Ils proposent des cadeaux originaux, ils font preuve d’un art inédit, ils dépannent celles et ceux qui n’ont pas d’idées à quelques jours d’une fête. Ils, ce sont les artisans, les créateurs et les gérants de boutiques qui mettent ces derniers en avant. Si le covid n’a pas eu leur peau, 2023 risque de signer un arrêt définitif pour pas mal d’entre eux.
En ce premier trimestre de l’année, Héloise Richard se pose de nombreuses questions sur l’avenir de ses boutiques de créateurs 100% belges installées à Namur depuis 8 ans et à Dinant depuis 2022 : " Tous les jours j’ai envie de pleurer. Ces dernières semaines, on assiste à une hécatombe de boutiques comparables à la mienne qui décident de mettre la clé sous le paillasson ou qui dans le moins pire des cas, recherchent des repreneurs ".
Depuis le passage à l’an neuf et souvent suite à l’analyse financière des dernières semaines, de nombreux concept-store installés pourtant depuis de nombreuses années ferment subitement leurs portes un peu partout en Wallonie et à Bruxelles. C’est le cas de la boutique " Kriekebiche " à Schaerbeek fin janvier dernier, " Vitrine des créateurs belges " à Tournai, " Kolibrikids store " à Bruxelles ou de " Bel Arte " à Bruxelles toujours qui, cette dernière, recherche un repreneur.
Contre vents et marées, L’Empreinte Belge – la boutique d’Héloïse Richard – survit mais l’entrepreneuse se pose de nombreuses questions quant à son avenir. " La crise est généralisée dans tous les secteurs, mais pour des boutiques pourtant bien installées comme les nôtres, que doit-on tirer comme conclusion ? On peut se réinventer, se diversifier, optimiser tout ce qu’on peut… mais jusqu’à quand ? Les coûts énergétiques ont augmenté d’une façon démentielle et le pouvoir d’achat de chacun s’est réduit. Aujourd’hui, je n’ai pas la force ni le courage d’arrêter, je ne m’y résous pas mais combien de temps vais-je tenir ? ".
Cette inquiétude, l’un des employés de la confiserie bruxelloise Papabubble la partage sur un post Facebook massivement relayé.
Pour Sophie Ponf, co-créatrice de l’entreprise de sucreries personnalisables, c’est la réduction des commandes en provenance des entreprises fin de l’année dernière qui apparait, aujourd’hui, comme une source de stress plus importante. " Depuis le piétonnier, on a vu un ralentissement dans les ventes de notre magasin à la Grand-Place, même si ce n’est pas plaisant, c’était gérable car nous avions tous les mois des commandes personnalisées et les moyens de payer tout ce qu’il fallait en temps et en heure. En règle générale, les commandes de fin d’année nous permettaient de finir en beauté et de démarrer l’année suivante en douceur. Ici, on n’a jamais eu aussi peu de commandes en provenance des entreprises et ce depuis octobre, ce qui est inquiétant pour nous. Et de surcroît, au-delà des dépenses énergétiques, le prix du sucre, notre matière première, a doublé. On n’a pas l’intention de baisser les bras, on ne peut pas de toute façon. Papabubble c’est ma compagne et moi ainsi que nos enfants qui vivent dessus. "
Ce ralentissement des commandes en provenance des entreprises, Héloise Richard l’a aussi ressenti, mais ce qu’elle constate aussi c’est la diminution des montants d’achats des clients traditionnels. " J’ai fait mes calculs, ces dernières semaines, mon chiffre d’affaires a fondu de 23%. Or, j’ai eu bien plus de clients et d’achats que par le passé. Aujourd’hui, clairement les gens dépensent beaucoup moins. Et pour des commerces comme le mien ça fait toute la différence ".
Pour l’entrepreneuse namuroise, qui ne cesse de se remettre en question sur sa stratégie et les évolutions des tendances pour trouver un nouveau souffle à ses boutiques, une grosse inquiétude flotte dans l’air en permanence : " Si j’arrête comme d’autres boutiques de ce genre, ce sont aussi 152 artisans qui perdent une opportunité de mettre en valeur et vendre leurs créations. Or je sens déjà que pour certains la situation est insoutenable. Certains me demandent de les payer endéans les 24h, sans quoi ils ne savent pas comment se nourrir ".