Entre la confiance affichée au conseil communal et les mots prononcés au conseil d’administration d’Immoval, Jean-Luc Pluymers, ancien président de ce CA, admet une communication politique contradictoire avec la situation réelle du projet, mais pense “qu’elle est due à l’optimisme combiné des deux protagonistes Pierre Grivegnée et Alain Mathot.”
Alain Mathot suit-il encore l’affaire Cristal Park ? Il se chuchote que oui. Lui affirme au contraire qu’il en a terminé avec la politique. Quoi qu’il en soit, il s’y est personnellement impliqué quand il était bourgmestre de Seraing… tout en assurant au conseil communal qu’Immoval “est une société privée” et utilisant cet argument pour refuser au conseiller PTB Damien Robert les informations demandées.
Interrogations et inquiétudes
Les politiques paraissent, à plusieurs moments, avoir eu des doutes. Au conseil communal de décembre 2015, le conseiller libéral et administrateur d’Immoval Fabian Culot l’exprime sans détour : "Je suis un administrateur inquiet par rapport à la situation financière d’Immoval […] on est dans une situation relativement floue et un peu inquiétante pour ce projet." L’écologiste Jean Thiel abonde dans le même sens : “Je me range à l’inquiétude de Fabian”.
Des doutes sont exprimés y compris à propos de la cheville ouvrière du projet. Dans une lettre de 2011, et qui commence par les mots “Cher Alain, Cher Jean-Luc”, Pierre Grivegnée se défend de soupçons qu’il croit avoir perçus à son encontre.
"Je suis désolé de voir à quel point une " discussion de bout de table " avec vous ce mercredi ait pu dégénérer de cette manière.
Les questions d’Alain avaient trait à la composition de l’actionnariat d’IMMOVAL (qui a quoi dans l’actionnariat) et je ne pense pas avoir réellement perçu qu’il s’agissait d’une demande de situation complète de trésorerie quant aux fonds engagés. […]
Je comprends que la réunion avec Meusinvest s’est soldée par un échec mais je ne comprends pas qu’elle ait pu tourner à une telle suspicion à mon égard sur un potentiel détournement ou confusion de patrimoine de près de 3 millions d’Euros, si j’ai bien compris !"
Cette lettre est-elle parvenue à Alain Mathot ? L’ex-bourgmestre de Seraing nous a répondu qu’il ne se souvenait ni du message, ni de l’événement qu’il relate, que d’autres que lui sont prénommés Alain, que la lettre ne lui était sans doute pas adressée… et il a mis fin à la conversation. Jean-Luc Pluymers, l’autre destinataire, se remémore “qu’à un moment donné, il y a eu de grandes discussions sur les montants engagés dans le cadre d’Immoval et qu’Alain Mathot avait demandé des enquêtes complémentaires sur l’argent dépensé par Immoval. Il y avait eu une enquête interne diligentée par Meusinvest si mes souvenirs sont bons. L’enquête avait démontré qu’il n’y avait pas eu le moindre centime détourné”.
Chaussures, course automobile, désordre comptable et carte de crédit résiliée
Jean-Luc Pluymers ne considère pas l’ex-patron du Cristal Park comme quelqu’un de malhonnête : “je ne le vois pas comme ça, que du contraire. Il a dépensé une bonne partie de l’argent de sa société dans ce projet.” Il assure qu’au comité exécutif, l’aspect financier “était abordé à chaque réunion et qu’il était demandé en permanence à Pierre Grivegnée des comptes à propos de chaque centime dépensé.”
Cependant, certaines de ses dépenses posent question. En juin 2010 Immoval règle une facture de 13.600 euros à Jean-Michel Lestienne, courtier en assurance français spécialiste de la course automobile, sport que pratique Pierre Grivegnée au moins jusque 2014, sur Porsche et Aston Martin. De plus, des extraits de compte liés à la carte de crédit d’Immoval montrent des achats et retraits qui semblent privés, des réservations d’hôtel, notamment à Eurodisney. Une dépense de 360 euros en 2008 est identifiée "JM Weston", ce qui peut correspondre à un achat de chaussures.