Brabant wallon

Des garages construits sans permis à Tubize: une bourde de l’administration communale met la ville dans l’embarras

L'administration communale de Tubize mise en cause dans cette épineuse affaire de garages illégaux.

© Hugues Van Peel - RTBF

Par Hugues Van Peel

Une délicate affaire resurgit ces jours-ci à Tubize. On pensait qu’elle était réglée, il n’en est rien. Des garages construits illégalement sont toujours là, alors que le permis de régularisation accordé par le collège communal au promoteur en 2014 a été annulé. Explications.

Cette affaire remonte à l’an 2000. Un promoteur bien connu dans la région, la SA Delzelle, obtient un permis pour construire un immeuble de 33 appartements au boulevard Deryck. Mais il apparaît ensuite que ce qui a été construit ne correspond pas au plan transmis à la Région wallonne. Le problème, ce sont les garages et parkings aménagés à l’arrière du bâtiment, en zone inondable. Il y en a plus que prévu.

En 2002, la Région dresse un procès-verbal pour infraction et propose la réalisation de travaux visant à mettre les biens concernés en conformité avec le permis. Mais ces travaux ne seront jamais entrepris. Le dossier s’englue alors dans un imbroglio juridico-administratif d’une rare complexité.

Une décision ministérielle mal encodée

En 2012, les élections communales amènent au pouvoir une nouvelle majorité (PS, MR et Ecolo) à Tubize. Le collège hérite du dossier et décide deux ans plus tard d’accorder au promoteur un permis de régularisation pour les garages. Mais le fonctionnaire délégué de la Région wallonne en Brabant wallon s’y oppose. D’abord suspendue, la régularisation du permis est finalement annulée par Carlo di Antonio, alors ministre wallon de l’environnement et de l’aménagement du territoire.

La décision ministérielle reste pourtant lettre morte. Elle n’est pas encodée correctement dans le logiciel urb@web utilisé par la ville pour faciliter la gestion et le suivi des dossiers d’urbanisme. Pour quelle raison? La ville de Tubize parle aujourd’hui d’une bévue de son administration. L’erreur a été constatée et corrigée sept ans plus tard, en 2021, après que deux conseillers communaux de la majorité, Jean-Pierre Fumière (PS) et Filippo Lavore (DéFI), ont interrogé le directeur général, Etienne Laurent, et le bourgmestre, Michel Januth, à propos de ce dossier.

Plus interpellant encore, dans leur réponse aux deux conseillers, le directeur général et le bourgmestre expliquent que "vu l’historique particulier du dossier et les risques pour les propriétaires, l’administration n’a pas fait avancer le dossier entre 2014 et 2021". Etrange aveu d’inaction. Peut-on en déduire que l’administration a bien eu connaissance du contenu de la décision du ministre Di Antonio mais qu’elle a décidé volontairement de ne rien en faire?

Les garages illégaux sont situés à l'arrière d'un immeuble à appartements du boulevard Deryck.
Les garages illégaux sont situés à l'arrière d'un immeuble à appartements du boulevard Deryck. © Hugues Van Peel - RTBF

La ville va contacter les propriétaires

Fort embarrassée, la ville de Tubize a décidé d’écrire aux propriétaires pour les informer de la situation et des démarches qu’elle compte entreprendre. L’administration communale a été chargée de trouver une solution, en dialogue avec les services de la fonctionnaire déléguée du Brabant wallon. Une nouvelle procédure de régularisation pourrait-elle aboutir? Si oui, moyennant quelles conditions ou sanctions? Et si la régularisation n’est pas possible, faudra-t-il raser les garages?

Une telle issue, rarissime, exposerait certainement la ville à des poursuites de la part des propriétaires qui ont acquis ces biens de bonne foi, sans savoir qu’ils étaient illégaux. L’administration communale aurait dû communiquer cette information essentielle aux notaires qui sont intervenus dans le cadre de ces ventes, mais cela n’a pas été fait. 

Le directeur général et l’administration dans le viseur

Récemment, deux membres du collège communal, Mourad Abdelali (DéFI) et Frédéric Jadin (PS), ont adressé un courrier au gouvernement wallon pour attirer son attention sur cet épineux dossier. Ils ne cautionnent pas la gestion hasardeuse de l’affaire des garages par l’administration communale de Tubize ; et par le directeur général qui dirige cette administration et en qui ils n’ont plus confiance. Ils s’interrogent aussi sur les risques encourus par les propriétaires pour des fautes qu’ils n’ont pas commises.

"Depuis des années, les informations que nous recevons sont fausses, expliquent-ils dans leur courrier. Le bourgmestre et le directeur général nous ont toujours affirmé que la situation était régularisée. L’actualité et les faits nous prouvent le contraire."

Contacté, le bourgmestre plaide la bonne foi. En 2014, le collège n’aurait pas été informé de la décision ministérielle, Michel Januth pensait donc que tout était réglé. Selon lui, c’est l’administration communale qui est responsable de cette situation. La ville assumera l'erreur et fera le nécessaire pour que les propriétaires n’aient pas à payer le moindre centime en cas d’amendes.

Au passage, le bourgmestre annonce qu’un audit sera réalisé prochainement sur le fonctionnement de l’administration communale, une nouvelle fois prise en défaut. L’an dernier, l’administration et le directeur général avaient déjà été critiqués pour la gestion du dossier cadastral de l’ancien échevin Michel Picalausa, poussé à la démission parce qu’il ne payait pas de précompte immobilier.

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