Santé & Bien-être

Dans la peau d’une tatoueuse : "La machine à tatouer est une extension de moi"

Morgann, dite "Mab" de son nom d’artiste, à l’œuvre sur un client.

© Sébastien Cools

Hasard de calendrier, en ce samedi après-midi de Brussels Tattoo Convention, à plusieurs kilomètres de l’événement organisé à Tour & Taxis, nous avons rencontré une tatoueuse parmi les sept résidents actuels du shop dédié au tatouage et au graffiti "Demain J’arrête", nom choisi pour l’addiction associée à ces deux pratiques en vases communicants. Morgann, dite "MAB matière noire", était la première tatoueuse invitée du studio, ouvert il y a tout juste cinq ans à Forest, et n’est jamais vraiment repartie, rigole-t-elle. Ce jour-là, au sous-sol du shop, sur fond musical indie et cosy, l’artiste accueille chaleureusement un client ravi, de retour pour un deuxième tatouage sous sa machine, et un journaliste curieux mais non-converti.

"Le tatouage est une pratique artisanale : c’est vraiment en faisant qu’on apprend. On peut apprendre la théorie autant qu’on veut, c’est vraiment sur des années de pratique qu’on va développer un savoir-faire. Travailler en groupe, ça nous permet d’échanger, de poser des questions, d’apprendre plus vite, de se refiler des tuyaux, de demander des conseils parfois, autour du dessin ou du tatouage pur. L’avantage de travailler en groupe, c’est d’avancer plus vite. Ensemble, on va plus loin, et un peu plus vite. Seul, c’est plus long", nous a vanté Morgann au sujet du groupe de collègues.

Le salon vient de fêter ses cinq ans.
Le salon vient de fêter ses cinq ans. © Sébastien Cools

Le tatoueur, cet outil, le tatouage, cette armure

D’origine française et plus particulièrement bretonne, Morgann a tiré le blase de "Mab" comme nom d’artiste de la mythologie celtique, pour l’accoucheuse des fées, lui associant "matière noire", "parce que 'Mab tout seul' n’était plus disponible", éclate-t-elle de rire. Son leitmotiv "radical tenderness" résume quant à lui sa vision du tatouage : "Je vois le tatouage comme une façon d’aider les gens à s’aimer un peu plus encore. C’est eux qui font la démarche de venir me voir, donc ils sont demandeurs, et moi, je suis là pour répondre à ça. Je vois le tatouage un peu comme une 'armure de peau'. Je travaille vraiment dans cette optique-là, avec eux, pour s’approprier encore plus leur corps. Je suis un outil à disposition, dans une gamme encore plus large que le tatouage", expose l’artiste. "Les dimensions psychologique et magique sont là depuis toujours dans le tatouage", prolonge-t-elle. "Le tatouage a toujours été là pour réparer, pour soigner, ou pour prévenir aussi, comme des grigris. Donc oui, le tatouage a aussi une vocation thérapeutique, même si aujourd’hui, c’est un peu évacué par le côté esthétique et ornemental vraiment pur. Même si les clients ne savent pas qu’ils viennent chercher ça, ils viennent toujours chercher une forme de réparation, une forme de soins", constate la tatoueuse.

Mab se voit comme un outil à disposition, dans une gamme plus large que le tatouage.
Mab se voit comme un outil à disposition, dans une gamme plus large que le tatouage. © Sébastien Cools

Un master des beaux-arts et 25 ans de dessin

De sa propre analyse, le style de Mab a beaucoup évolué avec les années, et surtout avec ses compétences techniques, enrichies grâce à la pratique. Dotée d’un master des beaux-arts, Morgann dessine depuis environ 25 ans. Elle se dit très influencée par l’art moderne, contemporain. Matisse et Calder reviennent notamment dans son travail. "Il y a aussi une grosse partie qui vient plutôt de l’art asiatique", ajoute celle qui a vécu en Asie pendant les cinq premières années de sa vie. "J’ai toujours grandi autour d’objets, de sculptures, de céramiques que mes parents avaient ramenés de Singapour, où on habitait. Il y a aussi les estampes japonaises, les dessins à l’encre très minimalistes, très gestuels. Mon travail est un mix de tout ça", synthétise l’artiste, qui adore aussi faire des animaux et des femmes.

