Cinéma

Doux Jésus, Don Camillo a 70 ans

Don Camillo reste le plus grand succès populaire de l’acteur Fernandel

© (Studio Canal)

"Le petit monde de Don Camillo" est sorti en salles le 28 mars 1952, il y a 70 ans. Petit retour en quelques confessions sur ce succès populaire mais pas réellement critique à l’époque !

Tes mains sont faites pour bénir, pas pour frapper…

Les mains sont faites pour bénir, Jésus… Mais les pieds ?

Et bam, un grand coup de bottes dans le postérieur du maire du village, venu se confesser en douce, loin des regards. La scène est mémorable et elle résume bien l’ambiance de ce village pas comme les autres, du petit monde de don Camillo… et de son maire Peppone, serait-on tenté de rajouter. Car pour une bagarre, qu’elle soit clochemerlesque ou non, il faut être deux, au minimum. Donc, sur le ring de notre comédie, vous avez en soutane noir don Camillo, une force de la nature et de l’autre, avec son foulard rouge, vous avez Peppone, une force du Parti Communiste italien. Ces deux-là, ils aiment se détester depuis qu’ils se connaissent. Et nous aussi, depuis qu’on les connaît, on aime les voir se détester… avec tendresse et férocité !

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À l’origine, Don Camillo est un héros de papier imaginé par l’écrivain italien Giovaninno Guareschi en 1948. Il est aussi humoriste, journaliste et dessinateur. Guareschi publiera 8 romans, 3 de son vivant et 5 à titre posthume. Observateur avisé d’une Italie qu’il aime par-dessus tout, dans ses histoires, l’auteur, militant anticommuniste de surcroît, s’amuse à tordre le cou aux Rouges qui prennent de plus en plus de place et de pouvoir dans son pays. Il les tourne en dérision dans ses récits. Notez encore que l’Eglise en prend également pour son grade avec son drôle de curé bagarreur et ce Jésus aux remarques cyniques. Petit extrait…

Ils ont peur de toi don Camillo ! Ils te haïssent même. Ils vivaient au chaud et tranquilles dans le cocon de leur lâcheté. Ils savaient la vérité mais personne ne pouvait les obliger à reconnaître qu’ils savaient. Toi, tu l’as fait !

Don Camillo et Peppone soit Fernandel et Gino Cervi
Don Camillo et Peppone soit Fernandel et Gino Cervi © (Studio Canal)

Dès le premier tome sorti en librairie et face à son succès, le cinéma s’intéresse au curé et quelques producteurs français et italiens s’associent pour mettre cette querelle de clocher en images. Ils engagent un réalisateur, Julien Duvivier, et l’écrivain de science-fiction, René Barjavel, pour le scénario. Ils espèrent convaincre Jean Gabin mais aussi Jacques Tati pour le rôle-titre. Quand ces deux-là refusent, l’auteur, Guareschi en personne, fera un bout d’essai. Un essai désastreux. Julien Duvivier tombe alors sur la photo de Fernandel et se dit qu’il a enfin trouvé son curé de campagne. Une excellente intuition car "Le petit monde de Don Camillo" sera le plus gros succès de Fernandel (et par conséquent celui de Gino Cervi dans le rôle de Peppone) avec ses 12 millions de spectateurs. Si le public a tout de suite adoré cet univers, les critiques de l’époque, eux, ne sont pas rentrés dans la bagarre, mettant en avant, dans leurs articles, toute la mauvaise foi (un comble pour un prêtre) du récit. Dans le quotidien catholique La Croix, on pouvait lire ces quelques lignes…

Je ne dissimulerai pas ma déception devant ce Petit monde où l’on prétend renvoyer dos à dos les antagonismes locaux, mais où l’on pratique une étrange partialité…

Dans le quotidien communiste L’Humanité, les mots sont tout aussi sévères, voire davantage…

Les bastonnades ne sont pas distribuées en quantités égales. Le curé est un bagarreur, un soupe-au-lait ; ce n’est pas grave […] En revanche, le maire et tous ses amis nous sont montrés comme de braves types embarqués dans le communisme sans trop savoir pourquoi […] Les vrais enfants de chœur ne sont pas sous les ordres du curé, ils encadrent Peppone […] Ah ! si nos communistes étaient comme ceux-là ! Peut-on rire sur un volcan ?

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Visiblement oui ! La preuve avec ses quelques suites. Au cinéma, en effet, la saga Don Camillo est composée de 6 épisodes… Sur ces 6 épisodes, 5 feront le bonheur des spectateurs en salles car le 6e, "Don Camillo et les contestataires", ne verra jamais le jour. Fernandel décédera d’un cancer généralisé pendant le tournage. Notez que ce film sera quand même réalisé mais avec un autre duo beaucoup moins charismatique ! Il y aura encore plus tard, une nouvelle version avec Terrence Hill dans le rôle du curé. Et là aussi, on peut le confesser, ça marche moins bien !

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