Une info a fait un peu de bruit pendant la première quinzaine d’août, une info très importante pour la culture allemande, la culture culinaire mondiale et le développement durable. J’exagère à peine, car évidemment, comme souvent, la sphère des réseaux sociaux s’est emballée pour une saucisse dans un peu de sauce ! Le groupe Volkswagen a annoncé qu’un des plats-phare de la cantine, la ''currywurst'', littéralement, la saucisse au curry, allait disparaître d’une de ses cantines !
On va tenter d’y voir clair sur "quellle saucisse ?" et "où est le curry ?".
Mais d’abord, que s’est-il passé? VW, donc, annonce que dans UNE des cantines du groupe, la currywurst va passer à la trappe. Une des cantines, pas toutes, il en reste donc un paquet pour que les travailleurs du géant automobile puissent continuer à se régaler de bonnes saucisses. Dans ces cas-là, le politique aime bien s’en mêler, et ça n’a pas raté puisque l’ancien chancelier Gherard Schroeder n’a pas manqué de dire que s’il avait été encore au conseil de surveillance de VW, il n’aurait je cite, " jamais laissé passer ça ".
Tout cela s’inscrit dans un contexte de "verdurisation" de VW, qui multiplie son offre de voitures électriques (tout en continuant à proposer nombre de voitures diesel), qui propose des alternatives végé à la cantine…Mais dont la currywurst est fabriquée dans ses cuisines et porte un numéro de "pièce détachée", comme un clignotant ou un parechoc. Le contexte plus général est celui d’une RFA toujours plus concernée par le bien-être animal et l’impact environnemental de la consommation de bidoche.
Oui, mais! Rien que les berlinois consomment 70 millions de currywurst par an, et sur toute la RFA on atteint 800 millions!
Mais c’est quoi cette currywurst ?
Elle est multiforme, blanche, fumée, avec ou sans peau, grillée ou cuite dans le saindoux, mais surtout, surmontée d’une sauce tomates-pommes-curry qui fait tout. Et souvent servie avec des frites. Elle est l’objet de débats sans fin entre gastronomes avertis, un peu comme pour le spaghetti carbonara.
Alors, un patrimoine en danger ?
Finalement, c’est peut être l’écrivain octogénaire allemand Uwe Timm qui a raison, il a déclaré "La currywurst appartient à la rue de toute façon " et il poursuit : " la saucisse de VW est une saucisse domestiquée " et en faire, comme le fait l’ex-chancelier, un repas essentiel dans le contexte d’une entreprise serait donc une mauvaise interprétation de son statut ! Sa place, c’est comme notre mitraillette, c’est la rue!
Donc, chers auditeurs et auditrices, vous pouvez la faire quand même à la maison, même avec un de nos boudins blancs,qu’il faudra peler, on trouve la recette de sauce un peu partout sur le net, mais la meilleure sera en street food à Berlin, où elle a même une composition légale pour pouvoir aborder son nom de currywurst, à la manière d’une appellation d’origine !
Florent Ladeyn chef ultralocavore " pas pour de rire "!
Je vous emmène dans le département du Nord de la France, le fameux 59. Un petit prince de la cuisine y sévit de puis plusieurs années. Florent Ladeyn, un vrai chef, vraiment original, bien plus radical que tous ceux qui, des chaînes de burgers aux restaurants d’entreprise, en passant par les étoilés, te racontent qu’ils font du " local de saison ", mais chez qui, au final, la viande vient d’Irlande et les tomates sont hydroponiques.
Florent Ladeyn, c’est un français flamand qui ne parle pas flamand mais qui est très fier de ses origines ; au départ, il reprend l’auberge familile du Vertmont à Boeschepe, à deux kilomètres de la frontière belge, pas loin d’Ypres.
Dans cette région merveilleuse, où ça a beau être le plat pays, c’est pas si plat, il y a du relief, presque de l’altitude!
Une étoile Michelin plus tard, que le guide rouge lui a ensuite retirée, on n’a toujours pas compris pourquoi - et on s’en bat assez bien les papilles - le menu est toujours à 50 euros (80 avec les accords boissons), ce qui fait ressembler cette entreprise privée à une sorte de service public de la gastronomie engagée, " accessible ", même s’il faut réserver avec une copieuse avance, vu le succès.
Ce n’est pas tout, Florent Ladeyn a développé d’autres adresses, sans pour autant aller au Japon, à la manière des chefs français connus d’habitude. Non, il est allé ouvrir deux enseignes à Lille, l’une, le Bloempot, avec, pareil, une formule les " yeux fermés " hyper-locavore ; bref, un menu imposé (mais il y a aussi une formule d’assiettes à choisir) et une autre déclinaison de son talent, le Bierbuik, en mode estaminet flamand. Le Bierbuik se complète d’un " bloemeke " à l’étage avec un menu à 25 euros
Bref, un talent qui mérite que l’on profite de la liberté retrouvée pour franchir la frontière, une exigence locavore qui lui fait bannir, en tout cas au Vertmont, le poivre et le café, parce que c’est pas local. N’ayez pas peur de goûter la chicorée, quand c’est bien fait, c’est vraiment canon!
Comme nombre de chefs en vogue en ce moment, Florent Ladeyn aime cuisiner au feu (ça nous change des basses températures) et ce notamment au Bloemeke (à l’étage du Bierbuik pour ceux qui suivent), où le menu " au feu " est à 25 euros.
Manger belge ?
La semaine dernière, je vous faisais traverser la frontière pour manger hyper-locavore, cette semaine, on reste en Belgique pour manger belge, ce qui veut dire manger " à la belge ", ce qui ne sous-entend pas forcément de manger des produits locaux, mais là on a envie de manger nos classiques belges, et du coup, on va où ?
