Belgique

Deux jeunes Iraniens réfugiés à Bruxelles risquent l’expulsion : la secrétaire d'État à l’Asile et la Migration justifie la décision prise

"Le monde entier sait ce que nous risquons si nous retournons en Iran" : des jeunes Iraniens détenus à Bruxelles risquent l’expulsion :

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Par Mathieu Van Winckel, avec A.P, J-Fr. Noulet et F. Van Eeckhaut et Belga

"Nous sommes dans un centre fermé depuis 80 jours, personne n’entend notre voix". C’est ce que deux jeunes Iraniens nous ont raconté ce dimanche. Ils ont appris qu’ils allaient être expulsés de Belgique ce lundi. Leur demande d’asile a été rejetée. Les deux hommes seraient arrivés en Belgique après avoir participé à des manifestations contre le pouvoir en place en Iran. Ils craignent aujourd’hui pour leur vie.

"Le monde entier est au courant de ce qu’il se passe en Iran depuis quelques mois. Nous étions dans les rues pour demander la liberté. Le monde entier sait ce que nous risquons si nous retournons en Iran", disent Hesam et Mohammadreza au téléphone depuis le centre fermé de Steenokkerzeel.

D’après leur récit, quand ils étaient en Iran, ils ont été menacés par la police locale en recevant des convocations pour se présenter. Nous avons pu consulter ces documents sur lesquels il est écrit : "Vous êtes convoqués pour donner des explications quant à votre présence dans les émeutes et les troubles à l’ordre public". 

Ils ont eu peur et ont fui le pays. Malgré leurs tentatives de rassembler le plus de documents possibles pour prouver que leur vie est en danger, un avis négatif a été rendu pour leur demande d’asile le 14 décembre dernier. "Le retour en Iran est égal à la mort, comme ce qui est arrivé à plein d’autres jeunes comme nous en Iran", disent-ils. Le vol de ce lundi les amènera en Turquie, qui pourrait décider de les renvoyer en Iran.

Pour Ali Amerian, juriste, c’est la responsabilité de la Belgique qui est en jeu : "Je m’adresse directement aux membres du gouvernement : on a deux Iraniens qui sont ici. On annonce des exécutions et des pendaisons de manière systémique et systématique pour le moment. Donc dès lors que ces deux gamins ont participé aux manifestations, je pense qu’on ne peut pas se permettre de les laisser repartir".

L'expulsion n'a pas eu lieu ce lundi

L'Office des étrangers a tenté lundi de procéder à l'expulsion des jeunes Iraniens déboutés de leur demande d'asile en Belgique. Ils ont été conduits à l'aéroport de Bruxelles mais ont refusé de monter dans l'avion. Ils ont été ramenés au centre Caricole où ils sont enfermés depuis qu'ils sont arrivés en Belgique.

Des personnes se sont rassemblées lundi dans le hall des départs de l'aéroport de Bruxelles pour s'opposer à ces expulsions. Elles ont exhorté les autorités belges à ne pas refouler les jeunes Iraniens vers l'Iran car, d'après elles, ils risquent la mort dans leur pays d'origine.

Ce mardi 24 janvier, l'avocat qui a repris le dossier ces Iraniens au pied levé, Guillaume Lys, rencontrera les deux jeunes gens et déposera une requête de mise en liberté.    "On leur reproche un manque de consistance de certains éléments de leur demande. Les autorités belges doivent comprendre que ces personnes sont confrontées à un double risque, non seulement en raison de leur participation à des manifestations mais aussi en raison de leur expulsion qui fera que, quoi qu'il arrive, ils seront considérés comme des opposants et soumis à des mauvais traitements", a expliqué Me Lys.  

La secrétaire d'Etat à l’Asile et la Migration défend la position de l’Office des Etrangers et du CGRA

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Du côté de l’Office des étrangers et du CGRA (qui analyse les demandes d’asile), que la RTBF avait contacté, on n’a pas donné de précisions sur ces cas. Le CGRA, par exemple, ne commente pas les décisions individuelles.

Notre rédaction s’est tournée vers Nicole de Moor (CD&V), la secrétaire d'État à l’Asile et la Migration pour avoir une réaction. "Bien sûr, la situation en Iran est inquiétante, mais ça ne veut pas dire que toute personne venant de l’Iran a besoin de protection", a répondu Nicole de Moor. "Parce que l’asile est vraiment réservé à ceux qui craignent des persécutions individuelles, ce qui n’a pas été le cas dans ces dossiers-ci, selon l’analyse indépendante de nos instances d’asile", a-t-elle ajouté.

La secrétaire d'État s’en tient aux "deux instances indépendantes", l’Office des Etrangers et le CGRA, qui se sont penchés sur les dossiers des deux ressortissants iraniens, dans "une analyse rigoureuse". "Ce n’est pas aux politiciens d’intervenir là-dedans", a-t-elle précisé.

Nicole de Moor nous a expliqué ne pas pouvoir "donner beaucoup d’informations dans un dossier individuel" et que, "peut-être tous les détails qui sont dans les médias ne sont pas corrects".

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