Un procès historique a commencé cette semaine à Copenhague. Une ex-ministre, Inger Støjberg, fait face à une procédure de destitution, un événement rare au Danemark : cela ne s’était plus produit depuis 25 ans.
Les audiences dureront 36 jours, avec 26 juges. Il s’agit d’une cour spécifiquement prévue pour juger des membres ou d’anciens membres de gouvernements.
Et c’est une pointure de la politique danoise qui a pris place sur le banc des accusés cette semaine. Inger Støjberg, visage du parti libéral danois (Venstre), plusieurs fois ministre. Lors de son dernier mandat ministériel de 2015 à 2019, elle détenait le portefeuille de l’immigration et l’intégration dans un gouvernement de centre droit soutenu par les nationalistes du Parti populaire danois. Elle était en charge de l’immigration et de l’intégration.
Elle avait alors adopté de nombreuses restrictions du droit des étrangers. Et c’est l’une de ces mesures qui l’amène aujourd’hui face à la justice.
Séparer les couples quand un conjoint est mineur d’âge
Inger Støjberg a décidé en 2016 de faire séparer systématiquement, à leur arrivée, les couples de migrants dont l’un des conjoints était mineur d’âge.
23 couples, surtout des Irakiens ou des Syriens fuyant la guerre, ont ainsi été physiquement séparés en 2016, l’homme et la femme étant dirigés vers des centres différents pour demandeurs d’asile, sans que leur dossier ne soit examiné. La présence d’enfants n’était pas prise en compte ni la différence d’âge des conjoints, faible dans la majorité des cas.
Inger Støjberg défend son initiative en expliquant que maintenir ces couples ensemble signifierait que le Danemark tolère plutôt que combat le mariage d’enfants sur son territoire.
"Imaginez que vous arriviez dans un pays comme le Danemark, un pays de parité, en tant que jeune fille victime d’un mariage forcé, et que vous découvriez qu’au lieu de vous donner la possibilité de rompre votre mariage forcé, l’État vous y force en vous logeant ensemble dans un centre d’asile", avait-elle plaidé face au Parlement danois.
Le Parlement qui avait néanmoins voté en faveur de cette procédure de destitution : 139 des 179 députés avaient voté pour qu’elle comparaisse. Le caractère systématique de ces séparations, sans examen de la situation particulière des familles avait choqué, y compris au sein de sa propre famille politique libérale.
La cour va devoir estimer si l’ex-ministre a ainsi enfreint la loi danoise et la Convention européenne des droits de l’homme.