Baisse des frais de notaires : un bénéfice d’environ 1.000 euros pour l’acheteur immobilier

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Par Eric Boever

C’est la bonne nouvelle du jour, les frais de notaires vont baisser dès 2023 ! C’est sans doute le principal point qu’on retiendra de la vaste réforme de la profession notariale qui sera présentée vendredi à ses collègues du gouvernement par le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne. On parle d’une baisse de 25%, mais 25% de quoi, c’est là toute la question. Car l’expression frais de notaires recouvre toute une série de dépenses qui ne sont pas nécessairement liées à son activité.

En clair, une bonne part de ce qu’un nouveau propriétaire paie file dans les poches de l’Etat au titre de taxes diverses. La part des honoraires et des véritables frais de notaires ne représente qu’une petite partie de la facture. Or, c’est cela et uniquement cela qui va baisser dès 2023, ce qui réduit un peu la portée de la bonne nouvelle annoncée par le ministre.

Les frais de notaires : des frais, des honoraires mais surtout des taxes !

Commençons par le début : que recouvrent ce qu’on appelle communément les frais de notaires ? Réponse de Sébastien Procureur, porte-parole de la Fédération du Notariat (Fednot) : " Les frais de notaires comprennent bien sûr les honoraires du notaire, autrement dit sa rémunération en tant que travailleur indépendant, mais ils comprennent aussi une série de frais administratifs liés aux démarches de recherche, d’actes, des certificats ou de crédit, et puis il y a les frais d’enregistrement qui sont en fait des taxes. Mais là, ce ne sont pas des frais de notaires à proprement parler, même si on les désigne comme tels dans le langage courant. "

Ce dernier poste représente de loin la plus grosse part de la facture mais le notaire n’en touche pas un centime, il agit dans ce cas comme collecteur d’impôt pour le compte des pouvoirs publics, en l’occurrence les régions depuis la régionalisation des droits d’enregistrement. Or, cette part de taxes ne changera pas en 2023. La réforme annoncée par le ministre de la Justice concerne la profession de notaire mais il ne s’agit pas d’une réforme fiscale.

Combien l’acheteur paiera-t-il en moins dès 2023 ?

La réforme annoncée était fort attendue. L’an dernier, une étude de l’Observatoire des prix estimait que les tarifs pratiqués par les notaires étaient trop souvent exagérés et obscurs. En chiffres, cela donne une augmentation de près de 66% des honoraires moyens pour les ventes immobilières résidentielles entre 2000 et 2019, soit une évolution plus rapide que l’inflation et que l’indice santé.

Cela va donc changer puisque la prochaine réforme prévoit de réduire les honoraires et les frais fixes, tout en garantissant au consommateur une facture transparente détaillant la ventilation des frais notariaux.

Concrètement, pour l’achat d’un logement par un particulier, les frais administratifs seront limités à un forfait de 750 euros pour l’acte d’achat et 550 euros pour l’acte de crédit. Le total ne dépassera donc pas 1.300 euros, là où la facture pouvait parfois grimper jusqu’à 2.000 euros puisque ces frais n’étaient pas encadrés. En clair, chaque notaire avait sa propre tarification, c’est désormais le même forfait pour tous.

Les honoraires, eux, seront réduits pour l’achat d’un logement familial dans lequel on va habiter, ce qui exclut les investissements ou les secondes résidences. La réforme prévoit une baisse progressive des honoraires allant de 25 à 12% en fonction du prix d’achat mais avec un plafond de 750.000 euros. Si le bien est plus cher, le prix des frais ne diminuera plus, au contraire.

En clair, celui qui achète une habitation qui coûte de 150.000 à 300.000 euros, paiera en moyenne 1.000 euros de moins pour l’achat et le financement. Pour les logements entre 300.000 et 750.000 euros, la réduction diminuera progressivement. Au-delà de 800.000 euros, les notaires pourront augmenter leurs honoraires pour compenser le recul enregistré sur les biens moins chers.

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98% des achats de logements seront moins chers et plus transparents

On s’en doute, les notaires n’ont pas fait des bonds de joie en apprenant la réforme. Pour Jan Sap, directeur général de la Fédération du Notariat (Fednot) " cette réduction des honoraires et des frais implique un effort considérable de la part des études notariales, surtout les petites études situées dans les zones où les prix de l’immobilier sont les plus bas. Afin d’éviter que plusieurs études ne se retrouvent en difficulté, nous allons mettre en place un mécanisme de solidarité interne. De cette façon, l’impact sera réparti sur toutes les études du pays."

Mais il concède que la réforme était justifiée. " Travailler avec un montant fixe pour les coûts est plus transparent et plus clair. L’achat et le financement d’une habitation deviendront un petit peu moins chers et l’on saura immédiatement à combien s’élèveront les coûts. La facture sera mieux détaillée avec des rubriques distinctes. Nous estimons que les acheteurs pourront compter sur cette réduction dans 98% des ventes et des crédits, pour autant qu’il s’agisse de leur unique habitation dans notre pays."

