Monde Amérique du Sud

Brésil : 1.200 partisans de Bolsonaro interpellés après la tentative de coup d’État au Brésil

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Par Marie-Laure Mathot, Anne Poncelet avec AFP

Quelque 1.200 partisans de l'ancien président brésilien d'extrême droite, Jair Bolsonaro, ont été interpellés après l'assaut mené dimanche contre les principales institutions démocratiques du pays, dans la capitale Brasilia.

Les forces de l'ordre ont terminé lundi l'évacuation du camp de militants pro-Bolsonaro dressé depuis des semaines devant le quartier général des forces armées à Brasilia pour contester les résultats de l'élection présidentielle, remportée par le candidat de gauche Luiz Inacio Lula da Silva.

Une quarantaine de bus affrétés par le gouvernement ont emmené les derniers "campeurs" au commissariat de police, après une décision judiciaire rendue la veille, ordonnant le démantèlement du camp dans les 24 heures, selon le média brésilien G1.

Après plusieurs heures de chaos, les forces de l'ordre brésiliennes ont repris le contrôle du Palais présidentiel, du Congrès et de la Cour suprême envahis dimanche par des centaines de manifestants anti-Lula, selon le ministre de la Justice et de la Sécurité Flavio Dino.

"Les putschistes qui ont promu la destruction des propriétés publiques à Brasilia sont en train d'être identifiés et seront punis. Demain nous reprenons le travail au palais de Planalto. Démocratie toujours", a tweeté le président de gauche, qui a inspecté les bâtiments saccagés à son retour à Brasilia tard dimanche soir.

Le parquet général a demandé l’ouverture immédiate d’investigations pour établir "la responsabilité des personnes impliquées" dans l’attaque des bâtiments officiels.

Le gouverneur de Brasilia, Ibaneis Rocha, a été suspendu de ses fonctions dimanche soir, une décision prononcée par la Cour Suprême, et ce pour une durée de 90 jours. 

Des partisans de l’ancien président brésilien Jair Bolsonaro organisent une manifestation sur l’Esplanada dos Ministerios à Brasilia, le 8 janvier 2023.
Des partisans de l’ancien président brésilien Jair Bolsonaro organisent une manifestation sur l’Esplanada dos Ministerios à Brasilia, le 8 janvier 2023. © EVARISTO SA / AFP

La réaction de Bolsonaro

L’ex-président brésilien Jair Bolsonaro a estimé sur Twitter que "les déprédations et invasions de bâtiments publics […] sont contraires à la règle" régissant les "manifestations pacifiques".

Dans un autre tweet, Jair Bolsonaro, qui se trouve aux États-Unis, a cependant "rejeté les accusations, sans preuve" de son successeur Lula, qui a déclaré que le "discours" de son prédécesseur d’extrême droite avait "encouragé" les "vandales fascistes" ayant envahi les lieux de pouvoir de Brasilia.

Jair Bolsonaro, qui n’a jamais félicité Lula de sa victoire et a boudé son investiture, a quitté le Brésil deux jours avant la fin de son mandat et se trouve en Floride, aux Etats-Unis.

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Une policière effectue des inspections au Palacio do Planalto (le lieu de travail officiel du président du Brésil) après une manifestation des partisans de l'ancien président brésilien Jair Bolsonaro contre le président Luiz Inacio Lula da Silva, à Brasil
Une policière effectue des inspections au Palacio do Planalto (le lieu de travail officiel du président du Brésil) après une manifestation des partisans de l'ancien président brésilien Jair Bolsonaro contre le président Luiz Inacio Lula da Silva, à Brasil © 2023 Anadolu Agency/ GETTY

Lula condamne l’invasion de "vandales fascistes"

Lula, 77 ans, était absent de Brasilia dimanche : il s’est rendu à Araraquara, ville de l’Etat de Sao Paulo (sud-est) dévastée par des inondations en fin d’année.

Le président brésilien a condamné l’invasion des lieux de pouvoir à Brasilia par des "vandales fascistes" et a décrété une "intervention fédérale" sur les forces de l’ordre pour reprendre en main la sécurité de la capitale.