Dotée d’un master des beaux-arts, Morgann dessine depuis 25 ans.
Dotée d’un master des beaux-arts, Morgann dessine depuis 25 ans. © Sébastien Cools

Une symbolique parfois inconsciente

"Chaque animal porte des symboliques assez fortes. Parfois, les gens ne se rendent pas compte. Ils viennent et disent 'Je veux un tigre', mais ce qu’ils cherchent dans le motif, ce n’est pas forcément que l’image du tigre, c’est toute la symbolique que cet animal amène avec lui, en réalité", affirme Morgann, au moment même où son client Hans entre dans la pièce, quelques minutes avant qu’il lui montre son torse et la cicatrisation de son tigre inspiré de Walton Ford, peintre naturaliste et surréaliste pour lequel les deux se sont découvert une adoration commune. Pas convaincu par un vrai sens recherché dans son cas, le jeune homme finira par concéder une certaine symbolique de l’ordre de l’inconscient.

Mab examinant la cicatrisation du précédent tatouage, un tigre inspiré de Walton Ford.
Mab examinant la cicatrisation du précédent tatouage, un tigre inspiré de Walton Ford. © Sébastien Cools

Les règles et les couleurs ne se discutent pas

Si l’utilisation récurrente des couleurs primaires est liée à son amour pour l’art moderne et l’esthétique du Bauhaus, Mab admet quand même un impact de la nouvelle réglementation européenne concernant les pigments sur le travail des tatoueurs. "On a dû réapprendre à utiliser de nouvelles couleurs, puisque les nouveaux pigments ont des formules chimiques différentes, donc ça s’applique un peu différemment à la peau. Il a fallu s’adapter, mais c’est le jeu. De nouvelles réglementations vont encore passer. Ils vont interdire de nouvelles couleurs, donc je suppose que de nouveaux produits vont encore arriver quelques mois plus tard sur le marché", anticipe la tatoueuse.

Discussion sur le nouveau motif, cette fois un oiseau du même peintre.
Discussion sur le nouveau motif, cette fois un oiseau du même peintre. © Sébastien Cools

Les dangers de l’appropriation culturelle

"J’ai toujours été intéressée par le tatouage. Déjà aux beaux-arts, je regardais tous les classiques du tatouage, notamment les classiques japonais, l’art traditionnel japonais du tatouage, le tebori, puis le tatouage traditionnel américain, Sailor Jerry, le tatouage de marin, etc. J’ai toujours trouvé ça magnifique, mais à l’époque, je n’arrivais pas à trouver de lien entre ma culture européenne et une pratique du tatouage", nous situe Mab, interrogée sur ses débuts. "C’est quand, il y a un peu moins de vingt ans à peu près, j’ai vu les tatoueurs en Russie ou en Europe qui commençaient à citer l’art médiéval, la gravure, je me suis dit 'Tiens, il y a une espèce de renouveau iconographique dans le tatouage', où ça me semblait être plus proche de ma sensibilité et de ma culture. Moi, aujourd’hui, faire du traditionnel japonais, je trouverais ça absurde, parce que c’est de l’appropriation culturelle, je n’ai pas tous les codes. Je trouve ça sublime, mais si j’en faisais, je le viderais de son sens. C’est vraiment il y a une quinzaine d’années, quand j’ai vu des tatoueurs en Europe citer toute une iconographie européenne, je me suis dit 'Ah, oui ! Là, il y a un truc intéressant qui est en train de se passer'. J’ai commencé à m’y intéresser, puis j’ai commencé vraiment à tatouer il y a dix ans, maintenant", retrace-t-elle.

L’étape importante du placement peut prendre du temps.
L’étape importante du placement peut prendre du temps. © Sébastien Cools

Du simple loisir au vrai métier

"C’est venu au fur et à mesure. Au début, je ne pensais pas du tout en faire un métier. Je pensais en faire un loisir. Puis, au fil des années, ça s’est un peu mis en place tout seul", explique la tatoueuse qui avait de plus en plus de clients, après avoir commencé sur un cercle d’amis. "Tout d’un coup, j’ai eu mes premiers clients sur Instagram, puisque je commençais déjà à montrer mon travail, quand même. Des gens ont commencé à m’écrire en me demandant 'Est-ce qu’on peut se voir pour faire un tatouage ?', je trouvais ça fou, au début. Parce que je tatouais mes potes ou les potes des potes complètement gratuitement. Je n’avais aucune ambition de faire ça de ma vie", confesse l’artiste. "Au bout d’un moment, j’ai commencé à me dire que je pouvais commencer à l’envisager comme un métier. Et puis surtout, ça me plaisait énormément. C’est un rapport à l’autre, au corps de l’autre, à son propre corps, qui est hyper intéressant, hyper riche. C’est un moment d’intimité avec quelqu’un qu’on ne connaît pas qui est assez précieux et qui est assez incroyable. J’apprends beaucoup de moi et des autres en tatouant, en réalité", intègre Morgann.

