Ces dernières années, on connaissait plus Spike Lee pour son activisme politique que pour son cinéma. En mai dernier, il revenait en compétition au Festival de Cannes avec "Blackkklansman", couronné par le Grand Prix du Jury.
Le film s’inspire d’une histoire vraie, celle de Ron Stallworth. Dans les années 70 aux Etats-Unis, alors que la lutte pour les droits civiques de la communauté noire bat son plein, Ron devient le premier officier de police afro-américain dans un commissariat du Colorado. Accueilli avec méfiance par ses collègues, Stallworth va oser un étonnant pari : réussir à s’infiltrer dans les rangs du Ku Klux Klan. Au téléphone, son stratagème fonctionne à merveille ; il ne lui reste plus qu’à convaincre un policier blanc de lui servir de doublure lorsqu’il s’agit d’assister aux réunions du KKK…
Spike Lee a choisi de raconter cette étonnante histoire avec une bonne dose d’humour caustique. Mais même si son film adopte souvent un ton désinvolte et ironique, Lee n’oublie pas d’épingler toutes les outrances du Klan, et de montrer combien les discours de son leader David Duke ("America first") ressemblent à s’y méprendre aux slogans de campagne de Donald Trump. En guise d’épilogue, Spike Lee fait un raccourci spatio-temporel et ajoute des images, non fictionnelles celles-là, des émeutes de Charlottesville d’août 2017, où s’affrontèrent suprémacistes blancs et manifestants anti-racistes. Épilogue qui dénote dans "Blackkklansman", mais qui montre la rage de Spike Lee face aux compromissions de Trump face au KKK.
Efficace mais de facture très classique, "Blackkklansman" méritait-il le deuxième prix, juste derrière la Palme d’or, à Cannes ? Sans doute pas, mais il fallait couronner un cinéaste militant, injustement oublié au palmarès en 1989 avec "Do the right thing" …