Coronavirus en Belgique : les services de soins intensifs vont-ils manquer de médicaments ?

Covid-19 : les services de soins intensifs vont-ils manquer de médicaments ?

© STR - AFP

La question se pose. Plusieurs hôpitaux européens ont tiré la sonnette d’alarme cette semaine. Des hôpitaux belges soulignent aussi le risque de voir des médicaments essentiels manquer. C’est le cas de relaxants musculaires, de sédatifs et de curares utilisés en soins intensifs et nécessaires pour traiter les patients hospitalisés à cause du Covid-19.

Les curares font partie de ces médicaments. Ils sont utilisés pour permettre la relaxation musculaire des patients lors de l’intubation en vue de les maintenir sous assistance respiratoire.

Certains hôpitaux, comme l’hôpital Molière à Bruxelles craignent une pénurie, comme l’explique Olivier Jullion, pharmacien et chef de service à l’hôpital Molière-Longchamp : "Nous en avons toujours, mais c’est clair que la pénurie approche grandement. Nous devons aujourd’hui nous préparer à faire face à cette rupture de stocks de médicaments. "

Des stocks suffisants mais à réapprovisionner.

L’agence fédérale des médicaments est chargée de veiller à garder un stock stratégique suffisant en Belgique. Le ministre De Backer, en charge de la taskforce Covid-19 se veut rassurant. Il confirme qu’une liste existe, de 19 médicaments, pour lesquels la Belgique doit chercher un réapprovisionnement pour éviter une pénurie à l’avenir.

Cependant, selon lui, les stocks sont suffisants pour les prochaines semaines : " On a une liste de 19 médicaments pour lesquels on doit vérifier s’il y a un risque de pénurie. On a aussi une vue sur les stocks des hôpitaux. Là, on voit que pour les prochains jours et semaines à venir, il n’y a pas de pénurie. Mais dans certains hôpitaux avec beaucoup de patients, ça peut arriver. Donc, on est en train de régler ça entre hôpitaux, parce que chaque hôpital doit avoir assez de curare ", explique Philippe De Backer.

Des hôpitaux obligés de se replier sur des molécules de remplacement

Cela explique que, dans certains hôpitaux, on soit contraint, déjà, de s’organiser pour pallier le manque de certains médicaments, comme l’explique la cheffe de service des soins intensifs de l’hôpital Molière à Bruxelles, le Dr Sarah Heenen : " On est déjà en train d’utiliser des médicaments qu’on n’est pas habitués à utiliser pour remplacer ceux qu’on utilise habituellement. On utilise un curare, le Nimbex, quand les gens sont ventilés. On commence à en manquer. Il y en a qui va arriver, mais on ne sait pas quand. Donc, on utilise d’autres molécules pour remplacer en attendant ".

Cela engendre des craintes pour le personnel soignant car qui dit autre molécule, dit autre dosage et autres effets secondaires : " C’est de la débrouillardise et cela ajoute un niveau de complexité à des tâches qui sont déjà compliquées. Nous sommes des humains, on peut être fatigués et faire une erreur si on utilise un médicament qu’on connaît mal ", explique le Dr Heenen. Certaines molécules de remplacement, plus anciennes, peuvent aussi provoquer des réactions allergiques parfois graves.


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Comme ces médicaments, curares, relaxants musculaires et autres sont nécessaires en soins intensifs, les hôpitaux comptent donc sur l’agence fédérale du médicament pour assurer les stocks à plus long terme. Le ministre De Backer assure que des contacts sont pris avec des fournisseurs pour commander des médicaments là où ils sont disponibles, une tâche compliquée car tous les pays confrontés au Covid-19 ont les mêmes besoins. " Chaque pays est en train de chercher les mêmes matériaux. Pour nous, ce n’est pas une question d’argent. C’est une question de voir si on peut avoir ces matériaux en Belgique ", explique le ministre De Backer.

Produire les médicaments en Belgique ?

Cette course aux médicaments entre les pays a pour effet de faire grimper les prix. Pour enrayer cela, certains préconisent une coordination européenne, comme le demande Julien Compère, Administrateur délégué du CHU de Liège : " On a vécu cela sur tout ce qui concerne les masques, les équipements de protection, avec des montées des prix qui nous mettaient en difficulté. Cela ne doit absolument pas être la même chose avec des médicaments de première nécessité. C’est une crainte qu’on peut avoir. C’est pour cela que la prise en compte doit être faite au niveau européen ".

Si ces médicaments pouvaient être produits en Belgique, ce serait aussi une solution et une meilleure garantie pour les hôpitaux belges. La question est à l’étude. Le ministre De Backer a expliqué que des contacts étaient pris avec l’industrie pharmaceutique belge pour voir s’il était possible de produire chez nous les molécules nécessaires.

 

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