Matin Première

Charles III, Georges VI, Victoria, Henri VIII... l'importance des patronymes royaux en Angleterre

Par La Première via

God Save the King : deux jours après le décès d'Elizabeth II, le nouveau roi d’Angleterre a été proclamé ce 10 septembre. Il s’appelle donc Charles III. Logique implacable puisqu’il s’appelle Charles. Mais pas tant que cela... En effet, il n’est pas rare qu’un roi choisisse un autre nom pour régner que son nom de baptême. Explications.

En 1952, on aurait demandé à Elizabeth sous quel nom elle voulait régner. Elle aurait répondu : "mon propre nom bien sûr quoi d’autre ?"

La question avait pourtant tout son sens : la reine Victoria avait pour premier prénom Alexandrina. Elle a choisi Victoria et ce fut particulièrement approprié pour incarner l'Angleterre triomphante du 19e siècle.

Quant au père d’Elizabeth, on l’appelait Bertie, diminutif d’Albert. Fin 1936, son frère Edouard abdique, le prince Albert devient roi et pour régner il choisit le nom de Georges VI. Une manière de marquer la continuité par rapport à son père Georges V et de restaurer ainsi la confiance dans une monarchie ébranlée par l’abdication d’Edouard qui voulait épouser une Américaine, deux fois divorcée, et qui affichait également des sympathies pour le nazisme. Georges VI, lui, associé aux côtés de Churchill, sera la figure victorieuse face à l’Allemagne nazie comme son père Georges V incarne la victoire durant la Première Guerre mondiale.

Une symbolique particulière

Le prénom de Georges est particulièrement glorieux pour la monarchie britannique. Georges est même le saint patron de l’Angleterre depuis le 14e siècle. C’est d’ailleurs sa croix, rouge sur fond blanc, qui a été choisie comme drapeau anglais.

Au 18e siècle, il n’y aura que des 'Georges' sur le trône britannique, illustration de l’importance de ce prénom pour la monarchie d’outre-manche. Un prénom important mais qui n'est pas le plus populaire dans l'histoire des monarchies : le record revient à la France avec 18 Louis, contre 6 Georges au Royaume-Uni. Les prénoms le plus fréquents qui se sont assis sur le trône britannique sont les suivants : 8 Henri et 8 Edouard.

Mais ces prénoms deviennent difficiles à choisir aujourd’hui. Le dernier Henri, c’est Henri VIII, souverain controversé à l’écrasante personnalité, et aux six épouses, qui en fit d'ailleurs exécuter deux. De même, difficile d’imaginer un Edouard IX après l’abdication d’Edouard VIII en 1936 qui mit en péril la monarchie.

La reine Victoria a régné de 1837 à 1901 sur l'Angleterre
Georges VI et Elizabeth en février 1937

L'absolutisme à l'anglaise des rois Charles

Et que peut-on retenir des deux Charles précédents ? Leur destinée... n'est pas glorieuse.

Charles Ier règne au 17e siècle et se heurte au Parlement et à l’Eglise anglicane. Son intransigeance engendre la guerre civile et en 1649, il est arrêté, jugé et exécuté pour haute trahison.

Après sa mort, la royauté est abolie, la République est déclarée avec à sa tête, Oliver Cromwell, une sorte de Robespierre d’outre-Manche. Charles Ier est un peu à l’Angleterre ce que Louis XVI est à la France : tous deux ont été décapités et dans les deux cas, c’est la fin de la monarchie. Mais il y a une différence notoire : en Grande-Bretagne, la République ne sera qu’une parenthèse. Quand la monarchie est restaurée, le nouveau souverain s’appelle... Charles II, le fils de Charles Ier.

Il ne finira pas sur l’échafaud. Mais comme son père, il affronta lui aussi le Parlement. Dans l’histoire de Grande-Bretagne, Charles Ier et Charles II incarnent, en résumé, la tentation absolutiste, un peu sur le modèle des rois de France comme Louis XIV, qui est d’ailleurs le contemporain de Charles II. Cela signifie que la tradition parlementaire britannique s’est forgée contre ces deux rois prénommés Charles.

Le règne de Charles II reste aussi associé à de grands fléaux : d’abord, la grande peste de Londres qui a tué un Londonien sur 5 et ensuite, comme un malheur n’arrive jamais seul, elle sera suivie du terrible incendie de Londres.

Le prince William, héritier de... Charles II

Par ailleurs, Charles II meurt sans héritier. Pourtant, il était particulièrement libertin : s’il n’a pas eu d’enfant légitime, il en a eu une douzaine avec ses nombreuses maîtresses.

Et ironie de l’histoire... le jour où William, le fils de Charles III, montera sur le trône, il sera un lointain descendant de Charles II. Car si l’on remonte très loin dans l’arbre généalogique de la mère de William, la princesse Diana, on trouvera le duc de Grafton qui est le fils illégitime de Charles II et de Barbara Villiers. Finalement, l’aristocratie britannique est un petit monde.

Morale de l’histoire, on comprend qu’à 73 ans, Charles n’avait pas envie de changer de prénom. Ce n’est sans doute pas le plus glorieux nom de l’histoire de la monarchie britannique, mais on se dira que le prénom ne fait pas l'homme, ni la fonction.

Charles III brisera-t-il la malédiction des Charles d'Angleterre ?
Charles III brisera-t-il la malédiction des Charles d'Angleterre ? © HANNAH MCKAY / POOL / AFP

Recevez chaque vendredi l'essentiel de Matin Première

recevez chaque semaine une sélection des actualités de la semaine de Matin Première. Interviews, chroniques, reportages, récits pour savoir ce qui se passe en Belgique, près de chez vous et dans le monde.

Sur le même sujet

Articles recommandés pour vous