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Cour d’appel de Mons : deux femmes dans l’enfer du proxénétisme

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© Pixnio

Par Cédric Ketelair

Violetta et sa fille sont arrivées en Belgique en 2010. Les deux Péruviennes espéraient y trouver un emploi et mener une vie heureuse. Huit ans plus tard, elles se sont retrouvées en prison et condamnées, en octobre 2021, à une peine de deux ans de prison, assortie d’un sursis.

Les faits très graves : exploitation à la débauche, prostitution d’autrui, trafic d’êtres humains, avec plusieurs circonstances aggravantes, dans le cadre d’une association criminelle.

Sept GSM

L’affaire a éclaté en 2018 avec un banal contrôle routier. Une jeune femme est arrêtée en possession de cannabis. Elle détient sept téléphones portables. Six d’entre eux contiennent deux cartes SIM.

Interrogée par les policiers, elle passe à table. Elle raconte qu’elle est standardiste. Chaque numéro est celui d’une fille de joie, qui propose ses charmes sur un site internet.

Son travail consiste à répondre aux clients, à prendre les rendez-vous et d’avertir, par Whatsapp, la fille de l’arrivée du client à un endroit bien précis. En l’occurrence, il s’agit ici de deux immeubles transformés en lupanar. L’un se trouve à Lodelinsart et l’autre à La Louvière. Des chambres sont louées la journée, ce qui garantit aux propriétaires de juteux bénéfices.

Une maquerelle brésilienne

La jeune femme travaille pour le réseau d’une maquerelle brésilienne. Quand celle-ci part en vacances, elle charge Violetta et sa fille de récolter l’argent. Les deux femmes de ménage sont devenues ses dames de confiance. La standardiste touche cinq euros par passe, le reste est partagé entre la prostituée et la maquerelle.

Me Frédéric Ureel, pour l’ASBL Myria, raconte l’enfer vécu par ces jeunes sud-américaines, recrutées sur les réseaux sociaux. " Ce sont généralement des étudiantes, des filles bien éduquées, diplômées qui préfèrent venir travailler comme femme de ménage en Belgique que d’être vétérinaire au Brésil. On les fait venir en Belgique, on leur fait visiter le pays, on leur fait miroiter un travail et, très vite, elles sont amenées dans un réseau de prostitution avec des cadences de travail infernales. On leur confisque leur passeport et, de semaine en semaine, l’esclavage est depuis de plus en plus oppressant ".

Ainsi, il est rare qu’on change de linge, obligeant les filles à se reposer quelques heures à peine dans des draps souillés. Quand l'une à travailler ou faire des passes supplémentaires, un grand costaud se charge de lui faire changer d’avis.

Nul n’est censé ignorer la loi

En Appel, les deux Péruviennes sollicitent leur acquittement. Selon leur avocat, l’élément moral fait défaut car elles ignoraient qu’elles violaient la loi, rassurée par la maquerelle.

Pour le ministère public, il est impossible que les deux prévenues n’aient pas eu conscience de contribuer activement à un réseau de prostitution. L’avocate générale Isabelle Algoet estime que le jugement prononcé à Charleroi est très bien motivé d’ailleurs et demande sa confirmation. Elle ajoute que nul n’est censé ignorer la loi..

La quatrième chambre de la Cour d’appel rendra son arrêt le 5 octobre.

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