En Belgique, les femmes gagnent, en moyenne, 6% de moins que les hommes par heure de travail prestée. Une différence moins prononcée qu’à l’échelle européenne, où cet indicateur d’écart salarial entre sexes est de 14,8%. Un bon point pour la Belgique ? Pas si vite.
L’égalité horaire ne dit rien
Cet indicateur moyen, et horaire, ne dit en fait pas grand-chose. En premier lieu parce qu’il y a des différences sectorielles marquées. Les 6% d’écart salarial horaire moyen montent à presque 20% dans le secteur financier, sont de 3,3% dans l’immobilier, et de 0,7 dans les arts du spectacle. Et l’on sait la sous-représentation des femmes dans les métiers qualifiés de l’industrie, dans l’agriculture ou les professions militaires. Tout comme leur surreprésentation dans les professions intellectuelles, scientifiques et artistiques.
Revers de la médaille
Un faible écart salarial horaire "sur papier" peut même avoir son revers de la médaille, selon une étude de la Commission européenne. Des écarts de salaires entre les sexes plutôt faibles peuvent en réalité résulter d’un accès au marché du travail par les seules "femmes à fort potentiel de revenus", surtout dans les pays ou concilier carrière et vie de famille est compliqué en "raison de la médiocrité des infrastructures publiques de garde d’enfants".
Temps partiel "subi" au féminin
En Belgique, enfin, 43,5% des femmes travaillent à temps partiel contre 11% des hommes. Résultat : 80% des travailleurs à temps partiel sont des femmes. Sur base annuelle, voilà déjà de quoi nuancer l’écart horaire relativement faible. Ce qui fait dire à la FGTB qu’avec des "emplois à temps partiel non choisis, aux fonctions mal payées et peu considérées […] les femmes gagnent en moyenne 23,7% de moins que les hommes". Un chiffre qui tient compte de la répartition inégale de la durée du travail – mais qui date de 2017.
Heure, mois, année… Carrière ?
Ce qui est certain, c’est que l’écart salarial à plutôt tendance à se creuser tout au long de la carrière. Entre 25 et 34 ans, l’écart salarial n’est que de 0,5% en faveur des hommes. En fin de carrière, il s’est creusé progressivement pour atteindre 15,3% chez les 55-64 ans. Mais surtout ces différences "théoriques", même si elles s’améliorent d’année en année, ne disent rien de la participation effective des femmes au marché du travail. Or, il s’agit là d’un indicateur indispensable pour mesurer l’émancipation économique des femmes. Où est on ?
Participation au marché du travail
Le niveau de participation des hommes et des femmes reste différent (9%), même si l’écart s’est réduit de moitié au cours des 20 dernières années. Grâce à quoi ? Un niveau d’éducation des femmes en augmentation (aujourd’hui il dépasse même en moyenne celui des hommes chez les 25-54 ans : 46% des femmes ont un diplôme du supérieur contre 36% des hommes), l’expansion du secteur des services au sein duquel l’emploi féminin est important, et de meilleurs systèmes de garde d’enfants (abordables), tandis que dans le même temps le nombre moyen d’enfants par femme a baissé. Mais il reste du boulot.
Femmes, les enfants d’abord
"Les tâches liées à l’éducation des enfants restent encore dans la toute grande majorité des cas supportées par les femmes", nous disait encore le Conseil Supérieur de l’Emploi en janvier. En ajoutant que pour les femmes et "malgré des changements sociétaux" le fait d’avoir des enfants de moins de 6 ans diminue de manière marquée la probabilité de participer au marché du travail. Par contre, pour les hommes, "les effets liés à la charge de famille sont très limités". Au point que la présence d’enfants dans le ménage n’influence en rien – statistiquement – l’emploi des hommes.
Femmes faiblement qualifiées
Depuis 2010, le taux d’activité des femmes hautement et moyennement qualifiées s’est stabilisé, alors que celui des femmes faiblement qualifiées a recommencé à baisser. Il dépasse aujourd’hui à peine le niveau atteint en 1992 (tout juste au-dessus des 50%) et reste bien plus bas que dans d’autres pays comparables.
"Renforcer l’accueil collectif et formel de la petite enfance et adapter celui-ci aux horaires de travail atypiques auraient des effets significatifs sur le retour à l’emploi de certaines mères moins qualifiées", nous dit le rapport 2019 du Conseil Supérieur de l’Emploi. Pas étonnant dans ce contexte, que le FMI exhorte aussi la Belgique à être plus généreuse en congés parentaux. Pour une meilleure répartition des tâches ménagères au sein des couples, et donc plus d’égalité sur le marché de l’emploi, ce serait prendre le mal à la racine.