Le réseau de communication Astrid saturé, des appels urgents bloqués, des messages entre secouristes qui ne passent pas… Une situation qui avait fortement handicapé les services de police et de secours, lors des attentats de Bruxelles, le 22 mars 2016.
Parmi les solutions permettant de remédier à cette saturation du réseau officiel : le recours, en cas de crise majeure, au réseau de télécommunications des radioamateurs, ces passionnés des techniques de transmission et des liaisons radio à travers le pays et le monde entier. Véritable roue de secours citoyenne, ce réseau amateur a déjà été utilisé par le passé. Par exemple lors du drame du Heysel, du naufrage du Herald of Free Enterprise ou des attentats de Bruxelles. Mais ce système de secours de seconde ligne devrait bientôt être systématisé en Belgique.
En Brabant wallon, l’autorité provinciale et l’Union Belge des Amateurs-émetteurs viennent d’ailleurs d’officialiser le partenariat par une convention officielle, ce vendredi, à Nivelles. La convention donnera un cadre clair à cette coopération rare mais importante. Et les autres provinces belges pourraient emboîter le pas, même si elles coopèrent déjà de façon moins officielle.
Bénévolat citoyen
Claude de la Potterie préside l’Union Belge des Amateurs-émetteurs, une association qui représente 3000 des 4700 radioamateurs belges dont la plupart sont formés par l’IBPT (la police des ondes), avec à la clé une licence en bonne et due forme. Un réseau important présent dans tout le pays. Parmi eux, 300 sont prêts à offrir leurs services aux secouristes, en cas de crise urgente ; ce sont les membres du réseau d’urgence BEARS (Belgian Emergency Amateur Radio Services). Rien qu’en Brabant wallon, ces radioamateurs urgentistes sont au nombre de 55. Des urgentistes de seconde ligne formés et capables de dépanner gratuitement les secours, par exemple lors d’un attentat ou d’une panne de courant généralisée. "Nous utilisons déjà notre réseau au quotidien. Mais en cas de catastrophe, il peut être implémenté dans un réseau d’urgence pour assurer le bon déroulement des opérations de secours. Une convention permettra évidemment de mieux impliquer nos membres, pour qu’ils se sentent concernés".
Soutien primordial
"En situation de délestage, de blackout, de panne de réseau ou de crise urgente, j’aurais besoin de plusieurs radioamateurs", explique Gilles Mahieu, gouverneur du Brabant wallon. "Il m’en faudrait alors dans les casernes des services incendie, dans les commissariats, dans les hôpitaux, auprès du Centre de crise national, auprès du Centre de crise provincial, auprès des chantiers et des sites d’intervention. Cette aide permettra de faire passer l’information. Ce qui est formidable, c’est que ce sont des citoyens qui s’engagent volontairement et bénévolement au profit de la collectivité. Ils nous aident et nous offrent une solution de type roue de secours, dans le cas où nous devrions subir des difficultés avec les technologies de communication habituelles, qu’elles soient filaires ou hertziennes".
Une couverture étendue
Le taux de couverture du réseau de communication radioamateur est relativement étendu. "Les particuliers ont leur matériel. Ils peuvent le déployer. Mais nous bénéficions aussi d’antennes permanentes placées en hauteur (20 à 35 m du sol environ) sur des sites importants, comme celui de la caserne des pompiers de Nivelles", explique Pierre Cornelis, expert en télécommunications. "Dans une situation d’urgence, nous pouvons utiliser une de nos stations mobiles. Par exemple, pour nous placer près d’un hôpital. A ce jour, en Belgique, la plupart des territoires peuvent être couverts. Nous devons toutefois encore trouver des antennes dans l’Est et le sud du pays. L’extrême Est du Brabant wallon aussi doit être amélioré".
Sécurité en question
Bien que très utile et important, ce système de seconde ligne soulève des questions en matière de sécurité. "Les agents de l'Institut belge des services postaux et des télécommunications connaissent le profil des utilisateurs", explique Claude de la Potterie, Président de l’Union Belge des Amateurs-émetteurs. "De plus, les services de l’IBPT passent au crible les fréquences utilisées par différents utilisateurs. Par ailleurs, depuis peu, nous sommes autorisés par la loi à crypter les données sensibles". Comme des adresses ou des noms qui pourraient être utilisés par des gens mal intentionnés. "Evidemment, même si nous prenons une série de précautions lors des plans d’urgence, nous ne pouvons pas garantir le risque zéro", précise le gouverneur. "Reste que l’aide des radioamateurs apportera certainement plus d’avantages que d’inconvénients".