Le Prince Hombourg de Kleist : un mythe gentiment déshabillé.
L’Italien Giorgio Barberio Corsetti, auteur de nombreuses mises en scènes d’opéra, n’a que faire de ces références à la simplicité de Vilar. Nous vivons à une époque de vidéos aux effets spéciaux surprenants. Alors il y va et réussit quelques beaux effets visuels dans cette Cour d’Honneur si difficile à meubler. Ce prince somnambule et fragile, qui sort d’un rêve pour se lancer dans une bataille victorieuse contre les Suédois, on le voit sur un immense cheval projeté sur le mur : spectaculaire. Mais en se voulant trop grand, en se lançant dans la bagarre sans ordre formel il a désobéi à son oncle le grand Electeur, qui le fait condamner à mort par une cour martiale. Toute la pièce repose sur ce procès et les hésitations à exécuter la sentence : le Prince lui-même, l’Electeur, l’Armée, sa fiancée, tout le monde hésite et pour ce nouvel Hamlet la question est " mourir ou ne pas mourir?".L’image initiale insinue l’homosexualité comme une des clefs du mystère. L’image finale qui en fait un pantin désarticulé ne résout pas l’énigme initiale mais est vécue comme une jolie "chute" finale, spectaculaire mais creuse.Joli effet de cirque.Le public marche
Le problème de cette mise en scène (à Avignon du moins) : ce grand texte un rien fastidieux est dit "à la française", proclamé à la face de la Cour, à grand renfort d’escaliers et autres objets utilitaires qui ralentissent l’action. Je comprends mal pourquoi les acteurs "francophones", munis de micros, continuent, pour la plupart à déclamer leur texte comme si le mistral allait emporter leur voix. Le rôle titre, joué par Xavier Gallais, peine à habiter un personnage inconsistent, alors que sa fiancée jouée par Eléonore Jonquez joue littéralement tout "faux". Seuls le grand Electeur, Luc-Antoine Diquéro et sa femme, Anne Alvaro et quelques militaires, échappent à cette diction grandiloquente. Le spectacle aura on l’espère le temps de se roder et de gagner en fluidité avant d'arriver à Liège au printemps prochain.
NB : les spectateurs-français-ont adoré ce style, conforme à l’idée qu'ils se font du théâtre rhétorique à diction "française", agrémenté d’images fortes, agréables à l’œil. Pratiquement pas de départ de spectateurs et accueil chaleureux. Rendons à César ce qui revient à César !
Le Prince de Hombourg, de Kleist, m.e.s Giorgio Barbero Corsetti, dans la cour d’Honneur jusqu’au 13juillet
-puis au Théâtre de Liège du 15 au 20 mars 2014. Infos www.theatredeliege.be
Christian Jade (RTBF.be)