Tendances Première

Comment parler du harcèlement à son enfant ?

Tendances Première : Les Tribus

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Les mots à dire, à ne pas dire et à ne pas laisser dire lorsque son enfant est victime de harcèlement… Bruno Humbeeck, psychopédagogue à l’UMons, prépare à l’intention des parents un guide sur le harcèlement, pour les aider à réagir au mieux par rapport à l’enfant mais aussi par rapport à l’école.

Pour le psychopédagogue, "c’est ce qu’on dit qui va conditionner ce que l’enfant perçoit comme étant nos attitudes".

Il donne quelques exemples des mots à dire ou à ne pas dire :

  • "C’est fini, ce n’est plus ton problème, c’est devenu notre souci d’adulte, c’est à nous à réagir". L’enfant se sent bien, il se sent soutenu dans ce qu’il vit, parce qu’on ne lui dit pas : "Débrouille-toi", mais plutôt "On va mettre en place des choses".
  • "Tu n’es pour rien dans ce qui t’arrive", car il faut savoir que le harcèlement est complètement aléatoire, il n’y a pas de profil type de victime.

Et il faut au contraire évacuer du champ des réponses :

  • "Tu es peut-être un peu trop ceci, pas assez cela, "Tu es trop sensible", "Apprends à réagir", etc. Il faut éviter tout ce qui va minimiser ou maximiser.
  • Des conseils du style "Tu dois te défendre un peu plus, avoir de la répartie, tu dois faire preuve d’humour ou d’autodérision", sont très dangereux et impossibles à appliquer quand on est confronté à quelqu’un de plus puissant que soi. "Il n’y a rien de pire, si on est mal assuré sur ses assises, de lancer de l’humour, qui va se retourner contre soi" commente notamment Bruno Humbeeck.

Il faut déculpabiliser l’enfant, et même le déresponsabiliser. Car on n’est pas responsable du harcèlement qu’on subit. On est simplement la victime, passive, d’une agression, généralement de groupe, face à laquelle on a un sentiment d’impuissance. Et il est tout à fait normal, quand on est soumis à des agressions répétées d’un groupe, d’être soumis à des émotions excessives. Il ne s’agit pas là d’hypersensibilité.

Comment aborder l’école en cas de harcèlement ?

Véhiculer la souffrance émotionnelle de l’enfant est toujours mieux que de porter une plainte, recommande Bruno Humbeeck. "L’école, quand elle entend harcèlement, a parfois l’impression qu’on franchit ses portes avec un bélier."

Le psychopédagogue liste d'autres exemples propos plus pertinents à fournir à l'établissement :

  • "Mon enfant souffre, il est triste, il est en colère, il a peur. J’aimerais qu’on fasse quelque chose ensemble. Et il y a des solutions."

Cependant, on ne peut pas laisser dire de la part de l’école :

  • "Ce n’est pas vraiment du harcèlement", selon la définition juridique, complètement obsolète, qui précise que le harcèlement doit être répété, intentionnel, nuisible. On sait que ça ne doit pas nécessairement être répété, comme dans le cas du cyberharcèlement, qui peut être une seule agression très virulente.
  • "On est complètement démuni, on ne sait rien y faire". Les écoles ont une responsabilité, elles doivent aller chercher les outils qui existent, à la Fédération Wallonie-Bruxelles ou ailleurs. Outre les formations, des fiches techniques sont disponibles pour les écoles. Il y a en tout cas, pour l’école, une obligation de moyens !
  • "Vous chouchoutez trop votre enfant", qui renvoie le problème aux parents, ou "Tout ce qui ne tue pas rend plus fort", ce qui n’est pas vrai car tout ce qui ne tue pas blesse très fort.
© Getty Images

Quand l’enfant est harcelé par le corps enseignant

Là encore, il faut pouvoir parler avec l’école sans être dans l’accusation, conseille Bruno Humbeeck. Les abus d’autorité existent à tous les niveaux de l’enseignement, avec des dérives qui se produisent de manière parfois consciente, parfois inconsciente.

Plutôt que de porter plainte contre un enseignant, on peut évoquer la souffrance de l’enfant, son émotion, et chercher ensemble des solutions. Se poser la question : est-ce que c’est mon enfant qui interprète mal ? Car cela peut réellement arriver, dans le cas où c’est en réalité la matière qui semble harcelante.

Eclairer l’enseignant sur ce qu’il provoque comme réactions lui permet de comprendre quelque chose dont il n’avait souvent pas conscience.

"Car c’est rarissime que ce soit fait volontairement, de manière sadique. […] Aujourd’hui, on n’utilise plus l’humiliation à des fins éducatives ou punitives. C’est parfois fait malencontreusement et, quand c’est fait, ça doit être relevé à partir de la souffrance de l’enfant, parce que ce n’est pas acceptable."

Mettre en place les conditions d’un dialogue entre l’école et la famille et sortir d’une accusation réciproque, c’est le sens du livre consacré au harcèlement que prépare Bruno Humbeeck.

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