Patrimoine

En Afrique, plus de 200 sites patrimoniaux menacés de disparition à cause du réchauffement climatique

À Alexandrie, la citadelle Qaitbay est menacée par la montée du niveau de la mer, malgré les protections mises en place.

© De Agostini via Getty Images – DEA / C. SAPPA

Par Johan Rennotte

Avec le réchauffement climatique, la hausse du niveau des mers menace directement des milliers de sites patrimoniaux à travers le monde. Une étude scientifique internationale vient de démontrer qu’en Afrique, plus de 200 lieux, dont de nombreux classés à l’UNESCO, risquent d’être touchés par l’érosion et les inondations d’ici les 100 prochaines années.

L’étude, dirigée par le Dr. Nicholas Simpson de l’Université du Cap et parue dans le journal Nature, a ainsi analysé durant un an la position géographique de 284 sites patrimoniaux sur les côtes du continent africain. Les scientifiques ont modélisé chacun des scénarios possibles des conséquences du réchauffement, et les ont appliqués à l’exposition de tous les sites côtiers. Et les résultats sont inquiétants.

Ainsi, 56 sites (soit 20% de la totalité des sites étudiés) sont menacés par un événement extrême de montée du niveau de la mer, qui se produit une fois par siècle, mais devrait être encore plus grave que les siècles précédents. D’ici à 2050, les ruines romaines de Tipasa, en Algérie, ou les sites archéologiques égyptiens du nord du Sinaï pourraient être irrémédiablement touchés.

Les ruines romaines de Tipasa, en Algérie, menacées par la montée des eaux.
Les ruines romaines de Tipasa, en Algérie, menacées par la montée des eaux. © mtcurado – libre de droits

Les patrimoine et matrimoine du Cameroun, de République du Congo, de Djibouti, du Sahara occidental, de Libye, du Mozambique, de Madagascar, de Mauritanie et de Namibie seront, selon toute vraisemblance, atteints par les catastrophes climatiques marines. Le pire des scénarios ajoute à cette liste la Côte d’Ivoire, Cap Vert, le Soudan ou encore la Tanzanie.

Selon l’étude, les petites îles et atolls seront probablement les plus meurtris, comme l’île de Kunta Kinteh, à l’embouchure du fleuve Gambie, ancien comptoir et lieu de mémoire de l’esclavagisme, qui pourrait finir totalement immergée si rien n’est fait pour enrayer la hausse des températures.

L’île de Kunta Kinteh, en Gambie, ancien comptoir esclavagiste, pourrait finir les pieds dans l’eau.
L’île de Kunta Kinteh, en Gambie, ancien comptoir esclavagiste, pourrait finir les pieds dans l’eau. © mtcurado

Mais ce qui est encore plus inquiétant, c’est que les sites a priori épargnés selon l’étude sont malgré tout déjà touchés par les conséquences du réchauffement. Ainsi, en Egypte, la citadelle de Qaitbay qui se tient à l’emplacement du Phare d’Alexandrie, l’une des 7 merveilles du monde, est régulièrement inondée depuis 2019, alors qu’elle bénéficie de plusieurs protections aménagées pour la préserver des marées.

 

La citadelle de Qaitbay si tient à la place du légendaire Phare d’Alexandrie.
La citadelle de Qaitbay si tient à la place du légendaire Phare d’Alexandrie. © David Stanley

Les scientifiques n’ont pas seulement étudié l’impact du réchauffement sur les sites culturels côtiers, mais également sur de nombreux sites naturels. Là aussi les conclusions sont alarmantes, avec des écosystèmes entiers qui seront affectés par la montée des eaux, comme les récifs coralliens ou les mangroves, mais aussi une importante quantité de parcs naturels classés.

Le parc national du Diawling, en Mauritanie, est directement menacé.
Le parc national du Diawling, en Mauritanie, est directement menacé. © Frans Sellies

L’étude souligne le fait qu’aucun des pays et territoires concernés n’a actuellement une gestion adéquate de leur héritage culturel, et qu’aucun n’est capable de prendre des mesures pour lutter contre les effets des catastrophes naturelles qui s’annoncent. La faute à un manque de moyens chronique, au contexte politique et économique souvent difficile, mais aussi, parfois à un manque d’intérêt ou de volonté dans le chef des autorités en charge.

L’article souligne cependant que la situation n’est pas totalement irrémédiable, car si les émissions de gaz à effet de serre sont réduites dans les prochaines années, le risque qui pèse sur les sites les plus exposés sera réduit de 25%. Mais est-ce suffisant pour sauver cet héritage culturel qui compte certains des sites parmi les plus importants au monde ?

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