Après la révélation qu’a été son premier album "Requin Chagrin" en 2015 et le succès de son deuxième album "Sémaphore" en 2019, Requin Chagrin (de son vrai nom Marion Brunetto) est de retour, pour notre plus grand plaisir, avec un troisième album intitulé "Bye Bye Baby".
Quel bonheur de rencontrer Marion Brunetto au détour d’un couloir de la RTBF. Non seulement parce que c’est un réel plaisir de pouvoir faire une interview d’une artiste française en chair et en os, malgré la situation sanitaire actuelle, mais aussi et surtout parce que l’album "Bye Bye Baby" est un véritable bijou. Avec sa dream pop aux accents rock californien et aux sonorités années 80, Requin Chagrin vous embarque à bord d’une belle voiture américaine pour un road trip planant destination les étoiles et les cœurs brisés.
Rencontre avec une artiste fascinante et bourrée de talents.
RTBF Culture : Tout d’abord merci pour ce très bel album ! Je dois bien avouer que cela fait énormément de bien d’écouter de la musique aux sonorités rock. Vous avez conscience d’être un peu à contre-courant de ce qui se fait en ce moment dans l’industrie musicale ?
Marion Brunetto : "Requin Chagrin c’est avant tout un projet solo avec un univers et un imaginaire de groupe, sans doute inspiré des références de groupe rock que je peux avoir. C’est vrai qu’il y a peu d’artistes en ce moment qui correspondent à cette étiquette de "garage" de "rock" et de "dream pop" avec des vraies guitares… Ça devient malheureusement un petit peu rare mais ça reste un courant important !"
RTBF Culture : Parmi vos influences, on retrouve qui ? Difficile de ne pas faire un lien avec "Cigarettes after sex" par exemple ?
Marion Brunetto : "C’est effectivement un groupe que j’apprécie beaucoup, qui est hyper planant d’ailleurs. J’aime leurs chansons parce qu’il y a un super son et quelque chose de très rêveur. Dernièrement, j’ai redécouvert et beaucoup écouté Cocteau Twins aussi (groupe punk/dream pop britannique). J’étais passée complètement à côté à l’époque mais je les trouve super et j’y trouve quelque chose d’assez enivrant."
RTBF Culture : Ces influences anglo-saxonnes ne vous ont jamais donné envie de chanter en anglais ?
Marion Brunetto : "J’adore écouter de la musique en anglais mais je n’arrive pas à me projeter dans cette langue. Ce n’est pas naturel pour moi de chanter en anglais, ça sort en français dans ma langue maternelle."
RTBF Culture : On sent qu’il y a un énorme travail de composition derrière chaque chanson et que les textes sont peut-être un peu plus "secondaires". Chaque instrument a d’ailleurs été choisi/chiné avec soin pour obtenir ce résultat si singulier ?
Marion Brunetto : "Quand je travaille des chansons, c’est toujours les musiques d’abord. J’ai vraiment besoin de quelque chose pour m’appuyer et ça part des mélodies. Les mélodies me donnent les bases pour écrire mes textes et pour ensuite les chanter. Avant chaque album, avant même de me demander ce que je vais raconter dans les textes, j’aime bien me demander comment je vais l’enregistrer et avec quoi. Notamment sur "Bye Bye Baby", j’avais envie de réellement travailler la prise de son. L’étape de production, je voulais pouvoir la maîtriser le plus possible. J’ai donc effectivement passé beaucoup de temps sur des sites d’occasion pour dénicher ce dont j’avais besoin. J’y ai trouvé une annonce pour un enregistreur à bandes et c’est devenu le pilier de mon équipement pour cet album. C’est lui le "patron" qui enregistrait et j’ai dû m’adapter à son rythme : parfois plus rapide, parfois plus lent. C’était un travail très intéressant."
RTBF Culture : Comme d’habitude, vous avez tout joué toute seule : le synthétiseur, la basse, la guitare, la batterie. On dit de vous que vous êtes une "Self made woman".
Marion Brunetto : "Avant de commencer ce projet de Requin Chagrin, j’ai participé à plusieurs projets de groupe dans lesquels je jouais à la batterie. Dans ces projets-là, il y avait toujours un membre du groupe qui finissait par se lancer en solo. Certains d’entre eux proposaient un son tout à fait particulier : à l’ancienne, fait avec enregistreur cassettes. Cette démarche artistique m’a vraiment intriguée et le son rétro m’a directement parlé, ça m’a clairement encouragée à faire pareil et depuis, je n’ai jamais lâché cette façon de faire : tout toute seule et en utilisant des vieilles technologies."