Décès de Bernard de Launoit, CEO de la Chapelle musicale Reine Elisabeth

En près de deux décennies, il aura révolutionné en profondeur cette institution, mais plus globalement encore, c'est toute la vie musicale en Belgique qu'il aura contribué à remodeler.

Passionné et habité par le répertoire classique, et singulièrement par la musique de chambre, il n'aura eu de cesse d'ouvrir la Chapelle musicale au public, en commençant par son ouverture à de jeunes musiciens et musiciennes du monde entier, guidés par les plus grands Maîtres, eux aussi issus des quatre continents.

Soucieux de faire circuler les savoirs, les expertises, mais aussi les expériences, il avait développé, — dans le plus pur esprit des compagnons bâtisseurs de l'époque médiévale —, la notion de compagnonnage. Plutôt que de parler de professeurs et d'élèves, il aimait parler d' "Artistes en résidence", et de "Maîtres en résidence", des termes, voire des valeurs qui étaient tout sauf un artifice de communication.

Le partage, l'échange, la circulation des idées étaient au cœur de sa démarche en tant que Directeur de la Chapelle musicale, mais aussi au cœur de sa philosophie de vie.

Directeur général d'une institution culturelle non subventionnée, il ne cessait de rencontrer des mécènes privés pour les convaincre de soutenir la démarche pédagogique et humaniste de la Chapelle musicale, et ainsi la faire rayonner jusqu'à l'international. Convaincant, enthousiaste, généreux, l'homme avait toujours plusieurs longueurs d'avance sur ses interlocuteurs, tant les projets qu'il rêvait pour la Chapelle, "sa" chapelle — aurions-nous été tentés de dire — étaient nombreux, construits et variés.

Brillant orateur, négociateur, il aimait certes convaincre ses partenaires, mais toute cette énergie qu'il déployait était destinée à servir ces nombreux jeunes Artistes en résidence, qu'il appelait tous par leurs prénoms, et dont il savait tout de leur parcours artistique.

Faire dialoguer les plus jeunes et leurs aînés sur une scène, comme à la ville, tel était le credo de Bernard. Et s'il fallait pour cela convaincre un mécène à Waterloo, ou en Australie, qu'importe, il avait des arguments à foison pour monter les projets les plus ambitieux.

Créée sous l'initiative de la Reine Elisabeth, la Chapelle accueille de jeunes musiciens venus du monde entier. En 2015, est inaugurée sa nouvelle aile de Launoit, véritable bond dans le 21e siècle pour la Chapelle. Initié en 2006, le projet architectural s'ancre dans le projet de restructuration et d'excellence de la Chapelle Musicale Reine Elisabeth. 

Chaque année, les finalistes du Concours Musical International Reine Elisabeth passent une semaine à la Chapelle, coupés du monde, pour y apprendre leurs pièces imposées. La RTBF suivait le Président exécutif, Bernard de Launoit, lors d’une visite guidée des lieux en 2015.

"C'est sur la scène qu'on apprend le métier", martelait-il, il le savait, lui qui avait vu évoluer de manière spectaculaire tant d'artistes, en leur permettant de faire leurs premières armes sur scène, mais aussi au disque. Sous sa direction, et à son initiative le plus souvent, la Chapelle a en effet développé de nombreux projets discographiques, dans lesquels, une fois encore, on retrouvait côte à côte les jeunes Artistes en résidence et leurs Maîtres.

Il croyait en l'Art et la culture, comme vecteur de changement de la société, mais il croyait peut-être encore davantage en l'humain.

Pour Laurent Graulus, sa démarche, sa personne, son humanité ont su épater et faire grandir tout un chacun. Il laisse un brillant héritage, dont il aurait certainement aimé qu'on continue à le faire vivre. "Nous n'y manquerons d'aucune façon. Merci Bernard, ta vie aura été inspirante pour nous toutes et tous."

Le violoniste et chef d'orchestre Augustin Dumay réagit auprès de Musiq3 à cette triste nouvelle : 

Bernard de Launoit était la Chapelle, son œuvre magnifique doit perdurer. 
Grande admiration pour cette œuvre exceptionnelle accomplie depuis vingt ans, pour l’éducation et la diffusion de la musique au plus haut niveau international : la Belgique peut être fière et reconnaissante, comme nous le sommes tous.

Malgré notre immense tristesse et notre grand désarroi, nous continuerons, chacun à notre place, à être tes fidèles compagnons-ambassadeurs.  

Toute ma gratitude, Bernard, pour les si belles rencontres humaines et musicales, tellement symboliques de la relation entre la musique et la vie.

- Augustin Dumay

Sur Musiq3, les hommages à Bernard de Launoit se sont succédés durant toute la journée du 24 mars. Ce samedi 25 mars, Brigitte Mahaux vous proposait un Carpe Diem consacré à Bernard de Launoit.