Euro 2024

Euro 2020 : A force de jouer avec le feu, Didier Deschamps s'est-il brûlé les ailes ?

Didier Deschamps après le match contre la Suisse.

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Par Antoine Hick

Il n’y avait qu’à voir la tête de Didier Deschamps au coup de sifflet final lundi soir pour comprendre dans quel désarroi nageait le sélectionneur français. Alors que ses joueurs noyaient leur chagrin en se tombant machinalement dans les bras ou en allant féliciter leurs bourreaux suisses, lui est resté coincé sur sa ligne de touche. Immobile. Presque inerte, le regard vidé par le stress. Probablement savait-il intérieurement que cette désillusion collective pouvait (et allait) lui être imputée.

Si sûr de ses forces, presque entêté dans ses choix depuis de longues années, Deschamps avait su façonner une équipe à son image : conservatrice et organisée défensivement, cynique et réaliste devant les cages. Malheureusement pour les Bleus, il a décidé de changer son fusil d’épaule au pire des moments. Sa fidèle continuité jetée au placard, il a décidé d’innover. Quitte à désarticuler et à faire douter ce noyau qui campait pourtant sur un amas de certitudes.


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Pourquoi rappeler Benzema si tard ?

Quand, en mai dernier, Deschamps a décidé de mettre son amour-propre de côté en rappelant l’ancien banni, Karim Benzema, de nombreuses voix se sont élevées pour applaudir ce choix. Et avec le recul, difficile de reprocher quoi que ce soit au Madrilène, précieux dans le jeu et létal dans les moments importants (4 buts, 2e meilleur buteur du tournoi).

Mais pourquoi l’avoir rappelé si tard ? Pourquoi avoir attendu les derniers matches de préparation en mai ? Pourquoi avoir pris le risque de chambouler un secteur offensif, certes moins talentueux intrinsèquement avec Giroud en tant que titulaire, mais probablement plus huilé et habitué à jouer ensemble ? La question mérite d’être posée.

Tragic System

Karim Benzema et Didier Deschamps en équipe de France.

Les mêmes interrogations peuvent légitimement surgir concernant le système prôné par Deschamps. Tout au long du tournoi, il a tâtonné, donné l’impression de chercher la bonne formule pour mettre en musique son orchestre de stars. Une anomalie, alors que son schéma de jeu ultra-organisé avait fait ses preuves en 2016 et surtout en 2018.

Dos au mur et sans doute trop entêté à mettre son trio de superstars Mbappé-Griezmann-Benzema dans les meilleures dispositions, il a douté et tergiversé. Quitte à opter (sous la pression des joueurs ?) pour un absurde système en 3-5-2, avec deux pistons, qui a fait déjouer son équipe pendant 45 minutes contre la Suisse.

Visiblement conscient d’avoir fait le mauvais choix, Deschamps a fait machine arrière dès la mi-temps, pour revenir à son 4-4-2. Un 4-4-2 vite transformé en 4-3-3 dès l’entrée de Kingsley Coman. Trois systèmes en un seul match, du Anti-Deschamps par excellence.

Une gestion des troupes remise en question

Même topo concernant la gestion de son groupe. Pourquoi s’être entêté à placer un Adrien Rabiot dans ce rôle inhabituel de piston gauche alors que Leo Dubois, réduit à un rôle de faire-valoir et relégué en tribunes, avait dépanné à cette place avec Lyon à plusieurs reprises cette saison ?

Pourquoi avoir sorti de son chapeau un Clément Lenglet à bout moralement et lessivé psychologiquement après une saison ratée à Barcelone, alors que le Catalan n’avait plus disputé une seconde en match officiel depuis deux mois ?

Pourquoi avoir remplacé un Antoine Griezmann, pourtant l’un des rares joueurs offensifs à se donner défensivement, en fin de match alors que le spectre d’une prolongation guettait ? 

Soyons clairs, tout n’est évidemment pas imputable à Didier Deschamps, les joueurs, sans doute trop confiants, ont aussi leur part de responsabilités dans cette faillite collective. Mais force est de constater qu’en se lançant dans des brouillons tactiques, un exercice auquel il nous avait jamais habitués, Deschamps a précipité la chute de ses Bleus. Son laconique "Je suis responsable", énoncé du bout des lèvres après la rencontre, en dit d’ailleurs long. Ce mardi, Didier Deschamps a un genou à terre. Et dans son sillage, c’est la France tout entière qui sanglote toujours.

 

France - Suisse : Le Résumé du Match

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