Belgique

Des précipitations extrêmes, de longues périodes de canicules… Les conséquences du réchauffement climatique en Belgique

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Par Lucie Dendooven

A la veille de la parution du rapport du GIEC (le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), nous nous sommes replongés dans le rapport de l’IRM (Institut Royal météorologique) paru en octobre dernier et qui faisait, déjà à l’époque, le point sur la situation du réchauffement climatique en Belgique. Et celui-ci est bien présent dans notre pays.

Si le réchauffement global de la terre est de 1,2 degré (par rapport à la période préindustrielle 1850-1900), nous pouvons inverser les chiffres en Belgique où "on observe un réchauffement de 2,1 °C", dit le rapport. Les six années les plus chaudes se sont produites après 2005. Depuis 1981, la Belgique vit un réchauffement annuel significatif de + 0,38 °C en moyenne par décennie. Ce réchauffement se manifeste, soit par des températures estivales impressionnantes (record 39,7 °C le 25/07/2019), soit par une pluviosité importante avec ses conséquences comme les inondations que nous venons de connaître.

2°degrés en plus, c’est 12% d’eau en plus

Pascal Mormal, météorologue à l’IRM (L’Institut royal météorologique), souligne que la Belgique connaît, depuis 30 ans, une hausse des précipitations estivales qui dépassent les 20 litres/m2/jour en été. C’est aussi, selon lui, une conséquence d’un climat plus chaud car plus l’air est chaud, plus il contient d’eau. 2°degrés en plus c’est 12% d’eau en plus. Nous avons donc plus de probabilités d’avoir des précipitations extrêmes dans un climat plus chaud.

Les quantités de précipitations moyennes annuelles en Belgique n’ont, pourtant, pas vraiment évolué en 30 ans. Par contre, l’intensité des précipitations a fortement évolué à la hausse.

Pour lui, il ne fait aucun doute que précipitations intenses et canicules sont les deux faces d’un même problème : "C’est la conséquence de blocages provoqués par le jet-stream. Il s’agit d’un courant d’air très rapide qui sépare les masses d’air froid du pôle Nord, des masses d’air chaud qui proviennent de l’Equateur. Ces dernières années, il a tendance à onduler de manière de plus en plus prononcée. Pourquoi ? Parce que nous assistons à un réchauffement plus marqué des pôles par rapport à l’Equateur. Ces écarts de températures moindres agissent sur la dynamique du jet-stream. Ils le font 'méandrer' et cela provoque des blocages météorologiques. Alors qu’auparavant, nous avions des changements de temps assez fréquents, aujourd’hui, nous vivons une situation de blocage de zones dépressionnaires (pluvieuses) sur notre pays alors qu’en Grèce et en Turquie ce sont des masses anticycloniques très chaudes qui s’installent durablement. Ce problème de jet-stream est-il temporaire ou va-t-il perdurer dans le temps ? Nous ne le savons pas encore."

Des forêts de haute futaie en voie de disparition

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Ce réchauffement climatique a aussi une incidence immédiate sur notre environnement, particulièrement nos forêts. Cette année, nos arbres sont bien arrosés mais depuis près de dix ans, ils souffrent des canicules et de chocs hydriques.

Alain Peeters est écologue et professeur en agronomie à l’UCLouvain. Son constat est formel : "Le hêtre qui a des racines en surface, souffre beaucoup de la sécheresse et va certainement disparaître dans les décennies à venir. Le frêne, lui, souffre de la chalarose, un champignon pathogène importé chez nous par la mondialisation. Le chêne pédonculé et le chêne sessile ont des racines profondes mais ils ne se portent pas très bien non plus. Les espèces principales de la forêt sont donc en danger."

Quant à l’épicéa, artificiellement introduit en Belgique puisqu’il provient de la Taïga sibérienne, il souffre beaucoup du réchauffement climatique. Son affaiblissement, selon cet expert, a accéléré le développement du scolyte qui décime littéralement toutes nos forêts d’épicéas. En réalité, tous les arbres provenant du Nord comme le Douglas sont malades et vont aussi disparaître. La situation est très simple pour cet écologue. Sa conclusion s’impose : "Si nous voulons garder une forêt de haute futaie en Belgique, nous devons urgemment replanter d’autres espèces d’arbres plus résistantes à la sécheresse."


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Un signal d’alarme d’autant plus fort que nous avons pris conscience, au cours du confinement, de l’importance de la forêt pour nous ressourcer et trouver notre équilibre psychologique.

Cet écologue s’inquiète également des choix d’agriculture en Belgique. Il nous explique : "La surface en pomme de terre a beaucoup augmenté ces dernières années. On veut faire de notre pays le pays de la frite et c’est une très mauvaise idée car c’est une des cultures les plus destructrices car etrès sensible à l’érosion. Il faut songer à changer nos modèles de production agricole. Il faut s’orienter vers un système agroécologique qui épargne la structure des sols et surtout résiste mieux à l’érosion."

Des espèces du sud s’installent en Belgique

Ce réchauffement climatique fait aussi des heureux, notamment parmi les observateurs de la nature. Ces dernières années, biologistes, ornithologues et entomologistes ont observé l’apparition et l’installation d’espèces d’oiseaux et d’insectes d’ordinaire présents dans le sud de l’Europe et pas en Belgique.

Dans le marais d’Harchies à Bernissart, les ornithologues observent des oiseaux qu’ils ne voyaient pas, il y a 10 ans encore, comme des aigrettes, spatules ou encore garde-bœuf. L’arrivée de certains insectes, par contre, inquiète certains entomologistes qui assistent à la remontée du moustique tigre transmetteur de la dengue ou de Zika.

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