Au début des années 1980, la tension entre l’Est et l’Ouest est tangible. L’Europe occidentale est désormais à portée de tir des missiles soviétiques et décide d’assurer sa protection en acheminant des missiles américains sur son sol. Cette surenchère aux armes nucléaires plonge une partie de la population dans l’angoisse d’une guerre nucléaire. Des femmes notamment, aux États-Unis, au Royaume-Uni, se regroupent pour partager leur peur du futur et décident d’agir ensemble. A Cardiff, au Pays de Galles, elles sont au départ trente-six à entamer une marche qui les mènera 10 jours et 200 km plus tard à la base militaire de Greenham, là où 96 missiles de croisière Tomahawk doivent être entreposés sur décision de l’OTAN. A leur arrivée, devant le mépris des autorités militaires et le silence de la presse, elles décident de rester et installent un camp de fortune. Elles seront rejointes par d’autres femmes de tous les pays, de tous âges et de toute origine sociale… En février 1982, les femmes présentes décident que l’occupation de Greenham Common sera une occupation en non-mixité. Certaines vont ainsi vivre plusieurs années à Greenham, été comme hiver, dans des tentes et des caravanes. Ce mouvement rassemblera jusqu’à 30 000 personnes à l’occasion de manifestations non-violentes qui marqueront les esprits comme la chaine humaine entre Greenham.
Si le camp de Greenham Common marque l’histoire des luttes anti-nucléaires et antimilitaristes par sa longévité, elle la marque également par la constante inventivité de ses modes d’action et des modes de vie sur le terrain. A la non-mixité, à la non-violence, il faut ajouter l’importance accordée au chant, à l’humour, à l’expression des émotions et à l’usage de savoirs et savoir-faire disqualifiés parce que " féminins " : grilles du camp " décorées " par des tissages, objets fragiles et jouets d’enfants, femmes déguisées en animaux pénétrant dans le camp militaire, die-in pour bloquer les transports militaires, etc.