Le tatouage est aussi un moment d’intimité partagée.
Le tatouage est aussi un moment d’intimité partagée. © Sébastien Cools

Comment se former ?

Comment devenir tatoueur ? Le seul diplôme demandé est relatif à l’hygiène. Les contrôles, réguliers, concernent les normes d’hygiène, le matériel ainsi que les encres, et sont assortis d’avertissements ou d’amendes. Concrètement, comment apprendre le métier ? "Il y a plein de façons différentes de se former", selon Mab, qui aimerait former quelqu’un dans les années à venir, quand elle se sentira suffisamment à l’aise pour articuler et transmettre son savoir. "La formation traditionnelle, c’est d’avoir un maître d’apprentissage, donc arriver dans un studio avec déjà un book, un portfolio de dessins assez important et un style qui est déjà un peu marqué, ensuite on demande si c’est possible de se faire former. Moi, j’ai essayé de faire ça, mais ça n’a pas du tout marché", s’amuse la professionnelle, se rendant compte que ce qu’elle proposait à l’époque n’était pas dans l’air du temps. "Les gens m’ont reçu de façon très bienveillante, me donnaient des conseils, mais aucun ne me disait 'Viens, je te prends comme apprentie'. Donc vraiment, je me suis formée sur mes copains, sur mes amis, qui ont bien voulu -gentiment- me laisser faire des brouillons sur eux", se souvient Morgann.

Des contrôles réguliers se penchent sur les normes d’hygiène, le matériel et les encres.
Des contrôles réguliers se penchent sur les normes d’hygiène, le matériel et les encres. © Sébastien Cools

Une majorité d’autodidactes

Son parcours sans maître est une trajectoire classique dans le milieu : "Peu de gens arrivent à avoir des apprentissages. Je pense qu’aujourd’hui, la plupart des personnes qui ont entre 20 et 30 ans et qui tatouent, elles se sont formées elles-mêmes. Parce qu’il y a beaucoup de jeunes tatoueurs qui, comme moi, ont moins de dix ans de pratique, donc on n’est pas tellement qualifiés pour former d’autres personnes, pas encore. Et puis, parce que les places d’apprentis dans un studio sont très rares", prévient-elle, insistant sur la majorité d’autodidactes dans ses connaissances. "Même avec un maître d’apprentissage, c’est vraiment dans la pratique qu’on arrive à apprendre. C’est un artisanat. Il faut que les gestes s’impriment dans son corps. Maintenant, je prends une machine à tatouer, je ne réfléchis plus, c’est une extension de moi. C’est imprimé. J’ai toute la mémoire du corps qui se met en route, puis je laisse faire", révèle la tatoueuse. Aux potentiels tatoueurs en devenir, elle conseille de beaucoup dessiner et d’avoir un univers singulier, de prendre soin des gens qu’ils tatouent et d’être reconnaissants des rencontres, mais aussi de s’armer de patience et de persévérance, car ce n’est pas une carrière dont la réussite s’envisage à court terme.

Pour Mab, la machine à tatouer est une extension d’elle, laissant faire la mémoire du corps.
Pour Mab, la machine à tatouer est une extension d’elle, laissant faire la mémoire du corps. © Sébastien Cools

L’angoisse de la première fois, l’intensité des suivantes

Pour Mab, le premier tatouage tracé (deux mains serrées, un motif provenant d’une gravure moyenâgeuse), c’était l’angoisse, même si le moment lui-même était incroyable. "Le tatouage était absolument nul, raté. Il n’y a pas de 'génie' du tatouage. Ça n’existe pas, quelqu’un qui prend une machine à tatouer et qui fait un super beau tattoo, dès la première fois", d’après elle. "Dans mon cas, il y avait pas mal de stress. Le geste est fou : marquer quelqu’un pour toujours, c’est quand même dingue. Il y avait à la fois de l’excitation, de la peur, de l’anticipation. C’est un moment intense. Même maintenant, c’est intense, encore", compare l’artiste, même en étant beaucoup plus sûre d’elle. "C’est arrivé un peu par hasard, avec un ami qui fabriquait des machines à tatouer à l’époque. Il m’a dit : 'Essaie la machine sur moi'. J’ai fait 'oui'. J’ai eu une espèce de déclic dans ma tête. J’étais déjà tatouée moi-même. J’aimais déjà beaucoup le tatouage. Je me suis dit : 'Ah, oui, ok ! Ça, c’est un truc qui me plaît beaucoup'. Et c’est là où j’ai commencé à me dire que j’allais essayer de tatouer mes potes. Pour le fun, au départ", avoue Morgann.

