. Et selon lui, à ce rythme-là, en 2024, la dette atteindra les 15 milliards d’euros.

Et donc, pour Joseph Pagano, professeur de Finances publiques à l’Université de Mons et auteur récemment d’un livre sur l’état des finances publiques en Belgique, "à moyen terme, la solution sera de confier les compétences de la Fédération Wallonie-Bruxelles aux Régions."

La Fédération Wallonie-Bruxelles n’a pas de pouvoir fiscal

Dès le départ, pour Joseph Pagano, les dés étaient pipés. "Pour un niveau de pouvoir comme la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui gère notamment une compétence stratégique comme l’enseignement, ne pas pouvoir augmenter ou diminuer ses recettes est un handicap considérable, voire insurmontable. Pour ses recettes, elle doit compter sur le bon vouloir du fédéral et sur celui de la Région wallonne et de la Cocof à Bruxelles."

Et Joseph Pagano d’estimer qu’il y a une contradiction flagrante entre les attentes nombreuses et les moyens possibles. "On ne peut pas éternellement dire qu’il faut inciter les jeunes à faire des études supérieures et continuellement expliquer qu’il n’y a pas d’argent pour le refinancer. Idem pour la recherche."

Il faudra régionaliser les compétences de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Pour Joseph Pagano, à terme, il faudra y arriver. "On ne fera pas cela demain. Il n’y a pas de consensus politique pour faire cela tout de suite. Mais lors d’une prochaine réforme de l’Etat, je ne vois pas comment on pourra éviter que les Régions prennent le relais de la Fédération, notamment en leur confiant l’enseignement."

Pour le Fédéral, il y a moins d’inquiétude malgré le taux d’endettement

La Belgique a aujourd’hui un taux d’endettement tournant autour des 115% du Produit intérieur brut. Comme dans les années 90. Mais pour Joseph Pagano, il faut relativiser. "Ce n’est pas un désastre. La viabilité de l’Etat n’est pas remise en cause. Nous venons de connaître sur 12 ans deux crises majeures avec la crise bancaire et la crise due au Covid. Que la dette augmente, vu ces circonstances, n’est pas anormal."

"Et puis, et surtout, aujourd’hui, insiste Joseph Pagano, les taux d’intérêt sont à 0%. Dans les années 80 ou 90, ils ont parfois atteint les 10%. L’inquiétude serait autre si La Banque centrale européenne décidait d’augmenter les taux d’intérêt. Mais pour cela, il faudrait que l’inflation monte au-delà des 4, 5 ou 6%. A cause d’un choc pétrolier par exemple. Mais aujourd’hui, l’inflation est en-dessous des 2%."

Revoir les critères européens sur le plan budgétaire

Pour Joseph Pagano, réduire la dette publique implique une bonne croissance. "Ou sinon, c’est un défi quasiment insurmontable."

Et le professeur de l’Université de Mons de s’interroger sur la pertinence des critères établis par l’Europe notamment en termes d’endettement possible pour les Etats. "Les mentalités ont évolué. Tout le monde peut se rendre compte que demander aujourd’hui à des Etats d’avoir un taux d’endettement à 60%, cela n’a plus beaucoup de sens. Cela ne correspond plus à la réalité. La moyenne d’endettement des Etats membres de la zone Euro est de 95%. Plus de trente ans après les critères de Maastricht, chacun peut se rendre compte que l’objectif a été mal calibré."

 

 

 

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