Comment ne pas être saisi par l’époustouflante beauté que dégagent les images du télescope Hubble, par la force qui s’en dégage, leur pouvoir d’enchantement ? Comment – comme François Cheng que David Elbaz cite dans son préambule – ne pas s’étonner du fait que "l’univers aurait pu ne pas être beau, et pourtant il est beau" ? Cette réflexion est le point de départ de la pensée de David Elbaz qui constate que, malgré l’absence de définition scientifique et objective de la beauté, cette dernière est omniprésente en science. Certains parlent de "la beauté de certaines équations" mais surtout, on nous régale dans les médias d’images de l’univers dont se délectent aussi bien le grand public que les scientifiques, à tel point que les découvertes permises par le télescope Hubble, comme les trous noirs au centre des galaxies ou la présence d’eau sur d’autres planètes, sont parfois éclipsées au profit de ces images au statut quelque peu paradoxal. Pourquoi paradoxal ? Eh bien tout simplement parce qu’elles sont à la fois "vraies et fausses" nous explique David Elbaz. Indéniablement ces images sont belles, pourtant il s’agit d’une "beauté artificielle d’une certaine manière car elles sont prises par des artistes astronomes qui trafiquent un peu les couleurs, les filtres, choisissent des régions, des orientations, pour produire un sentiment d’élévation et donnent aux images des noms très évocateurs comme "La Montagne mystique" ou "les Piliers de la création".
David Elbaz poursuit :
Effectivement tout le monde est marqué par ces images à tel point que même nous dans nos articles, on ne résiste pas à la tentation de montrer à chaque fois une belle image Hubble pour toucher le public scientifique. Ce qui est paradoxal c’est que ces images, en même temps qu’être fausses – parce qu’elles ont été faites avec des zooms ce qui fait que si on était sur place on ne verrait pas ces couleurs mais des images beaucoup plus ternes – ces images donc, reflètent une réalité. Cette réalité c’est que le monde est organisé d’une manière extrêmement complexe, ce qui est vraiment troublant quand on pense que l’univers est né d’une explosion initiale, il y a 13,8 milliards d’années. Et donc ces images reflètent une réalité scientifique, celle qui fait que depuis 13, 8 milliards d’années, le monde s’organise. Ces images sont donc à la fois fausses car virtuelles et à la fois vraies.