Budget: muscles gonflés, foule d'idées mais aucune unanimité

Dessin de Kroll paru dans l'émission Mise au Point du 13/11/2011.

© Kroll - RTBF

S’ils sont conscients de la difficulté de la tâche qui attend Elio Di Rupo et les négociateurs réunis autour de la table, les invités de Mise au Point semblent pourtant optimistes. "Ce sera difficile mais il est clair que ce n’est pas pour cela que nous ne réussirons pas. Et je suis persuadé que nous réussirons. Nous sommes obligés de réussir, sous peine de devoir subir des diktats venant d’ailleurs", glisse ainsi le président de la Chambre André Flahaut (PS). "On va trouver une solution car toute l’Europe nous regarde", renchérit Olivier Chastel (MR). Le sénateur libéral flamand Rik Daems, qui regrette que la note d’Elio Di Rupo ne respecte pas les six recommandations européennes, souligne que "l’exercice est faisable".

Faisable, oui, mais comment ? Durant toute l’émission, gauche et droite, syndicats et patronat défendent leurs idées. Et pulvérisent les propositions de leurs adversaires. Et ce, malgré l’appel de la sénatrice Vanessa Matz (cdH) à mettre d’urgence sur le côté ses a priori idéologiques.

Diminuer les salaires des élus: -5%, -10% ou -40%?

Première piste mise sur la table ce dimanche midi : le salaire des ministres et élus. Une diminution de 5% des rémunérations est évoquée dans la note. "Il est normal que les élus et ministres participent à cet effort", glisse le président de la Chambre. "Nous sommes ouverts à la discussion", confirme Olivier Chastel. "Si ce gouvernement veut décider de réduire le salaire de ses ministres de 10% ou de 15%, ce n’est pas un problème."

Olivier Deleuze, lui, prend la chose avec le sourire. "Sachez que chez Ecolo, que l’on soit ministre ou parlementaire, on rétrocède 40% de ce qu’on gagne. Par conséquent, nous n’aurions pas de problème avec une diminution de 5%, ce serait encore 35% de moins que ce que l’on fait aujourd’hui."

Mais cette mesure, toute symbolique soit-elle, ne suffira pas à remplir les caisses de l’État et à consolider le budget 2012.

Indexation: pas de suppression mais une nette modification

"Sombrer trop vite dans des mesures qui tombent sur nos concitoyens, c’est mettre en péril l’équilibre de l’État pour les prochaines années", avance Olivier Chastel. "Si aujourd’hui le réflexe primaire est de dire qu’on augmente les titres-services, on taxe les voitures de sociétés, …, que ferons-nous dans l’élaboration du budget en 2013 ou en 2014 quand il ne faudra pas trouver 11 milliards mais 20 ou 25 milliards ?"

L’autre invité libéral, le flamand Rik Daems, revient, lui, sur le rapport du Conseil Central de l'Économie, selon lequel les salaires belges augmentent plus vite que ceux des pays voisins. "Ce sont surtout les coûts salariaux qui augmentent plus", estime-t-il. Et de plaider pour l’ouverture rapide d’un débat sur l’indexation automatique des salaires.

"Il ne faut pas forcément supprimer mais il faut moderniser, modifier ce système qui a des effets pervers", explique Pieter Timmermans (FEB).

Tirs groupés de la FGTB et d'Ecolo

Un point de vue que ne partage évidemment pas la secrétaire générale de la FGTB. "On ne touche pas à l’index", martèle Anne Demelenne, qui propose une autre "cible". "On constate que ceux qui sont responsables de ce déficit, à l’heure actuelle, au niveau de nos finances publiques, on les laisse totalement tranquilles. Je parle du monde de la Finance, je parle des banques. Eux, on les met devant leurs responsabilités depuis des années, en leur demandant de séparer leurs activités banque d’épargne et banque d’investissements mais rien ne se fait. On parle d’une taxe sur les transactions financières depuis des mois et des mois mais rien n’est mis en exécution."

Olivier Deleuze souhaite également s’attaquer à la toute-puissance des banques, "celles qui nous ont mis dans une situation noire".

Et tout comme Anne Demelenne, Olivier Deleuze estime ensuite qu’il est temps de s’attaquer aux coûts énergétiques. "Nos entreprises, au cours des dernières années, ont vu la quantité de matières premières et d’énergie qu’elles consomment augmenter bien plus fort que les coûts salariaux", pointe le chef de groupe Ecolo à la Chambre. "La compétitivité des entreprises et le coût de production sont davantage affectés, et de plus en plus, par la consommation des matières premières et de l’énergie que par l’augmentation des salaires." Et l’écologiste de glisser au passage que "si le prochain ministre des Finances pouvait ne plus être un libéral, ce serait peut-être un signal positif pour la population".

Taxer: oui, mais qui?

Christophe Wambersie, secrétaire général de l’Union des Classes Moyennes, y va également de sa proposition : "Il faut voir comment on peut alléger la pression fiscale et sociale sur les entreprises et particulièrement sur les petites et moyennes entreprises. La mesure qui est de dire 'suppression des cotisations patronales sur les trois premiers emplois', c’est une mesure fondamentale. (…) Cela crée de l’emploi, cela crée des cotisations sociales, cela crée de l’impôt. Et ça diminue le chômage."

Le chapitre "Fiscalité de l’épargne et taxation du capital" de la note du formateur divise également les invités. "On est inquiets de lire dans la note d’Elio Di Rupo qu’il veut trouver deux milliards d’euros sur l’épargne", lance Olivier Chastel. "Toucher à l’épargne des familles, de celles et ceux qui ont mis de côté un peu d’argent par le fruit de leur travail, déjà lourdement taxé, c’est niet."

Dans un froncement de sourcils, André Flahaut rejette "cette accusation reposant sur un procès d’intention". "Dans la note du formateur, il n’est nullement question de frapper les petits épargnants", assure le socialiste. Qui préfère s’en prendre à ceux qui ont de "très grosses" fortunes.

"Pas de date limite"

Reprenant la parole, Anne Demelenne explique qu’on peut aisément trouver plusieurs milliards. Son secret ? Rétablir les tranches d’imposition, taxer les revenus financiers au même titre que les revenus du travail, améliorer la lutte contre la fraude fiscale et supprimer les intérêts notionnels et les cadeaux aux entreprises.

Voulant apparemment mettre le feu au plateau, Rik Daems glisse qu’il serait peut-être temps de revoir tout le système de la sécurité sociale. Et d’enchaîner : "Est-ce que les syndicats sont d’accord de diminuer leurs frais ?" "Une attaque injustifiée", rétorque Anne Demelenne.

Le budget, initialement attendu pour ce dimanche soir, pourrait ne pas être bouclé avant le milieu de la semaine. "Ne fixez pas de date limite", prévient André Flahaut. "Il vaut mieux avoir un bon budget, soutenu par une solide majorité, que de faire de l’improvisation."

PIAB

 

Olivier Maroy et Thomas Gadisseux recevaient ce dimanche midi : André Flahaut, PS, président de la Chambre ; Olivier Chastel, MR, ministre fédéral ; Vanessa Matz, sénatrice cdH ; Olivier Olivier Deleuze, chef de groupe Ecolo à la Chambre ; Rik Daems, Open-VLD, sénateur ; Anne Demelenne, secrétaire générale de la FGTB ; Pieter Timmermans, directeur général de la FEB ; Christophe Wambersie, secrétaire général de l'Union des Classes Moyennes.

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