Politique

Céline Tellier (Ecolo) : "les dérèglements climatiques sont une nouvelle normalité, il faut prioriser l’usage de l’eau"

L'invitée: Céline Tellier, ministre wallonne de l’environnement

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Par A.P, sur base d'une interview de Thomas Gadisseux via

Sécheresse, inondations, relocalisation des productions agroalimentaires, consignes des canettes, les dossiers de Céline Tellier, ministre wallonne de l’Environnement (Ecolo) sont nombreux et concernent la vie quotidienne de nombreux habitants wallons. Tour d’horizon en quelques minutes.

Les dérèglements climatiques sont une nouvelle normalité.

Comment se préparer à l’été ? Doit-on s’attendre à des mesures d’anticipation lorsque l’on sait que la France s’inquiète déjà de l’arrivée de la belle saison ? Est-ce que le spectre de la sécheresse existe aussi en Belgique ? "Oui, constate, sans ambages, Céline Tellier. Malheureusement, aujourd’hui, les dérèglements climatiques sont une nouvelle normalité. On l’a vu chez nous avec des inondations meurtrières en 2021, qui elles-mêmes avaient succédé à quatre années de sécheresse consécutives. Et ici, effectivement, en France, même en hiver, on peut avoir des phénomènes de sécheresse. On a la chance chez nous en Wallonie, que les recharges hivernales ont été positives et permettent d’atteindre le niveau de l’année dernière. Mais on reste vigilant. C’est pourquoi on a travaillé à la fois sur la prévention en matière des risques d’inondation et aussi en matière de sécheresse."

Prévention de la sécheresse : des décisions à l’échelle de la Wallonie

Pour la ministre wallonne de l’environnement, "on doit clairement continuer à prendre des mesures de prévention et surtout passer d’une approche qui était curative jusqu’à présent, à des mesures préventives pour gérer la quantité d’eau qui va tomber, dont on n’a pas la maîtrise, et en même temps la qualité de celle-ci."

Et de citer en exemple les mesures prises en matière de plantations, pour permettre à l’eau de mieux percoler dans le sol (un million d’arbres plantés en trois ans et 2400 kilomètres de haies). "C’est aussi favoriser des cultures agricoles qui soient plus adaptées aux changements climatiques et bien sûr aussi gérer l’eau de distribution, l’eau potable d’une façon beaucoup plus parcimonieuse."

Va-t-on devoir, dans les prochaines années, anticiper des limitations dans la consommation d’eau ? "On est en train de travailler sur un décret qui vise à prioriser les usages de l’eau, précise Céline Tellier. L’idée n’est pas nécessairement de dire qu’on ne peut plus avoir de piscines, mais de se dire, en cas de sécheresse importante, quels sont les usages considérés comme prioritaires et d’avoir une décision régionale, puisqu’aujourd’hui seules les communes peuvent prendre des mesures de restriction d’eau, afin d’avoir une vision cohérente à l’échelle du territoire."

Ce décret s’ajoute au plan sécheresse déposé en 2021, "qui est en train d’être mis en œuvre", complété par des investissements importants effectués par les opérateurs de l’eau pour sécuriser l’eau de distribution et son recyclage.

La reconstruction des vallées inondées

La suite des graves inondations de 2021 est aussi un important dossier du gouvernement wallon.

Une cinquantaine de chantiers vont démarrer dans les prochaines semaines.

Après les phases d’urgence, notamment pour sécuriser les berges, l’heure est à la reconstruction et à l’adaptation des vallées, afin qu’elles soient plus résistantes face à ces conditions climatiques extrêmes. "L’idée n’est pas de reconstruire à l’identique, mais au contraire de réduire le risque en créant à la fois plus de méandres dans les rivières en Wallonie, en particulier au niveau de la vallée de la Vesdre, en travaillant aussi à ce qu’on appelle des zones d’immersion temporaire, c’est-à-dire des endroits de la vallée, où l’eau va pouvoir sortir de son lit."

"On va commencer une cinquantaine de chantiers dans les prochaines semaines. Le gouvernement devra se positionner dans les tout prochains jours."

Des décisions concrètes sont attendues notamment sur le schéma stratégique de la Vesdre, ou des zones habitables pourraient être supprimées, tout comme certaines routes. Comment collectivement assumer tout cela ? "La plus value, c’est de travailler non pas à une échelle communale, mais vraiment à l’échelle de l’ensemble de la vallée, argumente la ministre, et de se dire : c’est quoi l’avenir de notre territoire en intégrant ce risque climatique ? Et c’est vraiment quelque chose que nous devons faire à l’échelle de la région."

Favoriser une alimentation plus locale

Un autre dossier sur la table de Céline Tellier est la relocalisation de notre alimentation. La Wallonie importe 83% de ses fruits et 67% de ses céréales… Comment va-t-on produire, transformer, commercialiser sans tomber dans le cliché du petit marché local "bobo" dont on a vu que le modèle s’est essoufflé après la crise du covid.

"Au niveau du gouvernement, on vient de valider la semaine passée un très grand projet 45 millions d’euros, dans le cadre du plan de relance, pour soutenir vraiment les filières de transformation, de distribution, toute la filière logistique aussi sur ces circuits plus locaux qui permettent aussi aux entreprises, aux communes, aux cantines de collectivités d’avoir les outils nécessaires. […] On avait beaucoup travaillé sur certaines filières à développer chez nous, des cultures justement plus adaptées au changement climatique. Je pense à l’huile de tournesol par exemple, une nouvelle filière qui est en train de s’implanter chez nous. On travaille aussi sur les fruits, les légumes, les céréales, les protéines qui sont quatre filières identifiées comme à haut potentiel de développement."

Deux sacs de farine sur trois sont encore importés.

Le travail se fait aussi sur la logistique, entre la production et la consommation : "C’est par exemple des conserveries, des cuisines qui sont partagées entre des entreprises pour pouvoir transformer ces produits, pouvoir aussi par exemple soutenir des moulins pour recréer des farines chez nous, parce qu’aujourd’hui deux sacs de farine sur trois sont encore importés pour faire notre pain alors que nous sommes une terre de céréales."
"Ces projets sont en cours d’opérationnalisation, aujourd’hui, pour pouvoir effectivement avoir une assiette qui soit plus locale, au bénéfice aussi de nos producteurs bien entendu.
"

Des canettes consignées en 2025

Les canettes consignées en Wallonie, ce n’est aujourd’hui qu’une question de temps car le principe est acquis. "Pour 2025, précise Céline Tellier, parce qu’il y a toute l’opérationnalisation à faire. Nous avons réussi à convaincre la Flandre et Bruxelles d’avancer dans la même direction. Le choix maintenant sera fait cet été mais le modèle de fonctionnement reste à déterminer."

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