"Le sommet est tombé d'accord pour dire que le report des élections ne doit pas être limité dans le temps car il y a des troubles dans le pays, et que les élections doivent être reportée sine die jusqu'au retour d'une stabilité permettant la tenue d'élections libres et justes", a déclaré M. Zuma, dont le pays, membre observateur de la Conférence internationale de la région des Grands Lacs (CIRGL), suit attentivement la situation au Burundi depuis la présidence de Nelson Mandela.
L'Afrique du Sud s'apprête à envoyer une délégation au Burundi, avec le Kenya, l'Ouganda et la Tanzanie pour "évaluer la situation et contribuer à une résolution pacifique de la situation actuelle", a rappelé Jacob Zuma. Cela doit se faire "dans les plus brefs délais", a-t-il dit.
Les manifestations reprennent
La semaine dernière, les chefs d'État de la Communauté est-africaine (EAC) en sommet à Dar es-Salaam avaient également appelé à un report des élections mais pas au-delà de la date d'échéance légale prévue pour l'actuel pouvoir.
Des législatives doivent en principe se tenir le 26 mai au Burundi avant la présidentielle un mois plus tard.
Au lendemain d'une mobilisation en demi-teinte, des dizaines, parfois même des centaines de jeunes ont manifesté dans plusieurs quartiers périphériques de la capitale, tentant d'installer des petites barricades de fortune au milieu des rues, au son des sifflets et des slogans hostiles au pouvoir.
Comme la veille également, les militaires déployés dans ces quartiers, hauts-lieux habituels depuis trois semaines de la contestation populaire contre la candidature du président Nkurunziza à un troisième mandat à l'élection présidentielle du 26 juin, ont tiré en l'air pour disperser les protestataires, mais sans grand résultat.
Ces tirs de sommation ont été entendus à Jabe, Cibitoke et Nyakabiga. Le plus souvent, les manifestants s'enfuient quelques instants quand résonnent les détonations, avant de se rassembler aussi vite et sourire en coin un peu plus loin sur la chaussée, a-t-on constaté.
A Musaga, près de 300 jeunes défilaient ainsi en trottinant en rythme cadencé sur une des rues du quartier: "ce qu'on fait là", explique Yvan, "c'est d'essayer de réveiller les gens, ils sont un peu fatigués mais ils veulent aller jusqu'au bout" pour obtenir que le président Nkurunziza (au pouvoir depuis 2005) retire sa candidature.
"Le nombre de gens diminue dans les rues car ils ont peur des balles réelles", a souligné Bernard, chômeur de 34 ans. Mais l'objectif affiché des manifestants reste de pénétrer jusqu'au centre-ville, "ce qui sera fait dans le courant de la semaine", a assuré à l'AFP une des figures du mouvement, Pacifique Nininahazwe.
Dans le centre de la capitale précisément, la circulation automobile comme l'activité reprenaient doucement, avec des magasins ouverts, des administrations apparemment en activité et quelques policiers ici et là devant les bâtiments officiels.
Comme la veille, ce sont essentiellement des militaires qui sont déployés dans les quartiers contestataires. Lundi, ces soldats, sans matériels de maintien de l'ordre, avaient géré avec difficulté des rassemblements allant de dizaines à quelques centaines d'individus, alors qu'ils intervenaient pour la première fois à la place de la police, accusée d'être aux ordres du pouvoir présidentiel.
Visiblement mal à l'aise, les militaires avaient fait usage de leurs armes pour des tirs de sommation mais n'avaient pas tiré sur la foule, malgré d'évidentes tensions dans leurs rangs sur l'attitude à adopter face aux manifestants.
Cinq jours après l'échec du coup d'Etat mené par un général et ex-compagnon d'armes du président Nkurunziza, ces incidents ont révélé au grand jour les divisions persistantes au sein de l'armée, jusqu'à présent louée par les manifestants pour sa neutralité, et qui avait refusé de prendre part à la répression.
"Pas de 'plan de vengeance"
Pour la première fois mardi, alors qu'elle jouissait jusqu'à présent d'une liberté totale de mouvement, la presse internationale s'est vue interdire l'accès d'un quartier contestataire, à Musaga, signe d'une nervosité grandissante du pouvoir envers ces médias, notamment accusés d'attiser par leur présence le zèle des manifestants.
Il ne reste aujourd'hui quasiment plus de presse privée au Burundi, où la scène médiatique étaient pourtant très active ces dernières années. Quatre radios privées ont été attaquées pendant le coup d'Etat pour avoir diffusé le message des officiers putschistes, et sont fermées aujourd'hui. Seule la radio télévision publique (RTNB) continuent d'émettre et ne relaie que le seul message présidentiel.
De nombreux journalistes, membres de la société civile et leaders du mouvement anti-troisième mandat vivent cachés par peur d'une arrestation ou des représailles des partisans du pouvoir.
Les autorités burundaises, qui ont lié le coup d'Etat du 13 mai aux manifestations de rue, exigent l'arrêt du "soulèvement" populaire et ont averti les manifestants qu'ils seront désormais "traités comme des putschistes".
La présidence a cependant adopté mardi un ton plus conciliant, affirmant que "le gouvernement ainsi que ses différents services n'ont et n'auront jamais de plan de 'vengeance'".
Les "personnes impliquées" dans le coup d’État "seront arrêtées et poursuivies par la justice, et uniquement par elle", selon la présidence. Une vingtaine de putschistes ont été arrêtés, mais le chef du complot, le général Godefroid Niyombare, est toujours en fuite, selon les autorités.
Lundi, le président Nkurunziza a limogé trois de ses ministres, dont les ministres de la Défense et celui des Relations extérieures, pour leur gestion des derniers évènements.
L'opposition politique reste muette, malgré l'ouverture de la campagne des élections communales et législatives du 26 mai qui seront suivies un mois plus tard de la présidentielle, dont la communauté internationale demande avec insistance le report.
Belga