Deuxième volet de notre enquête "Vieux fers, le vrai prix du recyclage". Après avoir découvert que les broyeurs à métaux wallons étaient parmi les plus gros émetteurs de PCB d’Europe, se pose la légitime question de l’impact de ces polluants toxiques sur la santé des populations.
Cette question, la Région wallonne se l’est posée avant nous. Pour rappel, certains PCB sont classés comme cancérigènes avérés et d’autres probables. Ce sont aussi des perturbateurs endocriniens et ils peuvent persister dans l’environnement pendant plusieurs centaines d’années.
Les autorités publiques ont modifié les permis des entreprises en leur fixant les normes les plus strictes d’Europe. Elles ont analysé ce qui sortait des cheminées, ce qui retombait dans les poussières. Elles ont étudié des choux, des mousses et des œufs. Et à chaque fois, le constat est le même : il y a une dégradation environnementale aux PCB dans l’environnement proche des broyeurs. En imaginant et en modélisant des scénarios théoriques d’exposition, la Wallonie a conclu à un risque modéré ou une toxicité chronique.
Un enterrement de première classe
En coulisse, certains acteurs proches du dossier parlent d’un "enterrement de première classe". Les propos sont durs. Mais, plusieurs documents publics étayent leur propos.
Tout d’abord, une note de synthèse du 8 novembre 2019 de l’administration met en avant une recommandation : "La solution raisonnable à ce jour serait de prévoir un biomonitoring car l’ensemble des experts internationaux qui ont été contactés sur cette question, ainsi que l’ISSeP qui a l’expérience de ce type de campagne de surveillance, soulignent cet élément". Traduction : il faut tester les gens.
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Un autre complément d’information sorti le 20 février 2020 est encore plus clair : "Les risques peuvent avoir été sous-estimés ou à l’inverse surestimés. Seules des analyses réalisées sur des matrices humaines permettraient de réduire ces incertitudes."
J’assume ce choix
Ces recommandations sont arrivées sur le bureau de la ministre wallonne de l’Environnement. Mais, Céline Tellier ne va pas les suivre. "Simplement dire : 'Vous Monsieur, vous avez effectivement des traces de perturbateurs endocriniens' ne nous permettait pas de dire le problème, c’est le broyeur. Lancer une étude qui allait nous prendre encore des mois et des mois pour avoir des résultats comme ça ne me semblait pas une priorité au niveau politique et j’assume ce choix qui a été fait", nous confie l’écologiste.
Au cabinet ministériel, on utilise une image : "Quand le lait bout, il faut baisser le gaz pour éviter le débordement." La Région a donc préféré éliminer les sources de PCB en forçant les entreprises à s’équiper de filtres pour abattre les polluants à la sortie des cheminées des broyeurs. Mais, est-ce suffisant pour protéger une population ? Plusieurs professionnels de la Santé ne le pensent pas. On verra plus loin leurs points de vue.