Maintenant, les caddies sont rangés dans un coin. Les vêtements, les couvertures qu’ils contenaient soigneusement pliés dans l’armoire. "On est des maniaques, nous, on désinfecte tout, tous les jours", raconte Philippe. Plus de 7 ans de rue.
Un peu de répit et trois repas par jour contre un tiers du revenu d’intégration sociale qu’ils reçoivent du CPAS. "Ce n’est pas grand-chose pour ce que l’on a : un micro-onde, un frigo, la télé, un lit. On est heureux", "On est bien ici ! C’est mieux que la rue. On a dormi dans des banques, au fitness, un peu partout, par terre", reprend Philippe. "Au début, quand on est rentré ici. Sa tension était haute, la mienne aussi. L’infirmière nous a rassurés : c’est le changement de situation".
Je n’avais plus dormi dans un lit depuis 4 ans
Sami vient tout juste de se réveiller. Ses yeux ensommeillés sourient au-dessus de son masque. Algérien, il est sans-papier depuis 4 ans en Belgique. "On était dans un squat et un soir, un Monsieur nous a dit qu’il y avait un hôtel pour nous. Je n’y ai pas cru ! Un hôtel ? Pour les sans-papiers, les SDF ? C’était vrai !"
"Je n’avais plus dormi dans un lit depuis 4 ans. C’est la première fois. Il fait chaud, il y a une télévision. Merci à tout le monde. Je n’avais même pas de sac pour mettre des vêtements. Ici, je prends une douche tous les jours. Avant, ça pouvait attendre un mois". Et quand on lui demande s’il craint de retrouver la rue, il répond : "On verra".
Pascal et Philippe eux aussi relativisent ce qui se passera après : "On sait que c’est provisoire. On se débrouillera, comme d’habitude. Cela ne vient plus à un an près, maintenant !"
Un suivi social approfondi
Ici, le cadre est posé, les règles sanitaires bien intégrées. Chacun porte son masque quand il sort de sa chambre. Pour celles liées au confinement, c’est moins clair. La plupart d’ailleurs ont des fourmis dans les jambes. Certains sortent souvent pour aller "chercher du travail au noir, mais c’est très très difficile en ce moment". D’autres ont l’habitude de sillonner la commune : "On fait notre petit tour, place de la Vaillance, etc".
Et la vie en collectivité ? "Il y a eu comme un peu partout des conflits", confie Kesia Ronsmans. Mais je pense que tout a été mis à plat. Des personnes avaient déjà eu des conflits, avant d’intégré l’hôtel. Maintenant c’est aplani".
Quoi qu’il en soit, ici on peut se poser. Eviter de se remettre en route chaque matin. Les services sociaux de la commune y voient une fenêtre d’opportunité pour raccrocher les personnes aux aides auxquelles elles ont droit. "Chaque personne qui est hébergée ici a un ou deux assistants sociaux de référence", explique Aurélie Baudoux, coordinatrice du service affaires sociales de la commune.
"On essaie qu’elles aient chacune un domicile ou une adresse de référence, qu’elles soient affiliées à une mutualité, qu’elles puissent recevoir un revenu si elles y ont droit, que ce soit un revenu du CPAS, ou une pension d’invalidité et qu’elles soient suivies par un médecin traitant ou inscrite dans une maison médicale. Ce sont les priorités que l’on s’est fixé".