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Bruxelles : l’acquittement plaidé pour deux gardiens et une gardienne de prison

© Belga – Une photo d’illustration

Me Sven Mary a plaidé, mercredi après-midi, devant la cour d’appel de Bruxelles, l’acquittement pour ses trois clients, qui figurent parmi quatorze gardiens de la prison de Forest prévenus pour traitement dégradant. Ceux-ci sont soupçonnés d’avoir abusé de leur autorité sur des détenus, entre 2014 et 2015, pour les martyriser, les pousser à bout et leur infliger des sévices.

"Il faudrait savoir ce que c’est qu’une prison pour avoir la prétention d’analyser tout ce dossier", a souligné Me Mary. "Travailler à la prison de Forest à l’époque, c’était les insultes, la puanteur absolue, les seaux de pisse… Et ça n’a pas vraiment évolué. Il faut parler des conditions de travail qu’étaient celles des prévenus, ces hommes et ces femmes à qui on a laissé gérer par deux des centaines de détenus, empilés dans la merde et qui ne sortaient de leurs trois m² qu'une heure par jour. C’est un milieu de travail déshumanisé dont, finalement, même nous les avocats ne savons pas grand-chose", a dit l’avocat.

"La Belgique a été condamnée à des dizaines de reprises pour des traitements inhumains et dégradants sur les détenus de cette prison de Forest. C’est celle qui a connu le plus de grèves parce que les gardiens réclamaient de meilleures conditions de travail. L’État belge, que représente ici l’avocat général, devrait donc être à tout le moins modeste. La question de la légitimité du ministère public se pose selon moi. Il est à la fois juge et partie. Juridiquement, ça me pétrifie", a lancé le pénaliste.

Individualiser les dossiers

Me Mary a plaidé l’acquittement pour les trois agents pénitentiaires qu’il représente, deux hommes et une femme, en demandant à la Cour de tenir compte de plusieurs critères, à commencer donc par les conditions de travail à la prison de Forest. Il a également demandé de retenir le "milieu professionnel unique" d’une prison de manière générale, le "manque de formation" des prévenus, et la circonstance qu’il s’est agi de "faits isolés".

Il a en outre plaidé pour que la Cour individualise les dossiers des prévenus, et donc de ne pas faire de "tir groupé" comme s’il s’était agi d’une organisation rodée de "tortionnaires", mais aussi de prendre en considération la relative ancienneté des faits et les conséquences professionnelles, sociales et financières que subissent les prévenus depuis le jugement de première instance.

Quatorze gardiens de la prison de Forest doivent répondre de faits de violence physique et morale grave à l’encontre de détenus, entre 2014 et 2015, commis principalement dans l’aile D et dans l’annexe psychiatrique. La situation dans cet établissement pénitentiaire était alors extrêmement problématique, en raison d’une surpopulation carcérale, d’un manque de personnel et d’une infrastructure vétuste.

Il est question d’expéditions punitives qui étaient menées le soir, particulièrement auprès de détenus fragiles et isolés. Plusieurs agents auraient considéré comme un jeu le fait d’insulter, d’humilier ou de provoquer des détenus, pour que ceux-ci soient poussés à bout et se montrent agressifs, amenant alors les gardiens à les conduire au "cachot", la cellule d’isolement. Les auteurs auraient ensuite dressé de faux rapports disciplinaires pour justifier l’usage de la force.

Une attachée à la direction de la prison est également poursuivie dans ce procès, non pas pour avoir directement exercé un traitement dégradant à l’encontre de détenus, mais pour avoir pris la décision de placer à l’isolement un détenu qui se trouvait dans un état mental très inquiétant.

Les plaidoiries se poursuivront vendredi.

 

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