Oui, le temps d’automne, ça me donne des furieuses envies de vol-au-vent et frites, de carbonnades et de frites, de boulettes sauce tomates et de frites, quand ce n’est pas de poulet rôti et de frites, ou de rognons à la liégeoise et de….croquettes.
Allez, petite promenade " belgifiante " absolument non exhaustive et complètement assumée dans sa partialité.
A Ostende, les croquettes de Madam Kroket sont franchement pas mal, à manger dans la rue, sur le port, sans en donner aux mouettes, c’est interdit.
Toujours à Ostende, une enseigne est le roi du poulet rôti depuis des décennies, Koekeok, bon, c’est vraiment pas cher, mais ça casse pas non plus trois pattes à un poulet, probablement pas vraiment bio, ni même de libre parcours, mais tout à fait honnête.
Tant qu’on y est à causer poulet, ajoutons-y de la comporte, des frites dignes de ce nom, du jus de cuisson, un vrai rôtissage à la rôtissoire, tout ça pour vous dire que j’ai vraiment surkiffé le Variétés à Ixelles, une enseigne qui, avec les anciens proprios ne m’avait jamais convaincu et qui là envoie du lourd à prix tout à fait modérés, vu la qualité!
On reste à Ixelles, avec une nouvelle adresse, Fripon, qui devient le restaurant de l’Hôtel du Berger, superbe édifice art-déco niché dans le toute petite rue …du Berger, de la tomate-crevettes pas mal du tout -même si c’est pas des crevettes épluchées main, un américain qui envoie… ;et….un américain à base de betteraves tout à fait surprenant, bref, c’est bien né !
Un petit détour par Blaregnies, La Marelle, du grand chef Eric Fernez, mais ici c’est son adresse accessible : américain, steak de cheval, porc sauce Cross et Blackwell, le tout avec des ingrédients au top, une adresse fétiche en Belgique pour moi.
Restons dans le coin, avec le Mitraillette Land de Jean-Phi Watteyne, avec que des mitraillettes, mais faites avec des bons trucs dedans, et des noms improbables (comme " Gueule en Terre "), lequel Jean-Phi revisite aussi le terroir belge avec modernité, mais au 1040, place Jourdan à Etterbeek, en Région Bruxelloise, on pourrait presque dire, (très) grand écart !
Allez, puisqu’on revient à Bruxelles, je ne peux pas ne pas mentionner les restaurants de la famille Niels, ainsi que les Armes de Bruxelles qui a bien redoré son blason.
Ah oui, mon correspondant à Liège en la personne du chef de la table d’hôtes Magneu’s de Pelotes me dit dans l’oreillette qu’en région liégeoise, c’est à la Cuisine de Yannick que ça se passe, entre cervelle et rognons !
Niels1926.be
auvieuxsaintmartin.be/#niels
www.tavernekoekoek.be
madamkroket.be
mitraillette.land/
auxarmesdebruxelles.com
fernez.com/la-marelle-cafe
Les vrai rockers aiment le flan !
C’est vrai que le flan n’a pas toujours la cote, on se dit que c’est mou, et si c’est mou c’est rarement bon signe, et pourtant, je mourrais d’envie de parler sur un media rock par essence; du flan, des flans, qui à leur manière, peuvent aussi évoquer le metal, ou presque…
Oui, le flan, un entremets, ça y est, je m’enfonce avec des mots tellement vieux que plus personne ne les comprend, bref des desserts qui ne sont pas des pâtisseries, avec souvent des oeufs, du lait, parfois de la farine, souvent de la crème et parfois aussi un joli contraste de textures et de saveurs, " bonne continuation, Messieurs-Dames " (non, le " bonne continuation ", il faudrait le bannir des restaurants, mais c’est trop tard!)
Le flan caramel, non ça n’a rien à voir avec un flamby mollasson !
Facile, du caramel au fond du moule, un appareil à flan (œuf, sucre, lait, vanille, moi je fais moit/moit lait/crème) cuit au four à 120 degrés, même moins, pas trop chaud sinon ça fait une texture graineuse
Dans la même famille, la crème brûlée :
La différence, c’est que sur un " ruban " (jaune d’œuf-sucre), on met de la crèèèèème, et on cuit le tout au bain marie, au four juste en-dessous de 100°
Et après on brûle le tout, pour le fameux contraste, avec sucre en surface et chalumeau
Si vous ne disposez pas d’un chalumeau, ce qui est fréquent, on peut le faire au gril mais il faudra bien refroidir les ramequins de crème avant, sinon la crème chauffe et non, la crème brûlée a beau être brûlée, on la mange froide.
La panna cotta, littéralement " crème cuite ", scandaleusement simple, crème sucre, gélatine, et il faut le temps que ça prenne au refrigérateur, pas ma préférée dans la famille des entremets, car elle a un goût de comme si t’avais triché aux cartes, tout ça grâce à la gélatine.
D’ailleurs, à la place de la gélatine, ou pire, de l’agar-agar, on peut recourir à la bonne vieille fécule de maïs. Attention, une petite erreur de proportions et c’est colle à bois, mais franchement, un bon vieux flan en mode pudding chocolat, à la maïzena, j’en ai fait il y pas longtemps, démoulé et servi avec une couette de crème à peine fouettée et un concassé de noisettes du Piémont torréfiées, c’était pas si mal dans son classicisme !
Un dernier pour la route, le burnt cheesecake, du fromage frais, des œufs, du sucre, de la crème fraîche et une cuisson à 200° (ne vous embarrassez pas de biscuits concassés au fond du moule, pas besoin, la croûte brûle presque, mais il faut arrêter avant, au milieu ça tremblote, c’est du flan, mais ça rocke sévère !