Tatouer, marquer quelqu’un pour toujours, un moment intense.
Tatouer, marquer quelqu’un pour toujours, un moment intense. © Sébastien Cools

Un métier cool en apparence, mais exigeant en réalité

Avant d’être tatoueuse, la quadragénaire a eu plusieurs autres métiers : elle a été dans l’art contemporain, travaillant un moment dans une galerie, puis dans la sommellerie, dans le vin naturel. "Je suis toujours passionnée par le vin, mais les deux métiers ne sont pas très compatibles, que ce soit en termes d’horaires, de style de vie, ça ne peut pas fonctionner ensemble", glisse Morgann. "Le métier de tatoueur est assez exigeant. Ça demande une certaine hygiène de vie, malgré ce que les gens peuvent imaginer de l’extérieur, que c’est cool comme métier", souligne l’artiste. "C’est bien de se mettre de vrais horaires, sinon on travaille tout le temps. Ça sollicite quand même beaucoup le mental, le physique, tout ça. Personnellement, je me fais des journées de 8 à 19 heures : entre le dessin, le tatouage, les mails, la compta, … On est indépendants, donc on fait tout", clarifie la travailleuse, qui ne se voit plus faire autre chose. À ses yeux, être en constante formation, participer à l’histoire des gens et bénéficier de leur expérience de vie sont quelques-uns des aspects les plus plaisants du tatouage.

Tatoueur est un métier plus exigeant qu’on ne le pense, sollicitant le physique et le mental.
Tatoueur est un métier plus exigeant qu’on ne le pense, sollicitant le physique et le mental. © Sébastien Cools

Le résultat d’une collaboration

Après le coup de frein du Covid, Mab a repris les "guests", tatouant entre autres à Londres, à Paris ou en Suisse. À Forest, chez "Demain J’arrête", c’est la première fois qu’elle est résidente à temps plein. Vu sa clientèle aussi flamande voire internationale, Morgann travaille en anglais environ la moitié du temps. Soit les clients choisissent parmi ses propres dessins, soit ils viennent avec une idée ou un motif correspondant à son univers et ses compétences. "C’est toujours de la collaboration. Que ce soit mes dessins, les leurs, leurs idées, je collabore avec le corps de la personne, la collection de tatouages, ce qu’il y a autour du tatouage qu’on va faire. Je fais aussi des choix techniques, en fonction de la collection qui existe déjà. Je collabore avec le placement, la peau, … C’est toujours très collaboratif", précise l’artiste, qui met aussi en avant le caractère unique de chaque tatouage. "Le dessin appartient au client. Je peux faire des variations autour d’un même sujet, mais je ne reproduirai jamais un tatouage que j’ai déjà fait", jure la tatoueuse.

Un tatouage est toujours le résultat d’une collaboration.
Un tatouage est toujours le résultat d’une collaboration. © Sébastien Cools

Les bienfaits du bouche-à-oreille et des réseaux sociaux

Mab compte notamment sur le bouche-à-oreille pour se faire connaître auprès de nouveaux clients. "J’ai pas mal de gens qui ont vu mon travail sur un ami, une amie, qui me contactent. Personnellement, c’est ce que je préfère : ça veut dire qu’ils ont vu mon tatouage en vrai et que ça leur a plu", estime-t-elle, rappelant aussi l’impact des réseaux sociaux, que ce soit les siens ou ceux du shop où elle officie. Souvent, l’œuvre elle-même part soit d’une discussion par e-mail soit d’une rencontre sur place. Son client du jour, elle l’a d’ailleurs rencontré via Instagram et son site internet.

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Atomes crochus

Dans le cas de son client Hans appréciant Walton Ford, Mab a tout de suite répondu positivement : "J’adore le peintre. Je trouvais ça hyper drôle qu’on me propose ça, car c’est un travail que j’aime énormément, donc j’ai tout de suite dit oui, parce que ça me parle". Plus généralement, l’artiste se dit "extrêmement chanceuse" quant aux demandes qui lui sont faites. "Je pense que mes clients viennent me voir pour mon univers. Ça ne m’est jamais arrivé de vraiment refuser un motif", assure-t-elle, déclarant qu’auquel cas, elle réorienterait la personne vers un autre tatoueur à l’univers plus adapté. Tatouée elle aussi, Morgann choisissait également ses tatoueurs pour leur univers, mais elle le fait maintenant par affection. "J’ai envie de porter des tatouages de gens que j’aime bien. Pour qu’ils soient toujours avec moi", dévoile-t-elle. Après un premier tatouage, une certaine fidélité peut se créer. "C’est ça qui est génial aussi, c’est que des fois, sur plusieurs années, on se revoit. Il y a des clients qui viennent tous les ans. Tous les ans : petit 'upgrade'. C’est génial de les suivre dans leur vie, de suivre leur changement professionnel et personnel, de grandir avec eux. Je me sens hyper chanceuse d’avoir ces rapports-là", confie la tatoueuse.

