A contrario, le chercheur note un essor du mouvement de "Body positivism" (le fait d'aimer son corps). "C'est toujours mieux que le mouvement 'pro-ana' mais (ces comptes) se focalisent encore une fois sur le corps. Alors que pour guérir de l'anorexie, il faut s'en détacher", relève-t-il.
Nathalie Godart estime quant à elle que ces comptes, parfois tournés vers "le coaching alimentaire", entraînent un "envahissement de la pensée" par l'alimentation. Du coup, certains patients ont l'impression de guérir mais ils peuvent développer un trouble voisin, l'orthorexie, l'obsession de manger sain. Ils se détachent alors de leur poids (d'où la différence avec l'anorexie) mais ils contrôlent de manière excessive ce qu'ils mangent, avec des conséquences sur leur vie sociale.
Pauline Drecq, psychologue à Paris, a participé en 2019 à la création, en hôpital de jour, d'un atelier collectif basé sur l'expérience des patients sur les réseaux.
Ces jeunes atteints de troubles alimentaires "consultent les réseaux le soir dans leur chambre quand ils sont seuls, parfois dans des moments d'angoisse".
Durant les ateliers, ils commentent "un post Instagram ou une vidéo YouTube" et analysent leurs effets positifs ou négatifs sur leur mental.
Toutefois, le rapport au contenu diffère "selon le patient et le stade de sa maladie", relève la psychologue. Un compte culinaire "peut donner des perspectives de guérison à un patient et augmenter les restrictions d'alimentation chez un autre".
Loin de diaboliser les réseaux, l'objectif est de faire prendre conscience aux malades de l'impact qu'ils peuvent avoir sur leur trouble "afin que leur usage se tourne vers le soin", dit Mme Drecq.