C’est le cas d’Anne Teresa De Keersmaeker, dont la Partita 2 de Bach m’avait fait forte impression, au Kaai, en mai, avec une seule réserve, son déplacement dans l’immense Cour d’Honneur d’Avignon. Citation :
La de Bach, une de ses 6 œuvres pour violon seul : pour le commun des mortels, c’est le genre "austère devoir", a fortiori pour un public jeune, plus féru de rock ou de rythmes plus "trempés" que "tempérés". La proposer 3 fois de suite(amputée de sa célèbre "chaconne" finale, qui fait ¼ heure à elle seule!) :une fois dans le noir, sans même voir l’interprète "live", , une deuxième fois, sans l’entendre, en la devinant sous le pas des deux solistes, ATDK et Boris Charmatz, une troisième fois en mêlant, enfin, musique et danse : ce genre de défi au public, c’est du ATDK tout craché ! Et ça marche … Une seule interrogation : il faudra raccourcir l’angle de la Cour d’Honneur d’Avignon, fin juillet pour éviter l’épuisement des doubles solistes et la dispersion du regard des spectateurs.
Hier soir, à la première du 23 juillet, mes réserves se sont vérifiées dans l’immense Cour d’Honneur avec ses 2000 personnes pas conquises d’avance, face à une partita austère dans le noir. Puis les deux interprètes dansant sans musique ont commencé à lasser l’auditoire, séduit l’an dernier par une musique médiévale à l’aube, dans ce château d’époque. Heureusement le retour de la violoncelliste et la pertinence des mouvements ont reconquis partiellement un auditoire divisé mais pas hostile Avec ce formidable culot d’Anne Teresa offrant un " bis " provocateur, qui obligea les spectateurs fuyards à rester dans la Cour debout, par politesse. Et qui permit aux autres d’applaudir chaleureusement cette performance risquée pour le lieu.
Succès populaire immense, par contre pour Germinal, d’Antoine Defoort et Halory Goerger, ( vu au KFDA 2013) , un des spectacles qui ont fait le buzz ici. Etonnante cette performance apparemment très " intello", décortiquant à la fois nos neurones, leur fonctionnement pour structurer nos concepts en y ajoutant une histoire de l’évolution parfaitement hilarante. Des gags, des surprises scéniques : le bonheur ! Et dire que ces Français travaillaient à Bruxelles, à L’L et ont dû trouver ailleurs les moyens de leur ambition. C’est un des rares spectacles festifs qui ont fait rire tous les publics : l’intellect à la portée de tous. Belle démonstration qu’un spectacle sans histoire (mais à la structure serrée et bien pensée) peut intéresser le " grand public ".