Après un premier tatouage, une certaine fidélité peut se créer, comme ici avec ce client qui revient.
Après un premier tatouage, une certaine fidélité peut se créer, comme ici avec ce client qui revient. © Sébastien Cools

Vers un retour à la peinture

Morgann met actuellement toute son énergie dans le tatouage, qui lui prend tout son temps. Si elle-même n’a aucun lien avec le graffiti, l’artiste aimerait par contre se remettre à la peinture, sans doute dans un univers assez proche de ses tatouages. "Quand je regarde ce que je faisais déjà aux beaux-arts, mes dessins d’il y a vingt ans sont assez similaires à ce que je fais aujourd’hui. Je ne pense pas que je ferais un truc complètement différent si je devais me remettre à la peinture demain. Je pense que ce serait assez lié", commente-t-elle.

Contrairement à d’autres artistes du shop, Morgann n’a aucun lien avec le graffiti, mais bien avec la peinture.
Contrairement à d’autres artistes du shop, Morgann n’a aucun lien avec le graffiti, mais bien avec la peinture. © Sébastien Cools

La nouvelle avant-garde

En comparaison avec le passé, où il était plus marginal, le tatouage connaît aujourd’hui un "âge d’or" dans notre société. "Autant dans l’art il n’y a plus d’avant-garde depuis cinquante ans, autant le tatouage est un médium qui est aujourd’hui hyper intéressant, justement parce qu’il y a énormément de transformations, notamment dans l’iconographie", observe Mab. "Dans le tatouage, il y a tellement de styles différents, tellement de niches différentes aussi. Là, il y a de l’avant-garde. Il y a une émulation qui est passionnante à vivre, à regarder. Tous les jours, j’ouvre Instagram et je suis ébahie de la diversité des travaux, des styles, des approches humaines aussi. Je trouve ça fantastique", s’enthousiasme la tatoueuse.

Dans le tatouage aujourd’hui, il y a une émulation passionnante à regarder.
Dans le tatouage aujourd’hui, il y a une émulation passionnante à regarder. © Sébastien Cools

Un art populaire et communautaire

Selon elle, le boom du tatouage a été possible grâce aux "héros modernes", tels que les sportifs, qui ont rendu le tatouage "moins underground", mais aussi grâce aux nouveautés technologiques des machines à tatouer, dont l’accès est en outre devenu beaucoup plus simple, comme celui au savoir de base pour commencer à tatouer. "Je trouve que le tatouage est un art populaire, je suis heureuse de voir autant de gens tatoués", tranche Morgann, contrairement peut-être aux plus anciennes générations de tatoueurs, qui en un sens ont moins de travail. "Je ne dis pas ça parce que ça m’arrange pour mon petit business. Il y a une explosion des styles aussi et, du coup, aujourd’hui, les gens peuvent se faire tatouer des choses tellement particulières, qui correspondent exactement à leur personnalité, à leur communauté aussi. Parce qu’il y a un aspect de plus en plus communautaire, finalement, dans le tatouage. Si tu es une personne trans de couleur, tu peux très bien trouver un tatoueur qui te ressemble. Tu vas être reçu par quelqu’un qui comprend tes besoins, qui comprend ton parcours, qui va te respecter, … Tu ne vas pas aller voir le 'biker' du coin qui va te rire au nez, qui va refuser de te tatouer", cite par exemple la tatoueuse.

Aujourd’hui, il est possible de se faire tatouer des choses très particulières, qui correspondent exactement à chacun.
Aujourd’hui, il est possible de se faire tatouer des choses très particulières, qui correspondent exactement à chacun. © Sébastien Cools

Un métier du "care", un secteur de femmes ?

D’après Mab, qui tatoue justement beaucoup de femmes sur d’autres femmes, il y aurait aujourd’hui dans le métier plus de tatoueuses que de tatoueurs. "Il me semble que le tatouage, c’est un métier du 'care'. Donc je pense qu’il y a plus de tatoueuses, maintenant. Et il y a plus de femmes que d’hommes qui viennent se faire tatouer, aussi", referme-t-elle.

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