Brabant wallon

Des tags anti-avortement suscitent incompréhension et indignation à Louvain-la-Neuve

"De tels messages sont culpabilisants pour les femmes", explique le planning familial de LLN.

© USE

Par Hugues Van Peel

"IVG = crime" ou "L’IVG arrête un cœur et en brise un autre" : plusieurs slogans de ce genre ont été tagués il y a quelques jours à Louvain-la-Neuve, à proximité de la Grand-Place. Ils sont l’œuvre d’activistes qui militent pour la suppression du droit à l’avortement. Une vidéo de leurs agissements nocturnes a circulé sur les réseaux sociaux.

Rapidement repérés, ces messages ont aussitôt été effacés ou transformés en slogans pro avortement. L’UCLouvain n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet, mais les étudiants ne s’en sont pas privés. L’affaire alimente bien des conversations au sein des collectifs et organisations qui les représentent.

Le tag anti-IVG a rapidement été transformé en message pro avortement.
Le tag anti-IVG a rapidement été transformé en message pro avortement. © Hugues Van Peel – RTBF

"Ça donne juste l’énergie pour agir"

Par exemple, sur son compte Instagram, l’Union syndicale étudiante (USE), proche de la FGTB, réagit vigoureusement.

"Non aux idées d’extrême droite sur notre campus ! L’avortement est un droit fondamental ! Là où elle arrive au pouvoir, l’extrême droite s’attaque aux droits des minorités et aux droits des femmes. Des Etats-Unis à la Pologne, le droit à l’IVG est aujourd’hui mis à mal à travers le monde. Ces discours liberticides doivent être combattus avec la plus grande détermination."

"Ça donne juste l’énergie pour agir vite et ça donne l’envie de montrer qu’on s’oppose à ça", ajoute Zérane Staelens, membre de l’USE.

A Louvain-la-Neuve, s’ils ont provoqué indignation et incompréhension, ces messages anti-IVG n’ont cependant pas surpris tout le monde. Ces idées circulent et il y a eu des précédents. Récemment, des affiches annonçant une manifestation contre l’avortement à Bruxelles ont été collées à plusieurs endroits, avant d’être arrachées.

"Il y a aussi eu il y a quelques mois une affaire d’autocollants, explique encore Zérane Staelens. Il y en avait un peu partout à Louvain-la-Neuve, dans les auditoires, sur les sièges, aux toilettes, sur le campus en général. Ils étaient d’extrême droite, fachos. J’en ai même vu contre l’IVG. C’est pour ça qu’on dit qu’on n’est pas étonné."

Enjeux politiques

Louvain-la-Neuve n’est pas une bulle protégée de tels discours. Et la perspective des élections dans un an risque bien d’accentuer "la bataille des idées", comme le dit Justine Havelange, présidente de l’Assemblée générale des Etudiants de Louvain (AGL).

"Il y a toute une génération qui n’a pas encore voté, et j’en fais partie, et donc il y a clairement un électorat à récupérer, que ce soit d’un côté ou d’un autre, explique-t-elle. Et je crois que ce genre d’actions va justement commencer à se multiplier. On va devoir réagir en tant que représentants des étudiants, pour essayer de déconstruire ces mécanismes et pouvoir informer les étudiants pour qu’ils puissent voter de manière éclairée. Il va falloir faire ce travail de sensibilisation à la question politique à nos niveaux aussi."

Ce n’est sans doute pas non plus un hasard si de tels messages apparaissent maintenant, alors que le Parlement a récemment débattu d’une prolongation du délai au cours duquel on peut pratiquer une interruption volontaire de grossesse.

Des tags violents et culpabilisants

Au planning familial Aimer à LLN, qui pratique l’avortement, cette affaire de tags laisse perplexe, car la question de l’IVG se traite de façon apaisée depuis longtemps à Louvain-la-Neuve. Ce qui interpelle surtout, c’est la violence des mots.

"C’est un peu effrayant, se désole Karine Fastré, assistante sociale depuis 25 ans au planning familial. Je suis vraiment étonnée, cela fait des années qu’on n’a pas été confronté à de l’agressivité comme ça contre l’IVG. Je trouve ça dommage, ce n’est pas très tolérant. Avoir des discours comme ça, c’est très culpabilisant pour les femmes. Une femme qui prend cette décision ne le fait jamais de gaieté de cœur ou facilement."

A Louvain-la-Neuve, le planning familial Aimer à LLN pratique l’avortement et reçoit plus de 400 demandes par an.
A Louvain-la-Neuve, le planning familial Aimer à LLN pratique l’avortement et reçoit plus de 400 demandes par an. © Hugues Van Peel – RTBF

Karine Fastré se souvient de ce que lui avaient dit d’anciennes collègues il y a quelques années : qu’il faudra toujours se battre pour défendre le droit à l’avortement, que la dépénalisation partielle ne réglerait pas tout et que ce droit serait continuellement remis en question.

"A cette époque-là, je me disais que c’était rentré dans les mœurs, que c’était bon. Mais en fait, elles avaient raison."

Extrait du JT du 11/05/2023

Sur le même sujet : Extrait JT 18/04/2023

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