C’est indéniable, les biopics ont le vent en poupe. Après le tant attendu « Bohemian Rhapsody » retraçant la fabuleuse carrière du groupe Queen et de son charismatique leader Freddie Mercury, et en attendant « Rocket Man », le film qui mettra à l’honneur Sir Elton John, j’ai eu l’occasion de me rendre à l’avant-première de « The Dirt », biopic des enfants terribles de la scène glam rock du sunset strip : Mötley Crüe.
C’est à Amsterdam, au « Bro20 », un bar tenu par le bassiste du groupe de métal brésilien Sepultura, que la maison de disques nous a donné rendez-vous afin d’assister à la projection d’un film qui aura mis 18 ans à voir le jour. En effet, les membres du groupe avaient publié, en 2001, une passionnante autobiographie : « The Dirt : Confessions of the World’s Most Notorious Rock Band ».
Très rapidement, les musiciens et leur manager seront approchés par différents réalisateurs désireux de donner vie à l’histoire de Mötley Crüe sur grand écran. Voulant proposer une immersion authentique et non censurée dans l’univers excessif du groupe, il faudra attendre qu’un deal soit conclu avec la plateforme de streaming Netflix pour que le livre soit adapté en un film coproduit par les quatre rockstars.
Les lumières du bar s’éteignent, l’écran s’allume, nous sommes tous impatients d’embarquer dans le récit du groupe le plus ingérable de tous les temps. Une succession de courts extraits télévisuels nous plonge immédiatement dans la période durant laquelle le rock régnait sur le monde : les années 1980. Nikki Sixx, membre fondateur de Mötley Crüe est incarné par le talentueux Douglas Booth. En voix off et sur fond visuel d’une fête passée du statut de beuverie à celui d’orgie, le bassiste nous présente ses trois acolytes : le batteur Tommy Lee, joué par le rappeur américain Machine Gun Kelly, le guitariste Mick Mars dont le rôle est confié au musicien et acteur Iwan Rheon – l’infâme Ramsay Bolton dans la série fantastique Game Of Thrones – et enfin Vince Neil, chanteur charismatique de la formation, incarné ici par Daniel Webber.
« The Dirt » retrace en toute honnêteté l’histoire de Mötley Crüe, de leurs débuts en 1981 à leur tournée d’adieu, il y a maintenant 4 ans. Le film raconte surtout l’histoire de quatre jeunes aux histoires familiales très différentes les unes des autres, quatre garçons avides de liberté et de reconnaissance, quatre garçons qui deviennent, petit à petit, une famille soudée. La narration passe sans cesse d’un membre du groupe à l’autre, et ces derniers n’hésitent jamais à briser le quatrième mur, arrêtant un court instant le déroulé de l’histoire pour se tourner face à la caméra, mettre certains éléments dans leur contexte sans jamais manquer d’y ajouter une pointe d’humour. Les membres de Mötley Crüe ont des regrets dont ils ne se sont jamais cachés et le biopic ne fait pas défaut à ce constat. Durant la première demi-heure de la projection, nous étions tous en train d’envier les jeunes musiciens représentés à l’écran. Musique, fête, alcool, sexe, drogues, sexe, alcool, musique,… L’état d’esprit de conquérants des quatre jeunes rockstars est remarquable. « The Dirt » nous montre un groupe désireux de casser les codes et d’apporter un souffle nouveau à la scène musicale de l’époque. Mais ce sentiment d’admiration laisse vite place à la pitié car – heureusement – les périodes sombres de l’histoire de Mötley Crüe sont bien présentes : overdoses d’héroïne pour Nikki Sixx, douleurs et train de vie effréné pour le guitariste Mick Mars, atteint d’une maladie inflammatoire chronique touchant ses articulations, relations désastreuses pour Tommy Lee et enfin, véritable descente aux enfers pour le chanteur Vince Neil. Ce dernier sera responsable de la mort de son ami Nicholas « Razzle » Dingley, batteur du groupe Hanoi Rocks, des suites d’un violent accident de voiture dans lequel le chanteur conduisait, ivre.
Ensuite, après sa sortie de prison, nous assistons aux tensions présentes au sein d’un groupe totalement déphasé ainsi qu’à la tragique disparition de la jeune fille de Vince Neil, des suites d’un virulent cancer. Tant d’éléments qui mèneront au départ du chanteur, en 1992. Cures de désintoxications pour certains, longs séjours hospitaliers pour d’autres, le film se termine avec le retour et la réconciliation, en 1997 des quatre musiciens au parcours hors norme.
Que l’on soit un fan absolu ou que l’on ignore totalement l’existence de Mötley Crüe, « The Dirt » est un biopic brillamment mis en images et formidablement équilibré tant il nous fait passer du rire aux larmes. Une chose est certaine, lorsque nous sommes sortis de ce bar en plein cœur d’Amsterdam, nous avions tous en tête les plus grands hits du groupe le plus redoutable de Los Angeles.