Coronavirus : l’efficacité des vaccins à l’épreuve du temps ?

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Par J.B. avec Agences

Plusieurs études, dans la littérature scientifique, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni ou encore en Israël indiquent que le vaccin est efficace contre les formes graves du coronavirus mais qu’il l’est un peu moins pour la transmission du virus. De plus, le variant Delta complique la donne.

Selon les autorités sanitaires américaines, face au variant Delta, l’efficacité des vaccins Pfizer et Moderna, tous deux vaccins à ARNMessager, tomberait de 91% à 66%.

Par ailleurs, certaines études sont en cours mettant en évidence une diminution de l’immunité après un certain temps chez les personnes vaccinées. Un risque particulier, d’autant plus que les premières personnes ayant été vaccinées sont les plus vulnérables. Des mauvaises nouvelles qui pourraient créer de nouveaux obstacles dans la lutte contre le coronavirus. Ce sont d’ailleurs, ces interrogations qui poussent les autorités à envisager une éventuelle dose de rappel du vaccin, notamment pour les personnes immunodéprimées. En Belgique, cela concerne 400.000 personnes.

Course contre le variant Delta

En Belgique, le variant Delta est apparu le 6 avril dernier et est dominant depuis le début de l’été. Aujourd’hui, il représente "98 à 99% des virus en Belgique", précise Muriel Moser, immunologue à l’ULB. On sait aussi qu’il plus contagieux à 60% que le variant Alpha.


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Ce que l’on sait aussi, c’est que la vaccination reste l’outil principal pour se prémunir contre le virus. En effet, une étude récente de l’institut Sciensano indique que seules 0,2% des personnes totalement vaccinées ont été infectées par le coronavirus. En outre, les personnes totalement immunisées (soit ayant reçu deux doses) ne représentent que 2,1% des admissions à l’hôpital liées au Covid-19 depuis le 1er janvier. A noter, par ailleurs, qu’une grande partie de la population n’était pas vaccinée au cours du premier semestre 2021. "Ce qui montre que les personnes entièrement vaccinées sont toujours bien protégées aujourd’hui", souligne Muriel Moser, immunologue à l’ULB.


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Toutefois, si les vaccins restent particulièrement efficaces pour lutter contre les formes graves et donc pour éviter les hospitalisations, l’efficacité concernant la transmission a dû être revue à la baisse.

Selon un rapport du CDC américain portant sur une étude menée sur des milliers d’employés de centres de soins et d’hôpitaux dans six Etats, "au cours de la période pré-Delta, l’efficacité vaccinale contre les infections parmi les personnes entièrement vaccinée était de 74,1% pour les vaccins à ARN Messager, 74,2% pour Pfizer-BioNtech et 74,7% pour Moderna. Pendant la période Delta, l’efficacité vaccinale contre les infections, parmi les personnes entièrement vaccinées était de 53,1% pour les vaccins à ARN Messager, 52,4% pour Pfizer-BioNtech et 50,6% pour Moderna. Ainsi, l’efficacité vaccinale estimée pour la période Delta était significativement moins élevée que pour la période pré-Delta", peut-on lire dans le rapport.

Vers un déclin de l’immunité ?

A la propagation du variant s’ajoute la question de la protection des individus vaccinés dans le temps. On sait que les personnes entièrement vaccinées restent largement protégées pour ce qui est des hospitalisations. Mais "si on regarde une population particulière, donc plus fragile comme dans les maisons de repos, à part le fait que leur pourcentage parmi les hospitalisés n’augmente pas, il est évident que leur système immunitaire est moins efficace et donc que la réponse pourrait diminuer", précise Muriel Moser.

Cette question d’un déclin possible de l’immunité des personnes vaccinées au fil du temps, est actuellement l’une des principales craintes et une des questions soulevées par la communauté scientifique. D’autant plus que les personnes ayant été les premières à recevoir le vaccin sont les plus fragiles et seraient potentiellement les premières à voir leur protection diminuer.

Cette crainte est d’ailleurs au cœur du débat pour la mise en place d’une campagne de rappel pour une troisième dose, notamment pour les personnes les plus fragiles.

