Monde Amérique du Nord

États-Unis : l’agression de Paul Pelosi, dernier avatar d’une Amérique violente envers ses responsables politiques

Des agents du FBI déployés devant le domicile de Nacy et Paul Pelosi à San Francisco, le 29 octobre 2022.

© Getty Images

Par Sonia Dridi, correspondante de la RTBF aux États-Unis

"Nos enfants, petits-enfants et moi-même sommes traumatisés par la dangereuse attaque sur notre Pop (Papi)". Ce sont les mots de Nancy Pelosi, la cheffe des démocrates au Congrès, dans une lettre adressée hier soir à ses collègues. La violente agression contre son mari, Paul Pelosi, 82 ans, est un rappel brutal de l’extrémisme qui s’est emparé de la politique américaine ces dernières années, à moins de deux semaines des élections de mi-mandat prévues le 8 novembre prochain.

La haine comme moteur

Les motivations de l’agresseur David DePape font toujours l’objet d’une enquête du FBI et de la police de San Francisco mais, selon les premiers éléments, c’est un adepte de thèses complotistes d’extrême droite. Il pense notamment que les élections ont été volées en 2020, une théorie soutenue par l’ancien président Donald Trump.

Selon les médias américains, il serait l’auteur de deux blogs qui tournent autour de propos haineux à l’encontre des minorités, des femmes ou encore des juifs. Cet ancien militant naturiste, qui aurait un temps voté pour le parti Vert, serait adepte de théories QAnon.

9625 menaces contre les parlementaires en 2021

Les démocrates et de nombreux républicains se disent horrifiés par l’attaque. Beaucoup d’élus disent avoir peur, alors que les menaces contre ces derniers ont plus que doublé depuis 2017, année de l’investiture de Donald Trump. En 2021 il y a eu 9625 menaces contre les parlementaires, surtout contre les élues, des femmes issues de la diversité.

Les groupes et milices d’extrême droite sont particulièrement pointés du doigt. Plusieurs membres de ces milices sont d’ailleurs accusés de s’être lourdement armés pour attaquer le Capitole le 6 janvier 2021, espérant maintenir Donald Trump au pouvoir. L’ancien président a exacerbé la violence politique en encourageant ses partisans à le défendre et en les nourrissant de théories du complot sur les élections de 2020.

"Un environnement de fascisme"

L’élue démocrate de Virginie Elaine Luria a récemment déclaré "Si nous n’arrêtons pas le grand mensonge, perpétré par ceux qui tentent de gagner à tout prix, notre démocratie cessera d’exister." Alexandria Ocasio-Cortez, l’une des élues les plus menacées, dont la sécurité a été renforcée, a, elle, assuré hier sur la chaîne MSNBC qu’il y avait actuellement un "environnement de fascisme" aux Etats-Unis. Un sentiment partagé par de nombreux démocrates.

"Cette violence est terrifiante", a renchéri l’élue progressiste Pramila Jayapal, qui avait dû appeler les autorités quand un homme s’était rendu devant son domicile à plusieurs reprises en juillet, proférant des injures avec une arme à la ceinture.

Ces derniers mois, de plus en plus d’élus ont d’ailleurs alerté contre le regain de violence visant la classe politique américaine. La sénatrice républicaine du Maine Susan Collins, dont une fenêtre de sa maison a été brisée par un inconnu, a notamment déclaré au New York Times qu’elle ne serait pas "surprise "si un élu ou sénateur se faisait tuer".

Les Républicains divisés

Beaucoup craignent aussi pour la sécurité de leurs familles. L’élu républicain Adam Kinzinger a regretté que les théories du complot promues par l’agresseur de Paul Pelosi soient "encouragées" par des membres de son parti et a appelé chacun de ses collègues républicains à dénoncer la violente agression.

Certains républicains n’ont pas hésité à se servir de cette violente attaque comme argument de campagne à l’approche des élections de mi-mandat. Le gouverneur de Virginie Glenn Youngkin a déclaré devant des partisans, à propos de Nancy Pelosi "Il n’y a aucune raison d’user de la violence, mais on va la renvoyer avec lui (Paul Pelosi) en Californie."

Cette agression met un peu plus en lumière les divisions entre républicains traditionnels, modérés et les plus extrémistes, pro-Trump, soutenant des thèses conspirationnistes. Alors que la violence politique est de plus en plus exacerbée, les forces de l’ordres sont en alerte dans tout le pays. De nombreux bureaux électoraux ont déjà pris des mesures préventives contre la menace d’actes violents durant les élections : installation de verre pare-balles et résistant aux bombes ou encore fortification des murs avec du Kevlar.

Signe de la période politique tourmentée que traversent les États-Uinis, 9% seulement des Américains pensent que la démocratie marche "très bien" ou "extrêmement bien", selon un récent sondage Associated Press/NORC Center for Public Affairs Research.

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