Ces chiffres ne sont pas parfaits bien sûr. Entre bugs techniques et faux positifs, les bornes comptent parfois mal les passages. Sans oublier que chaque détection de vélo ne signifie pas qu’il s’agit d’un seul cycliste qui serait passé une seule fois en tout et pour tout à cet endroit.
En plus de ces bornes dont les premières ont été installées à partir de 2017, des comptages manuels sont aussi entrepris par l’asbl Pro vélo. Ceux-ci montrent une augmentation continue du nombre de cyclistes. "Au cours de l’année 2022, nous avons effectué 104 heures de comptage manuel. Les résultats affichent une augmentation globale de 43,7% du nombre de cyclistes observés aux heures de pointe (entre 8h et 9h du matin) par rapport à l’année 2021", pouvait-on lire sur leur site internet en février 2023.
Voilà pour le constat global. Mais la motivation des cyclistes est-elle aussi forte en plein hiver, quand il fait froid, qu’il pleut et que jour ne se lève pas avant 8h ? Ça dépend, répond Pro vélo qui écrit dans son rapport 2022 que "la météo peut intervenir comme facteur explicatif (mais, bien entendu, non exclusif)" pour justifier une hausse ou une baisse du nombre de vélo.
Et la même source d’ajouter : "Le mois de mai [2022, NDLR] a connu moins de précipitation. Le mois de novembre, quant à lui, a connu autant de précipitation qu'[en 2021], et aucun jour de neige, ni de gel. Ce sont également les deux mois où nous observons les plus fortes augmentations du nombre de cyclistes. A contrario le mois de septembre a connu nettement plus de précipitations et des températures légèrement plus basses que l’an dernier. Malgré cela, on observe une croissance des flux cyclistes."
Oui, il y a moins de cyclistes quand il pleut… Mais combien en moins ?
Quid de cette année ? Nous avons noté les températures et les précipitations à Uccle depuis la fin janvier. Ces informations heure par heure sont publiées tous les jours sur le site internet de l’IRM. Verdict : si on prend les cinq pistes cyclables les plus fréquentées (ou plus précisément les cinq bornes de comptage de vélos qui ont enregistré le plus de passages depuis le début de l’année 2023), le nombre de vélos détectés a baissé les jours de pluie. Ce phénomène se produit notamment pendant ce qu’on pourrait appeler "l’heure de pointe", soit entre 7h et 9h en semaine du lundi au vendredi. Dans le détail :
- CJM90 (Quai des Charbonnages 8 – 1080 Molenbeek-Saint-Jean) : -24% quand il pleut par rapport à un matin sans pluie ;
- CB02411 (Chaussée de Vilvorde – 1020 Bruxelles) : -33% ;
- CB1142 Rue de la Loi 130 – 1000 Bruxelles : -23% ;
- CB1143 Rue de la Loi 145 – 1000 Bruxelles : -20% ;
- CB1101 (Avenue des Arts 26 – 1000 Bruxelles) : -21%.
Ces valeurs sont similaires à celles observées en France par le journal Le Parisien sur les axes les plus fréquentés à Paris. "La baisse de fréquentation des pistes cyclables par temps de pluie serait plutôt de l’ordre de 20 à 35%, loin de la désertion massive redoutée par certains", écrivait le quotidien en janvier 2021.
Cette influence de la météo est aussi documentée dans une étude scientifique de juillet 2021 titrée "Comment la météo influence l’usage des vélos en libre-service". "Si on regarde la saisonnalité, nous avons constaté que dans les villes situées dans des climats tempérés, comme Paris et Bruxelles, la pratique du vélo atteint un pic en été et retombe en hiver", écrivent les auteurs de cette étude.
C’est même l’un des principaux arguments de ceux qui trouvent que le vélo prend trop de place à Bruxelles : finalement, à quoi bon construire des pistes cyclables si c’est pour qu’elles soient désertées dès la première pluie et le retour des grands froids ? Comme le montre le graphique ci-dessous, les pistes sont pourtant loin d’être vides la moitié de l’année. Par contre, c’est vrai, la tendance est à l’augmentation au fur et à mesure que les beaux jours arrivent.
(L’article continue sous l’infographie)