Politique

Du côté des ONG, la prolongation du nucléaire ne passe pas

Il y a presque 10 ans, en 2012, les opposants au nucléaire manifestaient à Bruxelles.

© Belga - Bruno Fahy

Par Jean-François Noulet

La volonté du gouvernement fédéral de prolonger de 10 ans deux réacteurs nucléaires est "une occasion manquée de réécrire notre avenir énergétique", ont réagi vendredi soir Inter-Environnement Wallonie, Greenpeace et Bond Beter Leefmilieu. Ces ONG estiment que la Belgique a "besoin de toute urgence d’un nouveau pacte énergétique national."

"Inacceptable", pour Greenpeace

Pour Greenpeace, le fait que le gouvernement "veuille rester dépendant de l’énergie nucléaire en temps de guerre et de risque nucléaire accru est inacceptable". "Même en temps de paix, les centrales nucléaires présentent un risque important avec des conséquences incalculables, surtout dans des zones densément peuplées comme la Belgique", estime l’ONG, pour qui une prolongation du nucléaire "ne réduira pas les prix élevés de l’énergie, n’améliorera pas la sécurité d’approvisionnement et ne réduira guère la consommation de gaz".

Greenpeace avertit que la route vers la prolongation de Doel 4 et Tihange 3 "est encore longue et incertaine" vu les obstacles juridiques et techniques à franchir et vu la nécessité de négocier avec Engie, l’exploitant des réacteurs.

Les mesures en faveur de la transition énergétique sont "faibles", selon IEW

De son côté, Inter-Environnement Wallonie est aussi critique. Ainsi, les autres mesures proposées par le gouvernement, qui prévoit notamment un plan d’investissement d’1,16 milliard d’euros pour accélérer la transition vers la neutralité climatique, sont qualifiées de "faibles", par Inter-Environnement Wallonie (IEW).

"Il y a une série de tabous qui doivent tomber pour véritablement entamer la transition énergétique" estime IEW. "Comment peut-on prétendre vouloir réduire notre dépendance au pétrole russe et maintenir un régime fiscal si avantageux sur les voitures de société ou les cartes carburant ?", s’interroge IEW. "Il y a un changement de paradigme qui doit se faire et qu’on ne voit pas poindre dans les propositions avancées aujourd’hui."

Besoin d’un "nouveau pacte énergétique national"

Du côté de Greenpeace, on plaide pour "un nouveau pacte énergétique national", entre les différents gouvernements du pays, "pour sortir plus forts de cette crise et s’affranchir enfin du pétrole et du gaz" et mettre "notre pays sur la voie d’un système énergétique solide, social et durable", estime encore Greenpeace, qui suggère de s’inspirer de l’Allemagne et de ses investissements massifs dans le déploiement des énergies renouvelables.

Dans l’attente d’un tel pacte, les ONG recommandent de réduire la consommation de carburants fossiles et rappellent que des propositions ont été récemment avancées par l’Agence internationale de l’énergie. Il est ainsi proposé une baisse des prix des billets des transports en commun, la fin des subventions et du mélange obligatoire de biocarburants, une réduction de la vitesse maximale sur les autoroutes à 100 km/h, une suppression des vols court-courriers au profit d’alternatives en train et un recours au télétravail quand c’est possible jusqu’à trois jours par semaine.

"Dégaze" et "Nucléaire Stop" sont aussi en colère face à la prolongation de deux réacteurs

Les mouvements citoyens Dégaze/Tegengas et Nucléaire Stop Kernenergie s’offusquent également du maintien de subventions pour au moins deux grandes centrales à gaz. "L’énergie nucléaire et le gaz fossile appartiennent aux poubelles de l’histoire", dénoncent les deux mouvements.

"Le gouvernement a choisi à la fois la peste et le choléra", attaquent Dégaze et Nucléaire Stop. "Dans la rue et devant les tribunaux, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour bannir le plus rapidement possible l’énergie nucléaire et le gaz fossile de notre société", préviennent-ils. Les deux mouvements estiment que d’autres solutions existent "mais (que) le gouvernement ne veut pas les voir".

Pour Dégaze et Nucléaire Stop, l’invasion russe de l’Ukraine démontre "qu’il est urgent d’abandonner non seulement le gaz mais aussi l’énergie nucléaire".

Leo Tubbax, de Nucléaire Stop, relève ainsi que "le commerce de l’uranium alimente également le trésor de guerre de Poutine".

"La sûreté nucléaire en temps de paix est déjà une tâche gigantesque, sans parler de celle en temps de guerre. Les combats menés dans et autour des centrales nucléaires ukrainiennes […] montrent que le risque d’une catastrophe nucléaire n’est jamais écarté", ajoute Leo Tubbax.

Les mouvements pointent enfin des obstacles juridiques à la prolongation du nucléaire et qu'"aucune solution n’a été trouvée pour les déchets nucléaires", qui augmenteront forcément avec la prolongation. "Le calendrier très serré et ces obstacles majeurs ont placé Engie dans une position très avantageuse pour obtenir un accord usuraire avec le gouvernement aux frais des contribuables. Et ce, en plus des subventions qu’ils recevaient déjà pour la construction de centrales électriques à gaz", dénoncent Dégaze et Stop Nucléaire.

Pour eux, cet argent devrait plutôt être investi dans "des solutions durables et socialement justes".

 

 

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