Le BAM, Musée des Beaux-Arts de Mons, présente une exposition consacrée au plus colombien des artistes colombiens. Le peintre et sculpteur Fernando Botero (1932) ancre sa pratique dans la culture populaire de ses origines et puise ses références dans l’histoire de l’art. L’art précolombien et l’art populaire de Colombie et du Mexique irriguent son travail. Les têtes olmèques, colossales, produites par une des premières grandes civilisations de la Mésoamérique, et la céramique de Raquira en Colombie figurent parmi ses premières influences. Le muralisme mexicain illustré par Diego Rivera et l’art des fresques du Trecento et du Quattrocento, de Giotto et de Piero della Francesca, nourrissent l’œuvre de Botero. Les natures mortes espagnoles, les bodegones, et les vanités de l’école flamande, ont aussi imprégné son regard, ainsi que la peinture du siècle d’or espagnol, représenté par Vélasquez. L’expressionnisme abstrait américain sera un écho contemporain à l’œuvre du Colombien marquée par la puissance expressive du trait et de la couleur et la monumentalité de la forme.
L’art est déformation.
Le visiteur parcourant les différentes époques de l’œuvre reconnaît les influences et les références distillées dans l’art de Botero, singulier par la patte et universel par la portée. Les objets et les personnages aux formes rondes et voluptueuses, célèbrent la déformation des corps. Ils apparaissent dans l’espace de la toile comme des ballons gonflés à l’hélium. Botero choisit de " peindre une tête comme une pomme ", en suivant la recommandation de Cézanne, mais au-delà des formes, il dépeint la comédie humaine, de manière parodique ou ironique. Il renouvelle le genre du portrait officiel en croquant les présidents et les cardinaux. Il traduit la frivolité des fêtards qui célèbrent le carnaval. Il égratigne, mais ne donne pas dans la critique politique, excepté dans la série où il dénonce les tortures d’Abu Ghraib et les violences infligées aux détenus iraquiens par l’armée des Etats-Unis. L’engagement social et politique de Botero est toutefois canalisé dans l’acte de peindre, car il est conscient que l’art n’a pas le pouvoir de changer la société.
Cecila Braschi, commissaire de l’exposition, au micro de Pascal Goffaux.