A noter que ces réductions ne s’appliquent que si l’acheteur est une personne physique. Elle ne concerne donc pas les entreprises. Les nouveaux tarifs s’appliquent tant aux ventes à l’amiable qu’aux ventes publiques. Elles sont également valables pour les maisons kangourou et les colocations. Le nouveau règlement est applicable à partir du 1er janvier 2023.

A côté de l’immobilier, le prix des actes familiaux sera aussi clarifié

La réforme présentée vendredi au conseil des ministres ne concerne pas que l’immobilier. Les actes tels que le mandat de protection extrajudiciaire, le règlement de succession ou l’acceptation d’un héritage sous bénéfice d’inventaire, ces actes n’étaient jusqu’à présent soumis à aucune tarification officielle, ce qui permettait au notaire de demander le prix qu’il désirait. Désormais, un honoraire fixe de 195 euros est imposé à tous cas actes. Auparavant, cela tournait souvent autour de 250 euros.

Si des biens immobiliers sont présents dans la succession, il faut ajouter 125 euros par bien immobilier. Pour un mandat de protection extrajudiciaire, 100 euros seront ajoutés s’il y a deux mandataires.

La notaire Katrin Roggeman, présidente de Fednot : " Les familles peuvent s’adresser aux notaires pour régler de nombreuses affaires, souvent sensibles, à un coût abordable. L’accompagnement du citoyen dans toutes les étapes de sa vie est notre cœur de métier. Il est essentiel qu’il reste accessible et abordable pour tous. "

La création d’une entreprise devient aussi moins chère. Le coût de constitution d’une société à responsabilité limitée avec des statuts standard sera d’environ 1.000 euros (1.500 actuellement). Cela comprend un honoraire fixe (200 euros), un montant forfaitaire pour les frais d’acte (275 euros) et les frais de publication et les taxes. Environ la moitié de ce que l’entrepreneur paie au notaire est donc reversée à l’Etat.

Davantage de notaires et de possibilités de carrière

Une des explications à la hausse continuelle des frais de notaires depuis 20 ans est le manque de notaires alors que les transactions immobilières et les prix ont fortement augmenté dans le même temps. Cela a été pris en compte par la présente réforme. Auparavant, un maximum de 90 nouveaux candidats notaires étaient nommés chaque année dans notre pays. À partir de 2023, le minimum sera porté à 120 nouveaux arrivants. Le notariat devient dès lors plus accessible.

Le contenu du concours (qui existe depuis 20 ans) sera également adapté. Les lauréats se verront offrir une possibilité supplémentaire de travailler en tant que "notaire adjoint". Il s’agit d’un notaire à part entière qui dispose exactement des mêmes compétences qu’un notaire ordinaire mais qui sera actif dans l’étude en tant que salarié, autrement dit un employé qui peut être notaire sans prendre de risques commerciaux.

La notaire Katrin Roggeman se félicite de cette avancée : " Le notariat est une profession difficile, notamment en termes de risques entrepreneuriaux, ce qui dissuade parfois certaines personnes talentueuses de devenir notaires. La création de ce nouveau statut permettra d’augmenter le nombre de notaires. Les nouveaux arrivants seront souvent des jeunes. Ils pourront exercer leur profession de manière flexible, avec un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée, car le travail à temps partiel sera possible. "

Même la procédure disciplinaire sera dépoussiérée

Actuellement, les procédures disciplinaires sont toujours menées au niveau provincial, par l’intermédiaire des Chambres provinciales des notaires. La proposition du ministre prévoit un conseil de discipline indépendant au niveau national, en coopération avec les huissiers et dirigé par un magistrat.

Pour les notaires, tous ces éléments garantissent la poursuite de la modernisation de leur profession. La dernière grande réforme a eu lieu il y a une vingtaine d’années avec, entre autres, l’introduction d’un concours pour devenir notaire. La notaire Katrin Roggeman : " Entre-temps, nous ne sommes pas restés inactifs, bien sûr. La profession a subi une véritable transformation, avec pour objectif ultime de servir encore mieux les clients. Il va sans dire que nous poursuivrons également nos efforts dans le domaine de la numérisation. Cette profonde réforme reconnaît à nouveau clairement la valeur ajoutée du notaire. Malgré les efforts considérables que nous allons consentir, nous voulons rester proches du citoyen et nous disposons d’une offre accessible et large de connaissance juridique. "

Chaque année, 2,5 millions de clients franchissent la porte d’une étude notariale lors de moments clés de leur vie. Ils y reçoivent des conseils indépendants et sur mesure qui leur permettent de réaliser en toute confiance des projets tels que cohabiter, vendre une habitation, créer une société ou planifier une succession. Le premier rendez-vous est souvent gratuit. Davantage d’informations sur le site www.notaire.be

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