Il a occupé la plus haute fonction politique du pays lors de la précédente législature. Premier ministre pendant près de trois ans, il siège désormais sur les bancs de l'opposition. À la Chambre des représentants, il laisse les membres de son parti monter au créneau et porter les coups au gouvernement fédéral. De là à paraître parfois très (trop ?) discret. Pourtant, il est toujours bien là, attentif, prêt à rebondir et à attaquer à son tour les décisions fédérales. Elio Di Rupo (PS) était l'invité de Jeudi en Prime.
Le contrôle budgétaire
Le gouvernement fédéral va se lancer dans la recherche d'argent. Il lui manque 2,2 milliards d'euros pour respecter le budget 2016 et jusqu'à 3,2 milliards pour atteindre l'équilibre en 2018. Interrogé à ce sujet, Elio Di Rupo n'hésite pas : "Ce gouvernement obtient l'Oscar du plus mauvais gouvernement et le ministre des Finances obtient l'Oscar du plus mauvais ministre des Finances". Depuis plusieurs jours, l'actuel ministre des Finances, Johan Van Overtveldt (N-VA), est au centre des critiques, car il s'est trompé dans ses estimations de recettes. Dès l'automne dernier, la Cour des comptes avait fait savoir que ce budget 2016 ne tenait pas la route. Pour Elio Di Rupo, "il y a une incompétence totale", car, précise-t-il, "on n'a jamais vu un ministre des Finances surestimer à ce point les recettes".
Mais où trouver l'argent ? La N-VA voudrait que ce soit dans la sécurité sociale. Mais ses partenaires ne partagent pas cet avis, à l'image du CD&V qui a déjà annoncé qu'on ne touchera pas à cette sécurité sociale. Pour Elio Di Rupo, "pas question de faire payer deux fois les citoyens : ils ont déjà eu le saut d'index, l'augmentation de la TVA, les accises, les pensions qui vont diminuer et passer à 67 ans. Si, comme le veut la N-VA, on fait des économies dans la sécurité sociale, ce sera pour les citoyens quelque chose d'insupportable et ce serait la victoire de la N-VA". Le président du PS plaide pour que le gouvernement fédéral cherche de l'argent du côté de la lutte contre la fraude fiscale, de la taxation des revenus sur le capital et des intérêts notionnels."
Interrogé sur son propre bilan quand il était Premier ministre, Elio Di Rupo affirme : "Nous avons assaini le pays en préservant la sécurité sociale. Nous l'avons fait avec des semaines et des semaines de travail et avec des compromis mesurés à un million près avec beaucoup de subtilité. Aujourd'hui, on constate que le gouvernement y va vraiment à la grosse masse".
L'immunité d'Alain Mathot
Le bourgmestre de Seraing, le socialiste Alain Mathot, est inculpé depuis fin 2011 de corruption passive, de faux et usage de faux, participation à une association criminelle. La Commission des Poursuites de la Chambre s'est réunie ce jeudi après-midi. Le vote devrait intervenir la semaine prochaine, mais, déjà, il semble que l'immunité parlementaire d'Alain Mathot ne devrait pas être levée. Pour Elio Di Rupo, "il faut laisser la commission travailler". Puis, il ajoute : "Comme collègue, c'est toujours quelqu'un qui a fait son travail. Je n'ai pas de raison de ne pas avoir confiance dans le travail qu'il réalise".
La présidence du PS
Rejeté dans l'opposition aux lendemains des élections législatives de 2014, le PS tente d'exister face au gouvernement fédéral MR-Open Vld-CD&V-N-VA. Elio Di Rupo cherche un nouveau souffle pour son parti. Depuis début 2015, il s'est lancé dans une opération baptisée "le chantier des idées". Son objectif : donner la parole aux militants lors de grands colloques pour aboutir à de nouvelles idées. Mais cette stratégie porte-elle ses fruits ? Et surtout suffira-t-elle à conserver ses électeurs tentés par le PTB ? Au-delà de la communication, n'y a-t-il pas aussi un problème de casting ? Certains militants verraient bien le ministre-président wallon Paul Magnette occuper le Boulevard de l'Empereur, le siège du parti. Mais à 64 ans, le président Elio Di Rupo ne semble pas à avoir dit son dernier mot : "J'ai choisi Paul Magnette pour être président de la Région wallonne. C'est un homme avec un grand talent et il fait ça remarquablement bien". Mais pas question pour lui de s'interroger sur sa succession.
L'Office wallon des Déchets
Interrogé sur l'ancien comptable de l'Office wallon des Déchets qui a détourné plus de 2 millions d'euros, le président du PS parle d'"un scandale". Pour lui, "le fait qu'on supprime l'Office wallon des Déchets est une bonne chose". Mais Elio Di Rupo refuse que cette affaire ne jette la suspicion sur l'ensemble des fonctionnaires wallons qui font "un boulot formidable".
L'accueil des réfugiés
Depuis plusieurs mois, des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants fuient les zones de guerre et tentent de rejoindre l'Europe. Mais la "route des Balkans" n'est plus praticable depuis mercredi. La Slovénie, la Serbie, la Croatie et la Macédoine ont fermé leurs frontières. Pourtant, sur le terrain, il y a urgence humanitaire. Entre la Macédoine et la Serbie, plus d'un millier de réfugiés s'entassent dans un champ, sous quelques bâches, les pieds dans l'eau. Tous tentent de lutter contre le froid.
Pendant ce temps, les Européens et la Turquie cherchent à se mettre d'accord sur cette crise migratoire. La Turquie souhaite que l'Union européenne lui verse trois milliards d'euros supplémentaires d'ici à 2018. Ils s'ajouteraient aux trois milliards déjà promis au gouvernement turc fin novembre. En échange, la Turquie s'engage à retenir au maximum les candidats à l'asile.
Pour Elio Di Rupo, "il faudrait demander au Haut Commissariat aux Réfugiés d'avoir des bureaux un peu partout", et puis "répartir les réfugiés sur l'ensemble des territoires européens et sur l'ensemble des communes". Le président du PS ajoute que "la Turquie n'est pas prête du tout à entrer dans l'Union européenne, car les droits de l'Homme sont bafoués".