Comme l’explique Patrick Slaets, l’une des raisons de ces pénuries est les problèmes dans la chaîne logistique, dus à la reprise soudaine de l’activité économique au niveau mondial. "A cause du Covid, l’économie s’est arrêtée, tous les conteneurs se retrouvant à l’arrêt eux aussi. Tout d’un coup, l’économie doit redémarrer, et cela prend des mois pour remettre tout en ordre. En conséquence, les prix de la logistique ont fortement augmenté et les transporteurs attendent une baisse de ces prix, qui n’est pas encore arrivée. Cela a un impact sur les chaînes d’approvisionnement. À côté de cela les acheteurs ont acheté par panique ou, au contraire, ont attendu trop longtemps, ce qui pose des problèmes dans les deux cas."
Le Covid-19 a également joué un impact direct sur la production, notamment en Asie : "15% des semi-conducteurs passent par la Malaisie, qui a été fermée d’un jour à l’autre à cause d’une hausse des cas de Covid. Globalement, les chaînes d’approvisionnement ont toutes été perturbées. En Chine, pour des objectifs de neutralité CO2 et pour des problèmes de diminution d’utilisation d’énergie, il y a aussi eu des fermetures de fabriques de magnésium, matière première essentielle dans la production d’aluminium".
Pour Didier Van Caillie également, les pénuries actuelles sont une conséquence directe de la crise sanitaire : "Pendant la pandémie, les pouvoirs publics ont gelé l’économie, c’est-à-dire que les entreprises ont arrêté de produire, et ont pris dans leurs stocks pour répondre à la demande restante. Puis la crise a commencé à ralentir, et la demande est repartie très vite : la réouverture du robinet de l’économie s’est faite un peu trop rapidement. Les prix augmentent pour les fournisseurs et cela se répercute en cascade, c’est la boucle de l’inflation".
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Plus spécifique à la Belgique, le pays connaît aussi une pénurie de main-d’œuvre qui atteint des niveaux records. "Ce sont particulièrement les profils techniques, scientifiques ou encore digitaux qui viennent à manquer, même si tous les secteurs sont touchés." Les causes ? "La hausse de la demande due à la croissance économique, l’automatisation et la robotisation qui nécessitent de nouvelles qualifications, couplées à la stagnation de la population active", précise Patrick Slaets. Avec pour conséquence l’augmentation des délais et des prix pour faire appel à certains services.
Egalement dans l’actualité, on peut épingler la situation spécifique au Royaume-Uni, marquée par de fortes pénuries. Dans le secteur alimentaire comme pour le carburant, le pays connaît de nombreux problèmes d’approvisionnement. La cause principale : le manque de chauffeurs routiers. Avec la crise sanitaire, beaucoup de chauffeurs étrangers ne sont pas retournés au Royaume-Uni, de même que la formation des nouveaux chauffeurs a été mise à mal par les périodes de confinement, comme l’expliquent nos confrères des Echos. Enfin, le Brexit n’a pas amélioré la situation, compliquant l’arrivée des chauffeurs sur le territoire anglais.
Les situations de pénuries créent aussi des effets de spéculation économique, eux bien réels. "Si les négociateurs et commerçants s’attendent à une augmentation des prix, ils vont être hésitants à vendre leurs stocks. Au contraire s’ils s’attendent à une diminution, ils vont chercher à vider leur stock rapidement. C’est un mouvement spéculatif qui existe pour toutes les matières premières." Pas de complot là non plus, mais "quelque chose qui existe depuis toujours et qui est le fait de décisions individuelles, mais qui peuvent jouer un rôle dans les délais d’approvisionnement", conclut Patrick Slaets.