Les négociations sur le TTIP, le Traité Commercial Transatlantique, ont repris ce lundi à Bruxelles. L'un des principaux reproche formulé depuis le début à ce traité, c'est justement l'opacité dans laquelle il est négocié. Dans un but de transparence, les États membres et la Commission ont décidé de donner un accès à des documents classifiés.
Ce serait apparemment une première. Les mesures de sécurité pour consulter ces documents sont importantes, à la limite de la paranoïa.
Seuls les députés fédéraux y auront accès, ils n'auront que deux fois deux heures par semaine pour lire des centaines de pages non traduites en français ou en néerlandais, dans une salle sécurisée, sans assistance et sans Internet...
Des conditions trop strictes pour être vraiment transparentes, estiment certains, à l'image du député fédéral Marco Van Hees (PTB). Il s'agit pour lui tout simplement d’une farce démocratique.
"Je constate qu’il y a un refus de transparence, un refus assez grave de transparence, au départ un refus total, dit-il. Puis, finalement, il y a eu une telle mobilisation que quelques informations ont été données. Mais alors, pour avoir accès aux textes consolidés sur lesquels il y a déjà des accords entre les parties, eh bien seuls les députés ont le droit de les consulter, et encore c’est dans des conditions vraiment très strictes. Il faut aller dans une salle de lecture. On doit prendre rendez-vous. C’est seulement deux jours par semaine. On ne peut rester que deux heures."
"Les députés doivent aller seuls, sans aucun spécialiste pour les aider. Ils doivent consulter des centaines de pages dans un anglais technique. Ils n’ont pas, par exemple, d’accès Internet pour essayer de comprendre les choses qu’ils voient. Donc voilà, tout est fait pour, en fait, mettre un simulacre de transparence, mais pas une transparence réelle sur les textes. Pourquoi est-ce qu’on a peur de diffuser ces textes ? C’est une question qu’on pose."
"Si on parle vraiment d'un avenir radieux, il n'y a pas à le cacher dans un coffre-fort"
"Je constate que s’il y a transparence, mais qui est homéopathique pour moi, c’est parce qu’il y a une mobilisation citoyenne très importante, une mobilisation contre le TTIP, poursuit Marco Van Hees. Et donc il y a des concessions qui sont faites, mais ces concessions sont totalement insuffisantes. Comment peut-on sérieusement analyser des textes si on n’a pas les moyens de les analyser, les comprendre. Et en plus avec l’obligation de signer un engagement à ne rien révéler de ce qu’on a lu."
Du côté d’Ecolo, le député Benoît Hellings, s’inquiète lui aussi des mesures de sécurité autour de ces négociations : "Si on parle vraiment d’un avenir radieux, il n’y a pas à le cacher dans un coffre-fort. Et donc ça montre clairement que l’objectif d’un traité commercial comme celui-là n’est probablement pas le bien-être et l’emploi. C’est autre chose. Ce sont des objectifs commerciaux qui vont d’abord et avant tout aux multinationales et aux grandes sociétés européennes et américaines".
La députée PS Gwenaëlle Grovonius voit derrière ces méthodes un "souhait que cet accord ne puisse pas être rediscuté et renégocié". Le MR donne un autre son de cloche, son député Richard Miller déclarant que "ce ne sont encore que des négociations, le MR souhaitant que l'on arrive à un accord mais pas à n'importe quelles conditions. J'ai l'impression que l'Union européenne s'est engagée à défendre des critères, et c'est bien ce que j'ai trouvé dans tous les textes que j'ai pu consulté ce matin".
Le député PTB, Marco Van Hees, compte demander ce mercredi au ministre des Affaires Etrangères, Didier Reynders (MR), un accès élargi et démocratique aux textes des négociations.