"Nous allons tous les retrouver et ils seront tous punis", a déclaré au sujet des bolsonaristes responsables de saccages Lula, investi président il y a seulement une semaine, depuis Araraquara, dans l’Etat de Sao Paulo.

Brésil : attaques des institutions gouvernementales à Brazilila

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Ce lundi, le président brésilien, avec les chefs du Congrès et de la Cour suprême, a condamné lundi "les actes terroristes" de Brasilia la veille dans une déclaration commune "en défense de la démocratie" publiée sur le compte Twitter du chef de l'Etat de gauche.

"Les Pouvoirs de la République, garants de la démocratie et de la Constitution de 1988 rejettent les actes terroristes, de vandalisme, criminels et putschistes qui se sont produits hier à Brasilia", dit la déclaration signée par Lula et les présidents du Sénat, de la Chambre des députés et de la Cour suprême, au lendemain des assauts simultanés de bolsonaristes contre les bâtiments de ces institutions.

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Les réactions dans le monde

Le chancelier allemand Olaf Scholz a vivement condamné lundi l’intrusion dans les lieux de pouvoir de Brasilia de partisans de l’ex-président Jair Bolsonaro, évoquant une "attaque intolérable" contre la démocratie.

La Chine "s’oppose fermement à l’attaque violente" contre les lieux de pouvoir au Brésil, pris d’assaut dimanche par des partisans de l’ex-président d’extrême droite Jair Bolsonaro, a déclaré lundi un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Le président américain Joe Biden, son homologue mexicain Andrés Manuel Lopez Obrador et le Premier ministre canadien Justin Trudeau ont assuré le président Lula de leur soutien dans un communiqué commun, après l'attaque des lieux de pouvoir au Brésil par des partisans de Jair Bolsonaro.

"Le Canada, le Mexique et les Etats-Unis condamnent les attaques du 8 janvier contre la démocratie brésilienne et contre un transfert pacifique du pouvoir", selon ce texte diffusé par la Maison Blanche. "Nous sommes aux côtés du Brésil pendant qu'il défend ses institutions démocratiques" et "nous sommes impatients de travailler avec le président Lula afin d'obtenir des résultats pour nos pays, pour le continent américain et au-delà", ajoutent les trois dirigeants, qui se retrouvent à Mexico lundi et mardi pour une rencontre diplomatique.

"Les fascistes chercheront toujours à prendre par la force ce qu’ils n’ont pas obtenu dans les urnes", a déclaré sur Twitter le président bolivien Luis Arce.Le dirigeant vénézuélien Nicolas Maduro a condamné "de manière catégorique la violence générée par les groupes néofascistes de Bolsonaro".

La présidente du Parlement européen Roberta Metsola s’est dite "profondément préocupée". "La démocratie doit toujours être respectée", a-t-elle tweeté en portugais.

Le Kremlin a condamné lundi l'intrusion dans des lieux de pouvoir au Brésil de partisans de l'ex-président brésilien Jair Bolsonaro et a affirmé "soutenir pleinement" le dirigeant actuel Luiz Inacio Lula da Silva."

Supporters of former Brazilian President Jair Bolsonaro storm governmental buildings
Supporters of former Brazilian President Jair Bolsonaro storm governmental buildings © 2023 Anadolu Agency

Brasilia était plongée dans le chaos dimanche, après l’invasion du palais présidentiel, de la Cour suprême et du Congrès par des centaines de partisans de l’ex-président d’extrême droite Jair Bolsonaro, une semaine après l’investiture du président de gauche Lula dont ils refusent l’élection.

Une véritable marée humaine de manifestants vêtus de jaune et vert a pris d’assaut et saccagé les principaux lieux de pouvoir du pays à Brasilia. Les forces de l’ordre ont été complètement débordées, a constaté l’AFP, des images impressionnantes qui rappellent l’invasion du Capitole à Washington par des partisans de l’ex-président Donald Trump, en janvier 2021.

