Les éclaireurs

EGYPTE 2022 : La Dent de la Momie

Osirmose dans les salles égyptiennes du Musée Art & Histoire

© KMKG-MRAH

Ce samedi 23 juillet 2022, Fabienne Vande Meerssche (@fvandemeerssche) reçoit dans LES ÉCLAIREURS : Jean-Philippe Hastir, Infirmier dans le Service d’imagerie médicale des Cliniques universitaires Saint-Luc, Raphael Olszewski, Professeur clinique aux Cliniques universitaires Saint-Luc, Chef de clinique dans le Service de stomatologie et de chirurgie maxillo-faciale des Cliniques universitaires Saint-Luc et titulaire de cours & Caroline Tilleux, Archéologue spécialisée en égyptologie et muséologie, Doctorante en égyptologie et Collaboratrice scientifique aux Musées Royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles.

DIFFUSION : samedi 23 juillet à 17h08’ et dimanche 24 juillet à 23h08’.

Jean-Philippe Hastir

Jean-Philippe Hastir

Jean-Philippe Hastir est infirmier et travaille dans le Service d’imagerie médicale des Cliniques universitaires Saint-Luc depuis 1995. Passionné d'histoire depuis toujours, il s’est porté volontaire lorsque le projet a été lancé. Il a réalisé les scanners des momies égyptiennes et précolombiennes des Musées Royaux d’Art et d’Histoire (une quarantaine de pièces en tout). Il s’est occupé de l'imagerie de celles-ci (reconstructions 3D, images, multiplanaires, fichiers de pré-impression 3D,…).

Jean-Philippe Hastir a participé à l'analyse des images avec Caroline Tilleux et Raphaël Olswezski. Dans le cadre de ce projet, il a donc eu l’opportunité d'allier son métier et sa passion en intégrant une équipe multidisciplinaire.

Jean-Philippe Hastir a aussi pu faire découvrir ce type de projets via plusieurs présentations à des congrès : communication aux Journées Francophones de Radiologie 2016-2017-2018, Journées Françaises de Scanner 2016 et au 17th MDCT User Meeting 2017, ainsi qu’un poster au Radiological Society of North America Annual Meeting 2015.

Raphael Olszewski

Raphael Olszewski

Raphael Olszewski est Professeur clinique aux Cliniques universitaires Saint-Luc à Bruxelles, Chef de clinique dans le Service de stomatologie et de chirurgie maxillo-faciale aux Cliniques universitaires Saint-Luc et titulaire de cours de chirurgie générale et bucco-dentaire et du cours de Radiologie dento-maxillo-faciale. Raphael Olszewski est coordinateur universitaire du cours complet de cone beam computed tomography (CBCT) en français, cours accrédité par l’AFCN (Agence Fédérale de Contrôle Nucléaire) et par le Ministère de Santé du Luxembourg.

Raphael Olszewski est également l'Éditeur en chef de la revue scientifique NEMESIS, revue open access gratuite pour les lecteurs et auteurs, fondée et soutenue par l’UCLouvain.

Au quotidien, le Professeur Olszewski s'occupe cliniquement de la chirurgie orale, de la réalisation et des protocoles de CBCT, de la consultation des douleurs oro-faciales, de l'enseignement et de la recherche scientifique. Il est responsable du laboratoire de recherche Oral and maxillofacial surgery Lab, OMFS Lab, pôle NMSK, Institut de recherche expérimentale et clinique, UCLouvain.

Ses principales activités de recherche actuelles sont le développement de l’Encyclopédie universelle clinique CBCT gratuite et accessible à tous les praticiens, le développement continu de la revue NEMESIS qui s'inscrit dans la philosophie de la Science ouverte (car la Science, et surtout les publications scientifiques, sont fermées au monde, car payantes) et la recherche interdisciplinaire sur la collection des momies égyptiennes des Musées Royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles.

Caroline Tilleux

Caroline Tilleux

Caroline Tilleux est diplômée de l'UCL (Archéologie, et spécialisation en égyptologie et muséologie). Elle a ensuite suivi un cours d'anthropologie à l'ULB et a travaillé en tant que bénévole sur les collections anthropologiques de l'Institut des Sciences naturelles. Afin de lier ses deux passions, Caroline Tilleux entame, en 2014, un doctorat en égyptologie avec pour objectif l'étude des momies égyptiennes conservées au Musée Art & Histoire de Bruxelles, avec l'appui de nouvelles technologies.

Elle contacte donc le service d'Imagerie médicale des Cliniques universitaires Saint-Luc et, grâce à l'enthousiasme et l'intérêt de l'équipe, créé un partenariat entre les deux institutions permettant les recherches. En 2015, l’équipe a procédé à 3 séances importantes de CT-scans sur les individus momifiés pouvant être transportés. Depuis plusieurs années, Caroline Tilleux travaille donc sur les résultats de ces analyses. Notons qu’elle mène cette thèse sur fonds propres ! Toutefois, dès 2016, elle a été engagée sur des projets de recherche connexes à cette thématique et a obtenu un financement de chercheur supplémentaire (BELSPO) pour travailler sur l'ensemble des restes humains momifiés conservés dans le musée. En 2017, Caroline Tilleux a également reçu une bourse de la Fondation Roi Baudouin pour travailler exclusivement sur les momies précolombiennes du musée (projet IRAM). À la fin de ce contrat (juillet 2018), elle entame une période de chômage jusqu'à mars 2020 au cours de laquelle elle se consacre à la rédaction d’une partie de sa thèse et participe au tournage du documentaire dédié à Rascar Capac (ARTE).

