La pratique montre que ce n’est pas une règle absolue pour autant. Une équipe de la RTBF a déjà suivi une action militante à l’intérieur du centre 127 bis, une autre a déjà suivi une action de Greenpeace à l’intérieur de la base militaire de Kleine-Brogel. "Quand on nous interdit de rentrer, ça ne veut pas dire qu’on ne rentrera pas mais on sait les impacts que ça peut avoir", explique Jean-Pierre Jacqmin. "Il peut arriver que pour les besoins de l’information, on décide de suivre des activistes dans leur action sur une propriété privée".
Pas une libre antenne pour les activistes
Après. Et puis au montage, dans la manière de présenter l’information le journaliste a une responsabilité. A cet égard, plusieurs observateurs regrettent qu’en montrant de tels actes sur ses antennes, la RTBF leur donne de la légitimité.
Au contraire, juge Sébastien Georis, il existe une série de garde-fous. "Il faut montrer ces actes pour ce qu’ils sont. Il faut dire et rappeler que c’est illégal" insiste l’auteur du sujet. Il faut rappeler ce que risquent ces personnes en infraction. Et puis, il faut donner un contrepoint". Dans ce cas, la parole a été donnée au Bourgmestre de la commune où ont eu lieu les faits, et qui les condamnait. Dans le cas de l’action antispéciste, l’éleveur de lapins a été sollicité, il a renvoyé vers sa fédération qui s’est exprimée dans le reportage. "Il ne s’agit donc pas d’offrir une libre antenne à des personnes qui se mettent dans l’illégalité. On témoigne d’un fait de société et les propos sont encadrés, contextualisés, c’est ça notre métier".
Un journaliste peut témoigner d’un fait sans le cautionner, le valider ou le juger
Sur ce point, Caroline Carpentier, avocate, précise : "Un journaliste ne doit pas s’approprier le discours des activistes qu’il filme. Mais s’il n’endosse pas leurs propos servilement, il peut parfaitement être présent, témoigner d’un fait, y compris illégal, sans pour autant le cautionner. Le journaliste est un témoin qui relate une réalité".
La caméra, miroir grossissant ?
Autre critique, filmer ces évènements les encouragerait, voire les susciterait. Ces activistes n’ont-ils pas fait cela "pour la caméra" se demande un internaute sur notre page Facebook ? Ou n’ont-ils pas été plus loin qu’ils ne l’auraient fait sans la présence de la presse ?
"Non, pense Jean-Pierre Jacqmin le directeur de l’Information de la RTBF, des statues tombent partout dans le monde depuis 15 jours et tomberont encore. La RTBF n’a pas provoqué cette action. Elle avait lieu et nous l’avons filmée. Il n’y a pas eu plus d’actions de ce genre depuis notre reportage. C’est un fait. Et c’est un fait que nous devons, me semble-t-il, rapporter et expliquer".
A noter que la RTBF n’a pas reçu autant de réactions après d’autres reportages montrant des actions illégales. La RTBF a été peu (ou pas) interpellée sur le fait de donner la parole à des personnes qui se mettent en infraction. Au-delà de la méthode, c’est donc probablement le sujet qui fait particulièrement réagir cette fois-ci.
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