Coronavirus

Faut-il raccourcir les délais pour le booster ? "Omicron change la donne, il faut se dépêcher"

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Par Xavier Lambert

L’Agence européenne des médicaments (EMA) a déclaré jeudi que les doses de rappel pouvaient être administrées de façon "sûre et efficace" trois mois seulement après la dernière injection (alors que jusqu’ici elle avait recommandé d’attendre six mois pour le Pfizer) " si un intervalle aussi court est souhaitable du point de vue de la santé publique", a indiqué Marco Cavaleri, chef de la stratégie vaccinale de cette agence.

La Belgique devrait-elle suivre cet avis et à l’instar de la Grèce ou du Royaume-Uni raccourcir les délais après lequel ce booster est recommandé ? Pour tous les âges ? Et même si on vient d’être infecté ?

Nous avons posé ces questions à deux experts, Michel Goldman, professeur d’immunologie à l’ULB, et Sophie Lucas, immunologiste à l’UCLouvain, et globalement la réponse est que ce n’est pas tant le délai officiel l’important, mais d’effectivement se faire administrer cette troisième dose dès que c’est possible, voire de toute urgence pour les personnes les plus vulnérables. "Omicron change la donne": les deux scientifiques craignent très fort la progression exponentielle du nouveau variant et les conséquences dramatiques qu’elles pourraient amener, notamment pour nos hôpitaux.

Faut-il raccourcir les délais actuels ?

(Aujourd’hui, on peut obtenir une dose booster de Pfizer ou Moderna 2 mois après l’injection du vaccin Johnson&Johnson, 4 mois après la deuxième dose d’AstraZeneca, 6 mois après la deuxième dose de Pfizer ou Moderna)

Michel Goldman : "Je ne fais pas de politique, et ce n’est pas à moi de fixer des délais. Pour ma part, on est encore dans une phase où c’est le ministre qui décide qui est vacciné et quand, et j’espère qu’on va revenir à une situation où la décision de vaccination est dans le champ de la médecine.

Les données disponibles suggèrent que 2 doses sont insuffisantes, et ce d’autant plus face au variant Omicron, et qu’il faut recourir à une 3e dose. Et les gens plus vulnérables devraient faire l’objet de cette dose booster le plus rapidement possible, il y a une forme d’urgence pour eux".

Sophie Lucas : "Je pense que le délai en soi, ce n’est pas le plus important. De toute façon, pour ceux qui ont reçu de l’AstraZeneca ou du Johnson&Johnson, au plus vite ils auront le booster, au mieux c’est. Pour le Pfizer ou le Moderna, on pourrait raccourcir le délai, mais l’important, c’est de le faire dès que c’est possible. On est à nouveau dans une phase d’administration de masse, et il faut y aller dès que possible, car cette troisième dose va faire remonter l’immunité rapidement, en moins d’une semaine"

 

Faut-il réserver le booster aux plus âgés ?

Michel Goldman : "Pour les plus âgés, et les plus fragiles, il y a urgence. Pour les autres, qui feront probablement des formes asymptomatiques ou légères, moins, mais c’est difficile de fixer une limite d’âge. Disons qu’au-delà de 50 ans, il y a un intérêt à faire cette troisième dose le plus rapidement possible. Il y en a un pour les autres aussi mais je dirais que pour les plus jeunes, les adolescents, il y a beaucoup moins d’urgence.

Mais on sait quelles seront les populations menacées, ce seront les personnes obèses, ou qui présentent des comorbidités. Comme les souches précédentes, le variant omicron risque en effet d’être plus ou moins méchant selon le profil. Tout le monde va donc devoir la faire, mais pour les plus vulnérables, c’est véritablement urgent. On a beaucoup de raisons de penser que les vaccins actuels protégeront encore moins contre la transmission d’Omicron, donc l’idée, ce n’est pas de vacciner pour empêcher cette transmission, mais bien pour se protéger".

Sophie Lucas : "Peu importe : dès qu’on est dans les conditions, pour tous les plus de 18 ans, il faut prendre rendez-vous. Avec Omicron, on constate que l’immunité apportée par une infection préalable est beaucoup moins efficace, et donc même s’ils en meurent moins, il faut faire cette troisième dose pour restaurer la protection amenée par le vaccin, car les risques d’une infection symptomatiques sont réduits, les risques d’une infection sévère sont réduits, les risques d’hospitalisation sont réduits.

On a un devoir d’aider nos services de soins hospitaliers, qui n’en peuvent plus. Et étant donné le décalage entre les contaminations et les formes graves du Covid-19, l’accalmie qu’on commence à voir dans les cas ne se voit pas dans les hôpitaux. Donc, si on a des temps de doublement très courts comme on nous les annonce pour Omicron, il faut se préparer au plus vite : on avait annoncé fin mars, l’objectif, réalisable, est de terminer cette campagne de boosters pour fin janvier".

Et si on vient de faire l’infection après une double vaccination ?

(Le ministre de la Santé recommande de la faire au plus vite, mais en attendant au moins 14 jours après l’infection)

Michel Goldman : "Il y a quelques semaines encore, je disais qu’on pouvait attendre 6 mois après une infection pour se faire administrer le booster. Mais quand on voit ce qui se passe au Danemark et en Norvège, je suis inquiet. Aujourd’hui, les gens qui me posent la question, je les encourage quand même à se faire vacciner au plus vite. 14 jours, ça me semble personnellement un peu court, moi j’attendrais un délai de 2 à 3 mois et les dernières informations. Mais pour les personnes plus vulnérables, il vaut mieux en parler dès maintenant avec son médecin".

Sophie Lucas : "Il faut la faire, mais pas nécessairement après 14 jours. Notre système immunitaire peut profiter du temps dans un processus de maturation de la réponse anticorps. Le mieux est d’en parler avec son médecin, mais ma recommandation serait d’attendre 2 à 3 mois".

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