Documentaire
Documentaire © Arte

En mars 2020, via l'Institut des Sciences naturelles, Caroline Tilleux est engagée sur un projet BELSPO (HOME). Cette étude s'intéresse aux restes humains conservés dans les institutions muséales, académiques, etc. et envisage les questions de rapatriement de vestiges humains. Ce contrat a pris fin en septembre 2021, Caroline Tilleux se penche désormais sur le dépôt de sa thèse.

Leur recherche conjointe

Après plusieurs années de recherche, une équipe multidisciplinaire de scientifiques, composée notamment de Jean-Philippe Hastir, Raphael Olszewski et Caroline Tilleux, a réalisé une incroyable découverte sur une momie étudiée : celle-ci avait bénéficié de soins dentaires !

Scan d’Osirmose aux Cliniques universitaires Saint-Luc en 2015
Scan d’Osirmose aux Cliniques universitaires Saint-Luc en 2015 © KMKG-MRAH

Les chercheurs se sont focalisés sur une seule momie scannée issue des collections égyptiennes des Musées Royaux d’Art et d’Histoire : "Osirmose", un dignitaire (portier du Temple de Rê) qui a vécu pendant la XXVe dynastie, il y a 2.700 ans.

Visionnez ici la vidéo réalisée lors du scan de la momie en 2015.

Osirmose dans les salles égyptiennes du Musée Art & Histoire
Osirmose dans les salles égyptiennes du Musée Art & Histoire © KMKG-MRAH

L’équipe a réalisé de nombreux CT scan haute résolution pour l’acquisition et la restitution d’images 2D et 3D et ont également utilisé une imprimante 3D pour réaliser un modèle de la mâchoire de la momie.

A. Orientation générale possible du rappeur (R) pour atteindre la lésion ostéolytique du côté palatin de la dent n°28. B. Vue postérieure. Le rappeur (R) placé dans la lésion de forme semi-lunaire (flèche) du côté palatin de la dent n°28
A. Orientation générale possible du rappeur (R) pour atteindre la lésion ostéolytique du côté palatin de la dent n°28. B. Vue postérieure. Le rappeur (R) placé dans la lésion de forme semi-lunaire (flèche) du côté palatin de la dent n°28 © CUSL

Les analyses minutieuses des images obtenues par CT scan ont révélé plusieurs découvertes chez Osirmose : confirmation du sexe masculin, identification de certains organes dont le cœur, présence des nerfs optiques et de l’œil calcifié, informations sur les techniques de momification employées,… Mais la découverte la plus étonnante provient de l’analyse du modèle 3D de la mâchoire : le maxillaire supérieur comportait en effet des traces d’extraction d’une racine dentaire ainsi que d’une ouverture d’une lésion osseuse dentaire avant la mort de l’individu.

En d’autres termes, il s’agit de la première preuve de l’existence de soins dentaires et de procédures de chirurgie orale réalisés précédemment sur une momie égyptienne embaumée de 2.700 ans !

Modèle imprimé tridimensionnel du maxillaire supérieur. Vue supérieure de l'arcade dentaire et du palais dur. Les dents restantes ont été peintes en blanc, tandis que l'os a été peint en jaune. La flèche noire indique le canal incisif sur la ligne médiane
Modèle imprimé tridimensionnel du maxillaire supérieur. Vue supérieure de l'arcade dentaire et du palais dur. Les dents restantes ont été peintes en blanc, tandis que l'os a été peint en jaune. La flèche noire indique le canal incisif sur la ligne médiane © CUSL

Cette découverte apporte un nouvel éclairage et des perspectives de recherche sur la civilisation égyptienne dans laquelle évoluait l’individu momifié. En Egypte, à l’époque de la XXVe dynastie, il existait manifestement déjà un certain savoir anatomique et une pratique médiale possiblement répandue. La méthodologie d’analyse des momies est également novatrice et pourra s’étendre à de futures recherches.

Reconstruction CT 3D de la tête et du cou de la momie, montrant l'intérieur du crâne. Vue latérale. 1a. Remplissage du globe oculaire. 1b. Phthisis bulbi. 2. Faux œil (cartonnage). 3. Nerf optique intact. 4. Bâton enfoncé dans la dure-mère à l'intérieur d
Reconstruction CT 3D de la tête et du cou de la momie, montrant l'intérieur du crâne. Vue latérale. 1a. Remplissage du globe oculaire. 1b. Phthisis bulbi. 2. Faux œil (cartonnage). 3. Nerf optique intact. 4. Bâton enfoncé dans la dure-mère à l'intérieur d © CUSL

Les résultats complets de la recherche ont été publiés dans la revue scientifique NEMESIS, que vous pouvez consulter ici.

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