"Le suivi de la durabilité de la protection après Covid-19 la vaccination peut aider à déterminer si les vaccins de rappel pourraient être indiqués, en particulier avec l’émergence continue de nouveaux variants qui pourraient surmonter l’immunité induite par le vaccin", indique d’ailleurs le CDC.

Des chercheurs britanniques estiment que l’efficacité des vaccins pourrait diminuer au bout de quelques mois. La protection de doses avec les vaccins Pfizer et Astrazeneca commencerait à s’estomper après six mois. Selon l’étude britannique Zoe COVID, basée sur plus de 1,2 million de tests, l’efficacité du vaccin Pfizer passe de 88% dans le mois suivant la deuxième dose à 74% après cinq à six mois, et celui d’AstraZeneca de 77% à 67% après quatre à cinq mois, indique l’agence de presse Reuters. Tim Spector, à la base de cette étude, a indiqué à la BBC que dans le pire des cas cette protection pourrait tomber à 50% chez les personnes âgées et le personnel de santé d’ici l’hiver prochain. Ces groupes de population qui sont aussi les premiers à avoir été vaccinés.


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A nuancer toutefois, il s'agit d'une étude basée sur les résultats de tests PCR. Or, on sait que la charge virale du variant Delta est bien plus importante et donc que cela accroît le risque de tests positifs. 

© CDC

Israël a été l’un des premiers pays au monde à lancer une vaste campagne de vaccination au sein de sa population avec, notamment, le vaccin Pfizer. Actuellement, près de 63% de la population israélienne est totalement vaccinée contre le coronavirus.

Pourtant, au cours du mois de juin, le pays a dû faire face à un regain de l’épidémie.

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Une résurgence qui pourrait "au moins partiellement, être attribuée à une diminution du niveau d’anticorps chez les personnes vaccinées", pointe une récente étude israélienne qui n’a pas encore été examinée par les pairs.

"On observe un plus grand risque d’infection chez les personnes ayant reçu leur dernière dose de vaccin depuis au moins 146 jours, en particulier chez les patients de plus de 60 ans". "Il y a un taux plus important de résultats positifs parmi les patients qui ont reçu leur seconde dose depuis au moins 146 jours que chez ceux qui l’ont reçu il y a moins de 146 jours" dit l’étude. A nouveau, il s'agit d'une étude basée sur les tests PCR et non sur les hospitalisations. Or la protection vaccinale reste importante pour prévenir des formes graves, et donc des hospitalisations. 

Arguments pour une troisième dose ?

Ces arguments de la résistance au variant Delta ainsi que celui d’une réduction de l’immunité au fil du temps sont ceux qui conduisent plusieurs pays à s’orienter vers une injection de rappel du vaccin. Pour l’heure, le recul n’est pas suffisant pour analyser concrètement cette perte d’immunité, même si les premières études émergent. Le fait est, détaille Muriel Moser, immunologue à l’ULB, qu'"en général les réponses immunitaires sont assez longues, durables et efficaces. Mais les variants compliquent les choses. Si nous n’avions pas le variant Delta on serait sûrement à l’immunité collective". Et d’ajouter, "la situation n’est pas mauvaise, mais il faut être extrêmement attentif. La réponse immunitaire contre le virus peut être très longue mais il faudra être attentif avec les variants".

C’est pourquoi, plusieurs pays optent pour une troisième dose. En Israël, la campagne de rappel a déjà bien commencé. D’ailleurs, elle est désormais accessible au moins de 30 ans. Aux Etats-Unis, le président Joe Biden a également opté pour une troisième dose pour les personnes immunodéprimées ayant reçu un vaccin à ARN Messager.

En Belgique, la task force vaccination estime qu’il faut être prudent et attendre les résultats de nombreuses études en cours, mais que dans certains cas, une troisième dose pourrait être utile, notamment pour les personnes les plus vulnérables et immunodéprimées. "S’il faut une troisième dose, ce ne sera pour le moment pas pour la population générale, ce serait pour les personnes immunodéprimées, on parle de 400.000 personnes en Belgique. Et il faudra bien sûr surveiller les personnes âgées", indique Muriel Moser. Pour l'heure, la mise en place de cette campagne de rappel n'est pas encore prévue. Place à la prudence, en attendant les résultats de données probabantes. 

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