36, quai des orfèvres

Crime : le vol du Grand Condé, un diamant rose de plusieurs millions (épisode 4)

Un crime, une histoire : 36, Quai des Orfèvres

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Par Christian Rousseau via

Au cœur de Paris, sur l’île de la Cité, se trouve l’une des plus célèbres adresses de l’histoire de la police. Elle a vu défiler les plus grands criminels, elle a vu travailler les plus grands enquêteurs : le "36, Quai des Orfèvres". À Paris et au-delà, dans la France entière, Jean-Louis Lahaye vous fait revivre les plus grandes affaires criminelles des 19e et 20e siècles, dans leur époque.

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Episode 4 : le vol du diamant rose (1926)

Chaque année depuis 1836, au cœur de l’illustre domaine de Chantilly, se tient une course hippique de grand prestige : le Prix du Jockey Club. C’est un rendez-vous immanquable des amateurs de courses, des "turfistes", qui viennent y encourager les meilleurs jockeys et admirer les meilleures montures. Mais voilà… Cette année, en ce mois de juin 1926, on dirait bien qu’un grain de sable est venu enrayer l’organisation, si bien huilée, de ce divertissement traditionnel, à la fois mondain et populaire… En d’autres termes : on va peut-être devoir annuler le Prix du Jockey Club, malgré les pressions exercées par son Président.

Il faut dire que le domaine de Chantilly n’est pas seulement connu pour son hippodrome et ses courses. Sur le domaine, à l’emplacement d’une ancienne forteresse médiévale, se dresse le château des princes de Condé. L’édifice abrite un musée, qui abrite d’importantes collections d’art : peintures, livres rares, bijoux et pierres précieuses de… très grande valeur.

Le jeudi qui précède la course, un vol a eu lieu dans la Tour ronde. On y a dérobé des dizaines d’objets précieux. Mais surtout une des pièces majeures de la collection, une pièce de joaillerie de grande valeur, un diamant rose, connu sous le nom de "Grand-Condé". Le maître des lieux de l’époque l’avait reçu du roi de France au… XVIIe siècle… A quelle occasion ? En 1643, après la bataille de Rocroi. Louis XIV l’a offert au prince de Condé, pour le remercier d’avoir mené les armées royales à la victoire. Ce prince qui se fera appeler par la suite… "le Grand-Condé". Et donne son nom au diamant rose.

© Jeffrey Hamilton – Getty Images

Il s’agit d’une pièce de joaillerie qui a donc une valeur historique mais pas seulement, puisqu’on l’évalue à 5 à 6 millions de francs de l’époque. Ce qui représenterait aujourd’hui plus de 3 millions d’euros… C’est donc un vol d’une grande importance qui a lieu à Chantilly, ce mois de juin 1926. Et qui explique l’importance des moyens policiers mis en œuvre. Jérôme de Brouwer, historien du droit et de la justice à l’ULB, nous donne des précisions :

On retrouve, dans ce dossier peu ordinaire, les brigades mobiles… Ces fameuses "Brigades du Tigre", organisées à l’initiative de Clémenceau, alors ministre de l’Intérieur, ces "Brigades du Tigre" dont certains se souviennent encore, à travers la série télévisée qui mettait en scène le commissaire Valentin et les inspecteurs Pujol et Terrasson. Mais on est loin ici de l’image qu’on en a, celle de l’ambiance "1900" avec ses premières automobiles… Au cours des années 20 et plus encore à partir des années 30, les brigades mobiles sont mieux équipées et elles peuvent s’appuyer sur de nouvelles techniques d’investigation, dans un contexte de développement de la police scientifique.

On envoie à Chantilly les inspecteurs Février et Lespinasse, de la Première brigade mobile, établie à Versailles. La Première Brigade mobile a en effet quitté Paris en 1919, pour s’installer à Versailles, suivant la volonté du ministre de l’époque de "déparisianiser" la police judiciaire.

Une fois sur place, ceux qu’on appelle alors les "mobilards" procèdent aux premiers devoirs d’enquête. Ils s’appuient sur le développement de techniques nouvelles, comme la dactyloscopie. Jérôme de Brouwer nous éclaire sur ce que la dactyloscopie apporte à l’enquête criminelle :

Il faut d’abord comprendre que la dactyloscopie n’a pas pour objectif, dans un premier temps, quand elle apparaît, vers 1900, la détection des criminels et l’imputation d’un fait criminel à un individu sur la base de son ou de ses empreintes digitales. Cela s’impose progressivement, dans un second temps. Elle a d’abord pour objectif de pouvoir identifier des individus qui voudraient dissimuler leur passé criminel. Enfin, il faut bien comprendre que lorsqu’un individu est fiché, c’est-à-dire lorsqu’il est repris, avec mesures et empreintes digitales, dans les fichiers de l’Identité judiciaire, la recherche de la "correspondance" entre l’empreinte trouvée sur une scène de crime et la fiche qui pourrait lui correspondre forme une démarche particulièrement longue et fastidieuse à l’époque. Fastidieux mais parfois couronné de succès, comme dans cette enquête.

Une enquête qui va progresser jusqu’à Strasbourg. Et pousser les inspecteurs Février et Lespinasse à collaborer avec leurs collègues des autres brigades mobiles. Une collaboration qui démontre l’efficacité d’une police judiciaire à la fois unifiée et répartie sur le territoire, comme l’avait voulu Clémenceau.


Un crime, une histoire : 36, Quai des Orfèvres, c’est 10 épisodes en diffusion hebdomadaire, le dimanche de 18h00 à 19h00 dès le 4 juillet et en diffusion quotidienne du 16 au 27 août de 12h00 à 13h00.

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