Des partisans de l’ancien président brésilien Jair Bolsonaro s’affrontent avec la police lors d’une manifestation devant le palais du Planalto à Brasilia, le 8 janvier 2023.
Des partisans de l’ancien président brésilien Jair Bolsonaro s’affrontent avec la police lors d’une manifestation devant le palais du Planalto à Brasilia, le 8 janvier 2023. © EVARISTO SA / AFP

Sur la rampe du palais de Planalto, où Luiz Inacio Lula da Silva a reçu l’écharpe présidentielle dimanche dernier, des policiers à cheval tentaient tant bien que mal de déloger les manifestants.

Au milieu de la place des Trois pouvoirs, où se côtoient le Congrès, le palais présidentiel et la Cour suprême, un agent de la police montée a été désarçonné puis frappé à terre par des assaillants armés de bâtons.

Des grenades assourdissantes ont été lancées par les forces de l’ordre depuis un hélicoptère sur les manifestants qui occupaient le toit du Congrès.

Sur les réseaux sociaux, on peut voir des vidéos montrant des bureaux de parlementaires saccagés ou des manifestants debout sur les sièges de l’hémicycle au Sénat.

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L’un d’eux s’est assis sur le siège du président de la Chambre haute, un mimétisme saisissant avec les manifestants pro-Trump au Congrès américain il y a deux ans.

Les dégâts semblent considérables, dans ces bâtiments qui sont des trésors de l’architecture moderne et regorgent d’œuvres d’art.

Selon la chaîne CNN, des manifestants ont mis le feu au tapis d’un salon du Congrès, qui a dû être inondé pour éteindre l’incendie.

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La police brésilienne a utilisé des bombes lacrymogènes pour tenter de repousser les centaines de partisans de l’ex-président d’extrême droite Jair Bolsonaro qui ont envahi l’extérieur du Congrès à Brasilia, une semaine après l’investiture du président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, a constaté un photographe de l’AFP.

Les médias locaux estiment à environ 3000 le nombre de personnes présentes lors de ces incidents.

Des partisans de l’ex-président brésilien Jair Bolsonaro ont réussi à entrer et à monter sur le toit du Congrès national.
Des partisans de l’ex-président brésilien Jair Bolsonaro ont réussi à entrer et à monter sur le toit du Congrès national. © EVARISTO SA / AFP

Certains policiers n’empêchent pas les manifestants d’entrer

Malgré les gaz lacrymogènes lancés autour du Congrès à Brasilia, certains policiers semblent inactifs volontairement devant la Cour suprême, rapporte notre correspondante au Brésil, Anne Vigna.

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Elle décrit la facilité avec laquelle les manifestants sont entrés dans ces trois lieux de pouvoirs.

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Journalistes agressés

"Cette tentative absurde d’imposer une volonté par la force ne va pas prévaloir. Le gouvernement du District fédéral (de Brasilia) va envoyer des renforts et les forces dont nous disposons sont en train d’agir", a déclaré sur Twitter Flavio Dino, ministre de la Justice et de la Sécurité publique.

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Samedi, M. Dino avait autorisé le déploiement d’agents de la Force Nationale, une force spéciale de police parfois envoyée dans les différents Etats en cas de menace contre la loi et l’ordre.

Le président du Sénat, Rodrigo Pacheco, a dit sur Twitter "rejeter avec véhémence cette manifestation antidémocratique, qui doit être punie par la rigueur de la loi".

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Un syndicat de presse local a fait état de l’agression de cinq journalistes. Parmi eux, un photographe de l’AFP a été frappé et s’est fait voler tout son matériel.

"Il faut qu’on rétablisse l’ordre, après cette élection frauduleuse", a dit à un journaliste de l’AFP présent sur place Sarah Lima, ingénieure pro-bolsonaro de 27 ans venue de Goianesia, à 300 km de Brasilia.

Des bolsonaristes manifestaient déjà devant des casernes militaires depuis la défaite de peu du président sortant d’extrême droite face à Lula le 30 octobre.

Ils réclamaient l’intervention de l’armée pour empêcher ce dernier de revenir au pouvoir pour un troisième mandat, après ceux de 2003 à 2010. Certains d’entre eux ont également bloqué des axes routiers pendant plus d’une semaine après l’élection.

L’investiture de Lula s’est déroulée le 1er janvier à Brasilia sans incident majeur, en présence de dizaines de milliers de ses partisans.

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